LE DERNIER SOUVENIR

La solitude de King

Le vent soufflait fort sur la ville, soulevant des feuilles mortes qui virevoltaient le long des trottoirs. Les lampadaires projetaient des halos de lumière diffuse sur les bâtiments, contrastant avec l'obscurité des ruelles adjacentes. L'air était frais, chargé d'une mélancolie familière. King marchait seul.

Ses pas résonnaient faiblement sur l'asphalte fissuré, son ombre s'étirant à mesure qu'il avançait sous les lampadaires. Il ne marchait pas avec un but précis. Il marchait parce que c'était devenu une habitude. Éviter de rentrer trop tôt. Éviter le vide de son appartement. Éviter cette sensation d'écrasement qu'il ressentait à chaque fois qu'il ouvrait la porte.

Il connaissait ces rues par cœur. Il les arpentait nuit après nuit, suivant un itinéraire qu'il n'avait jamais cherché à changer. Il ne s'arrêtait jamais au même endroit, ne s'attardait pas trop dans les coins trop éclairés. Il ne voulait pas croiser de regards curieux, il ne voulait pas qu'on lui demande pourquoi il était là, seul, à cette heure.

Il n'avait jamais cherché à s'intégrer. Il n'en voyait pas l'intérêt.

On disait souvent de lui qu'il était calme, mystérieux, froid. Mais la vérité, c'est qu'il ne trouvait rien d'intéressant dans la plupart des conversations. Il n'avait jamais ressenti ce besoin viscéral de se mêler aux autres, de rire à des blagues qui ne l'amusaient pas, d'inventer des intérêts communs juste pour faire partie d'un groupe.

Il existait. Il était là. Et c'était tout.

Un quotidien creux

Au lycée, King était ce garçon qu'on voyait sans jamais vraiment le connaître. Assez populaire, mais toujours un peu en retrait. Il parlait aux autres, traînait avec eux, souriait quand il le fallait, mais il était toujours ailleurs. Une ombre parmi la foule.

Il écoutait, répondait parfois, mais son esprit était souvent happé par des pensées qui n'avaient rien à voir avec le monde qui l'entourait. Depuis quelques mois, des rêves étranges le hantaient. Des images fugaces d'un lieu immense, d'une structure colossale dont il ne distinguait jamais vraiment les contours. Parfois, il voyait des escaliers sans fin, parfois des silhouettes floues marchant dans des couloirs baignés de lumière. Ces visions ne disparaissaient pas au réveil. Elles restaient accrochées à lui, comme une impression persistante, un souvenir d'une vie qu'il n'avait jamais vécue.

Et pire encore, ces rêves ne se limitaient plus à ses nuits. Ils s'infiltraient dans son quotidien. En pleine journée, en cours, dans la rue, il lui arrivait d'avoir des absences. Pendant quelques secondes, il voyait des fragments de ces visions comme des rêves éveillés. Des éclats de lumière, des symboles gravés sur des murs invisibles, des murmures indistincts résonnant dans son esprit. Mais à chaque fois qu'il essayait de s'accrocher à ces images, elles disparaissaient aussitôt, comme si elles ne voulaient pas être comprises.

Il n'en parlait à personne. Qui aurait pu le croire ?

Les souvenirs d'un père disparu

Son appartement était un lieu silencieux, figé dans le temps. Rien n'y avait changé depuis la mort de son père. Chaque objet était resté à la même place, chaque meuble était un témoin immobile du passé.

Son père était parti trop tôt, trop vite, lui laissant seulement quelques souvenirs épars et une absence qu'il ne savait pas comment combler. Parmi ces souvenirs, il y avait une montre. Un vieux modèle en cuir noir, usé par le temps, dont le verre était légèrement fendu sur le côté.

Il la portait toujours. Pas pour lire l'heure. Mais parce qu'elle était la seule chose qu'il lui restait.

"Une montre ne sert pas qu'à lire l'heure," lui avait dit son père un jour. "Elle te rappelle que chaque seconde compte."

King ignorait si ses secondes comptaient encore. Mais il gardait la montre, comme un ancrage à quelque chose qu'il ne voulait pas oublier.

Myna – Un dernier au revoir

Il y avait une autre raison pour laquelle il marchait souvent tard le soir. Une raison qu'il n'avouait à personne.

Myna.

Sa meilleure amie. La seule qui voyait au-delà de son silence. La seule qui n'avait jamais cherché à briser ses barrières, simplement à marcher à ses côtés.

Elle était malade. Une maladie incurable, un combat qu'elle menait avec un sourire qu'il n'avait jamais compris. Il la visitait aussi souvent qu'il le pouvait, mais à chaque fois qu'il franchissait les portes de l'hôpital, il sentait un poids s'écraser sur sa poitrine.

Les jours passaient, et elle devenait de plus en plus faible. Pourtant, elle souriait toujours, comme si elle refusait d'être définie par ce qui la rongeait.

"Tu sais, King… Je crois que certaines personnes ne sont pas faites pour ce monde," lui avait-elle dit un jour, sa voix douce mais fatiguée.

Il n'avait pas su quoi répondre. Il s'était contenté de rester assis à côté d'elle, écoutant le silence entre eux.

Le jour où elle était partie, il n'avait rien ressenti tout de suite. Pas de larmes, pas de cris. Juste un vide. Un trou béant qui s'était creusé en lui et qui ne s'était jamais refermé.

Depuis, il portait son nom au fond de son cœur, comme une cicatrice invisible.

L'instant où tout bascula

Cette nuit-là, alors qu'il rentrait chez lui, perdu dans ses pensées, il entendit des voix derrière lui.

— "Regardez qui voilà."

Trois silhouettes s'approchaient, des élèves de son lycée. Des gars qui cherchaient toujours des ennuis, juste pour exister.

Il soupira. Il n'avait ni la patience ni l'envie de jouer à ce jeu.

— "Toujours à marcher seul comme un fantôme ?" lança l'un d'eux, moqueur.

Il ne répondit pas.

Mais ils n'avaient jamais besoin de réponse.

— "T'as toujours cet air supérieur, ça m'énerve."

L'un d'eux s'approcha et attrapa son poignet.

— "Oh ? Jolie montre. Sentimental, hein ?"

King sentit un frisson glacé parcourir son dos.

— "Ne touche pas à ça."

Erreur.

Le garçon sourit.

Et d'un geste brutal, il arracha la montre et la jeta au sol.

CRAC.

Le bruit du verre brisé résonna dans la nuit.

Le silence fut instantané.

Puis, King bougea.

Il ne réfléchit pas. Il ne contrôla rien.

Son poing s'abattit sur le premier visage qu'il vit.

Le coup fut d'une violence inouïe.

Le garçon s'effondra, sonné.

Les autres hésitèrent, mais King ne leur laissa pas le temps de réagir. Il frappa encore, son corps mu par une rage qu'il ne comprenait pas lui-même.

Un autre tomba.

Le dernier tenta de reculer, mais King l'attrapa par le col et le plaqua violemment contre le mur.

Son souffle était court.

Son cœur battait à tout rompre.

Il voyait rouge.

Et soudain… tout se figea.

Un grondement sourd résonna dans l'air.

Le sol sous ses pieds vibra.

Une lumière aveuglante éclata tout autour de lui.

King sentit quelque chose l'arracher à la réalité.

Son corps se dématérialisa.

Son esprit s'éparpilla.

Un vertige immense l'envahit.

Puis, dans un dernier écho, une voix résonna dans son esprit.

"Réveille-toi."

Et tout disparut.

À SUIVRE…

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