Chapitre 9

Chapitre 9

Madrid vibrait déjà sous la tension du derby madrilène.

Elena était seule dans une voiture, se dirigeant vers le Cívitas Metropolitano. Contrairement aux joueurs qui se déplaçaient en bus sous escorte, elle faisait le trajet à part.

Assise à l'arrière, elle observait la ville défiler à travers la vitre. Madrid était différente les soirs de derby. Les rues grouillaient de supporters vêtus de rouge et de blanc, des chants s'élevaient des bars, et chaque feu rouge semblait être une opportunité pour un fan de l'Atlético de provoquer un automobiliste madridista.

Elle tapota nerveusement du doigt sur son téléphone, parcourant les réseaux sociaux. Les tensions étaient déjà là.

Des centaines de messages circulaient sur elle et Alejandro.

"Madame Vasquez sera-t-elle présente pour voir son mari se faire écraser par l'Atleti ?"

"Alejandro joue mieux au théâtre qu'au foot. Peut-être que sa femme pourra lui donner des cours d'éloquence ?"

Elle soupira et verrouilla son écran. Elle commence à avoir l'habitude.

Depuis leurs "fiançailles", elle était sous le feu des projecteurs.

Et elle savait que ce soir, tout le monde attendait une réaction de sa part.

Lorsque sa voiture atteignit les abords du Metropolitano, elle sentit immédiatement l'hostilité.

Des groupes de supporters collaient aux barrières de sécurité, scandant des insultes à l'encontre des joueurs madrilènes.

En sortant de la voiture, elle ajusta sa veste et s'avança vers l'entrée réservée aux invités VIP. Les regards fusèrent immédiatement vers elle.

— Regardez qui voilà ! cria un supporter de l'Atleti.

— Madame Vasquez est venue voir son mari pleurer ce soir !

Des rires éclatèrent.

Elena les ignora.

Elle était habituée aux provocations. Mais elle savait que ce soir, plus que jamais, elle devait rester impassible.

Alors qu'elle atteignait l'entrée du stade, son téléphone vibra.

Un message d'Alejandro.

"Bien arrivée ?"

Elle hésita un instant, avant de répondre :

"Oui. Tes fans sont adorables."

Presque immédiatement, elle reçut une réponse.

"Je t'avais prévenue. Amuse-toi bien, Moreau."

Elle sourit légèrement avant de ranger son téléphone.

Le match n'avait pas encore commencé, mais elle savait que cette soirée allait être longue et sera chargée d'émotion .

Les gradins du Cívitas Metropolitano étaient en ébullition. Le derby madrilène n'était pas un simple match, c'était une guerre.

Elena s'installa dans la loge VIP, posant son sac à côté d'elle. Devant elle, la pelouse verdoyante semblait impeccable, mais l'atmosphère était tout sauf paisible.

Le coup d'envoi fut donné sous une pluie de sifflets venant des tribunes.

Dès les premières minutes, le Real souffrit.

L'Atlético mit une pression intense, leur jeu physique empêchant les madrilènes de poser leur football.

Elena suivait le match avec attention, les mains jointes sur ses genoux. Elle n'était pas seulement là en tant que femme du joueur-star. Elle était aussi une Madridista.

Ce qui signifiait qu'elle connaissait le football bien mieux que ce que les autres pourraient croire.

À la 12e minute, une première alerte arriva : une tête de Morata passa juste au-dessus de la barre.

— Ça va être long… murmura-t-elle en croisant les bras.

Alejandro était bien entouré sur le terrain, chaque fois qu'il touchait le ballon, trois joueurs se jetaient sur lui.

Elle savait que ce genre de match était fait pour le frustrer.

Et elle avait raison.

À la 23e minute, Alejandro perdit un duel face à un défenseur rugueux de l'Atleti, ce qui déclencha immédiatement une explosion de joie dans le stade.

— T'as vu ça ? lança un homme à côté d'elle, visiblement supporter de l'Atlético. Ton mari est en train de disparaître du match !

Elena tourna lentement la tête vers lui, un sourire en coin.

— Et pourtant, il a plus de ligues des champions que votre club.

