Chapitre 1 : Melissa au pays des merveilles

Je suis dans la merde.

- Comment je fais pour le cacher ? Tout me condamne. Chaque indice, chaque détail. Et maintenant, la police ? C'est un

cauchemar. Oui, c'est un cauchemar. Je vais me réveiller...

Les sirènes se rapprochent.

Merde, merde, merde ! Qu'est-ce que je dois faire ? J'ai l'impression que le sol s'effondre sous mes pieds, j'entends le martelement sourd de mes tympans résonner dans mon crâne, un bourdonnement lancinant m'écrase les tempes. Je ne sens plus rien, sauf cette oppression insoutenable dans ma poitrine, comme si l'air autour de moi s'était épaissi, m'étouffant lentement.

Je n'aurais jamais venir. Je n'aurais jamais être . Tout ça, c'est à cause de lui .

Un bruit de pas résonne dans l'obscurité. Ils sont proches. Trop proches.

Plus le choix. Je dois le faire.

6 mois plus tôt ...

— Ecoute, tout le monde le fait aujourd'hui, ça n'a rien de bizarre. Et arrête de faire ta sainte-nitouche !

Marie tapote sur son téléphone avec un air faussement innocent.

— On n'a rien à faire de toute façon, ça permet de passer le temps, de rencontrer de nouvelles personnes... Et qui sait, tu pourrais être surprise.

Si seulement j'avais su à quel point j'allais l'être.

— Passe-moi ce téléphone ! dis-je en fronçant les sourcils. Tu n'as pas mis mon vrai prénom, j'espère ?

— Evidemment que non. Ni ta date de naissance d'ailleurs. On ne sait jamais, y'a sürement des psychopathes.

Je la fixe, incrédule.

— Tu me forces à m'inscrire depuis des mois et maintenant tu me parles de psychopathes ?

Elle hausse les épaules en souriant.

- Bah, il faut juste être prudente.

Prudente ? C'est elle qui vient de me jeter dans la fosse aux lions sans me demander mon avis.

Marie a toujours été comme ça. Passionnée, extravertie, imprévisible. Je l'ai rencontré cette année à la fac. Jolie fille, menue, toujours apprêtée et attire facilement l'attention.

On vient toutes les deux d'une petite ville où il ne se passe jamais rien. Alors forcément, une fois arrivées en ville, elle a décidé de m'ouvrir au monde moderne, comme elle dit.

— Cette photo, ça te va ? demande-t-elle en me montrant l'écran.

ーHmm...

— Tfaçon, tu es plus jolie dessus que dans la vraie vie.

Je lui lance un regard noir tandis qu'elle éclate de rire.

Et voilà. C'était fait.

Me voilà catapultée dans cette foire aux illusions, ce supermarché du flirt où l'on remplit un panier virtuel de visages retouchés et de descriptions trop parfaites pour être honnêtes. Un espace où l'amour se négocie à coups de "swipe" et où la sincérité semble avoir disparu dans un océan d'egos en quête de validation.

Marie trépigne d'excitation en consultant mon profil.

— Eh ben, t'as plutôt du succès ! J'espère que t'es prête, t'as déjà un rendez-vous.

Je fronce les sourcils.

— C'est quand même ironique... Moi qui n'ai jamais eu de copain, pas même un baiser volé, me voilà sur une appli de rencontre.

— Justement! C'est le moment de changer ça, ma belle.

J'espère juste que ce n'est pas un psychopathe.

Jour du rendez-vous

Quand je le vois arriver, un poids s'envole de ma poitrine. Il ressemble à sa photo de profil, super. Ce n'est pas un Cat-fish.

Stéphane. Peau couleur ébène, grand, athlétique. Un sourire éclatant, une démarche assurée. Il est à l'air... plus que normal. Et en plus, il a de la conversation.

— Alors, dis-moi... Pourquoi une jolie femme comme toi s'est inscrite sur une appli de rencontre ?

Je lève un sourcil.

— Je pourrais te retourner la question.

— Moi ? Je viens d'arriver en ville, j'essaie de me faire de nouvelles connaissances.

— Rien que des connaissances, c'est ça ? Bon, moi je cherchais un prince charmant dans ce... fast-food du dating.

Il éclate de rire. Je ne l'avais pas remarqué mais de plus près, il a des airs de l'acteur Idriss Elva, il a vraiment tout pour lui, je ne comprends pas pourquoi il est sur une application de rencontre .

La soirée se passe bien. Même mieux que ce que j'aurais imaginé.

— C'était sympa, dit-il en posant son verre vide. On remet ça ?

Je marque une pause avant de sourire.

— Pourquoi pas ?

Il se penche légèrement vers moi, son regard ancré dans le mien.

Pourquoi il s'approche comme ça ? Oh merde