L'homme ouvrit la bouche, puis se renfrogna sous les rires moqueurs des autres invités.

Elle reporta son attention sur le match.

À la 35e minute, le Real Madrid obtint enfin une opportunité.

Une contre-attaque rapide fut menée par Vinícius, qui glissa un ballon parfait à Alejandro.

Elena retint son souffle.

C'était son moment.

Alejandro se retrouva face au gardien.

Une fraction de seconde…

Un tir…

Et le ballon fut détourné par Oblak !

Le stade explosa de joie.

— Putain ! siffla Elena, frustrée malgré elle.

Sur le terrain, Alejandro mit les mains sur ses hanches, visiblement énervé.

Il n'aimait pas rater ce genre d'occasion.

Et elle savait que ça allait l'obséder jusqu'à la mi-temps.

Juste avant la fin du premier acte, à la 44e minute, un joueur de l'Atleti provoqua Alejandro après un duel musclé.

Les caméras captèrent l'échange, et sur l'écran géant, on vit clairement les mâchoires se crisper.

Elena soupira.

— Ne fais pas de conneries… murmura-t-elle, sachant très bien qu'il pouvait exploser à tout moment.

L'arbitre siffla enfin la mi-temps.

0-0.

Les joueurs quittèrent la pelouse sous les huées et les insultes.

Elena s'appuya contre son siège.

Ce match n'était pas fini.

Et elle avait l'impression que le pire restait à venir.

---

Les joueurs du Real Madrid revenaient sur le terrain, leurs visages marqués par la concentration. Alejandro Vasquez, lui, semblait plus déterminé que jamais.

Dans les tribunes, Elena croisa les bras, les jambes élégamment croisées. Elle savait qu'il n'aimait pas rester inefficace trop longtemps.

Et si elle connaissait bien quelqu'un d'orgueilleux, c'était bien son mari...

Le coup d'envoi de la seconde période fut donné. L'Atlético Madrid continua de jouer de manière agressive, coupant les transmissions et empêchant Alejandro de respirer.

À la 50e minute, un tacle rugueux d'un défenseur adverse envoya Alejandro au sol.

Le stade exulta, tandis que l'arbitre n'accordait qu'un simple coup franc.

Elena soupira et attrapa son téléphone pour voir les réactions en direct sur X (Twitter).

— Si Vasquez pense qu'on va le laisser marquer, il rêve !

— Alejandro Vasquez ? Toujours aussi transparent dans les gros matchs…

Elle roula des yeux et remit son téléphone dans son sac.

Sur le terrain, Alejandro se releva, le regard noir.

— Ce n'est pas bon… pensa-t-elle en voyant ses poings se crisper.

Elle savait qu'il pouvait perdre son calme quand on le provoquait trop longtemps.

Et l'Atlético le savait aussi.

À la 67e minute, le Real Madrid lança une offensive rapide.

Jude Bellingham récupéra le ballon au milieu du terrain et le transmit immédiatement à Alejandro.

Trois défenseurs se ruèrent sur lui.

Mais au lieu de chercher à dribbler, il fit une feinte subtile, puis décocha une passe laser entre les lignes.

Le ballon fila droit vers Vinícius Jr.

Elena se redressa immédiatement, son cœur battant plus fort.

Vinícius contrôla et enchaîna d'un tir croisé.

BUUUUUUUUT !

Le silence s'abattit sur le Cívitas Metropolitano, rapidement brisé par les cris des joueurs et des fans du Real.

Elena esquissa un sourire.

— Et voilà.

Sur le terrain, Alejandro pointa son doigt vers Vinícius, qui lui sauta dans les bras.

Il venait de signer une passe décisive parfaite.

L'Atlético tenta de réagir, mais à la 82e minute, le Real Madrid lança une nouvelle contre-attaque.

Cette fois, c'était Rodrygo qui se retrouvait en bonne position.

Alejandro fit un appel tranchant sur la droite, emportant un défenseur avec lui, ce qui laissa Rodrygo totalement seul.

— Joue-le ! s'exclama Elena en murmurant.

Rodrygo arma son tir…

Et envoya le ballon au fond des filets !

— Bordel ! lâcha-t-elle, se levant instinctivement.

Le Real Madrid menait 2-0.

Alejandro ne marqua peut-être pas, mais il avait été décisif sur les deux buts.

Le coup de sifflet final retentit, et les joueurs du Real levèrent les bras en l'air.

Alejandro échangea quelques mots avec ses coéquipiers, puis passa devant le défenseur qui l'avait provoqué toute la soirée.

Un sourire en coin, il murmura quelque chose à son oreille.

Le joueur de l'Atlético perdit immédiatement son calme et se retourna violemment, mais l'arbitre était déjà intervenu.

Alejandro s'éloigna tranquillement, levant deux doigts en l'air pour symboliser le score du match.

Elena éclata de rire.

— Il est insupportable… souffla-t-elle en attrapant son sac.

Mais au fond, elle devait bien l'avouer…

Il savait comment briller quand il le fallait.

La fin du match avait laissé une effervescence dans l'air madrilène. Le Real Madrid avait remporté la victoire, et comme à chaque derby, les rues vibraient sous les chants des supporters.

Mais pour Elena, l'excitation du match avait laissé place à une fatigue pesante.

Elle quitta discrètement le stade Metropolitano, préférant éviter le tumulte des médias et des fans en délire.

Alejandro, lui, n'était toujours pas prêt à partir.

Conduisant un SUV aux vitres teintées, elle fixa les lumières de la ville défiler par la fenêtre.

Elle aurait pu attendre Alejandro, rentrer avec lui comme une vraie épouse, mais après leur échange de la veille, elle n'avait pas envie de forcer sur ce rôle.

— Il fait sa vie, je fais la mienne.

Le chauffeur, un homme d'une cinquantaine d'années, brisa le silence :

— Señora Vasquez, vous voulez que je passe chercher quelque chose à manger avant de vous déposer ?

Elle secoua doucement la tête.

— Non, merci, Roberto. J'ai juste besoin de dormir.

Le reste du trajet se fit en silence. En arrivant à la villa, elle pénétra dans le hall immense, déposa ses clés sur la console d'entrée et laissa tomber ses talons près du canapé.

Un vide étrange régnait dans la maison.

Habituellement, la présence d'Alejandro remplissait les lieux, qu'il parle, qu'il râle, ou simplement qu'il fasse du bruit en cuisinant ou en mettant la télévision trop fort.

Là, rien.

Elle monta à l'étage, troqua sa robe élégante contre un t-shirt ample et un short en coton, puis s'allongea sur le lit.

Les bras croisés derrière la tête, elle fixait le plafond.

Elle n'avait pas l'habitude d'attendre quelqu'un.

Et encore moins un homme comme Alejandro.

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Les aiguilles de l'horloge tournaient lentement, et elle sentit ses paupières devenir lourdes.

Ce fut le bruit du moteur d'une voiture qui la fit sursauter.

Un rapide coup d'œil à son téléphone lui indiqua qu'il était près de 2 heures du matin.

— Il exagère… grogna-t-elle en sortant du lit.

Elle descendit sans prendre la peine d'enfiler autre chose et trouva Alejandro dans le salon, en train d'enlever sa veste.

Il leva la tête vers elle, surpris de la voir encore debout.

— T'es encore réveillée ?

— T'as vu l'heure ? rétorqua-t-elle en croisant les bras.

Alejandro haussa un sourcil, puis lâcha un soupir amusé.

— Depuis quand tu me fais un couvre-feu ?

Elle lui lança un regard noir.

— C'est pas un couvre-feu, Alejandro. Mais tu vis pas seul.

Il ricana et avança vers elle, les mains dans les poches.

— Tu voulais m'attendre, c'est ça ? demanda-t-il, un sourire taquin aux lèvres.

— T'as un problème d'égo.

Il rit doucement, puis passa une main dans ses cheveux, visiblement épuisé.

— On a fêté la victoire avec l'équipe.

— J'aurais pu rentrer avec toi.

Alejandro s'arrêta net et la fixa.

— T'avais envie de rentrer avec moi ? demanda-t-il, son sourire s'élargissant.

Elle leva les yeux au ciel.

— Bonne nuit, Alejandro.

Elle tourna les talons et monta les escaliers sans attendre sa réponse.

Mais au moment où elle referma la porte de sa chambre, elle entendit sa voix résonner en bas.

— T'es mignonne quand t'es jalouse, Elena !

Elle souffla d'agacement. Elle ? Jalouse ?

Cet homme était insupportable.

Et pourtant…

Pourquoi un sourire narquois flottait-il sur ses lèvres malgré elle ?

---

Le soleil de Madrid filtrait à travers les larges baies vitrées du salon, illuminant la villa d'une lumière dorée. Après une nuit agitée où elle avait tenté d'ignorer l'arrogance d'Alejandro, Elena avait pris une décision :

Aujourd'hui, elle bosserait depuis la maison.

Elle s'était installée sur la grande table en marbre du salon, son ordinateur portable ouvert, ses dossiers étalés devant elle et un café bien chaud à portée de main.

Elle espérait une matinée productive et paisible.

Mais elle avait gravement sous-estimé Alejandro Vasquez.

À peine avait-elle commencé à répondre à ses mails qu'un bruit sourd attira son attention.

Elle leva les yeux.

Alejandro venait de balancer son sac de sport au milieu du salon.

Puis, sans le moindre scrupule, il enleva ses baskets, qu'il laissa traîner à quelques centimètres du canapé.

Elena fronça les sourcils.

— T'as un problème d'organisation, ou tu le fais vraiment exprès ? demanda-t-elle d'une voix froide.

Alejandro haussa un sourcil innocent.

— De quoi tu parles ?

Elle désigna le sac et les chaussures d'un geste sec.

— Tu recommences. Je te rappelle que Tu as une femme de ménage, pas une esclave.

Il eut un sourire en coin.

— T'aimes quand c'est bien rangé, hein ?

— J'aime quand c'est vivable.

Il ricana et s'étira.

— T'as un balai, alors ?

Elle plissa les yeux.

— T'es un adulte, Alejandro. T'es censé savoir gérer ta propre merde.

Il rit franchement cette fois et s'éloigna sans même ramasser ses affaires.

Elena serra les poings.

— Il veut me rendre folle…

Une demi-heure plus tard, alors qu'elle était plongée dans un dossier important, il réapparut.

Cette fois, sans t-shirt.

Elle capta son reflet dans l'écran de son ordinateur avant même de lever la tête.

— Il est sérieux ?

Elle ferma lentement les yeux, inspira profondément et fit semblant de ne pas le voir.

Mais Alejandro Vasquez ne supportait pas d'être ignoré.

Il passa derrière elle, s'appuyant négligemment sur le dossier de sa chaise.

— Tu veux que je te masse la nuque ? murmura-t-il, amusé.

Elle tourna la tête lentement vers lui et lui lança un regard glacial.

— Tu veux que je t'éclate avec mon ordinateur ?

Il éclata de rire.

— T'es vraiment trop tendue.

— Et toi, T'es vraiment trop insupportable.

Alejandro leva les mains en signe de reddition, mais au lieu de s'éloigner, il alla s'asseoir en face d'elle, sur la table même.

Il attrapa une pomme dans la corbeille et croqua dedans, le regard malicieux.

— T'es fascinée par mon torse, c'est ça ?

Elena roula des yeux.

— J'ai vu mieux.

— Mens pas.

Elle serra les dents et fit semblant de replonger dans son écran.

— Je bosse, Alejandro.

Il haussa un sourcil et fit mine de réfléchir.

— Tu bosses, mais tu vis chez moi.

— Et alors ?

— Alors, t'as pas besoin de bosser, en fait.

Elle lâcha un petit rire sarcastique.

— Je veux bien être ta fausse femme, mais pas une potiche entretenue.

Il eut un sourire amusé.

— Ça veut dire que t'aimes vraiment bosser ?

— J'aime l'indépendance que ça me donne.

Alejandro pencha la tête sur le côté, comme s'il essayait de décrypter quelque chose chez elle.

Puis, lentement, il se leva.

— OK. Je vais te laisser bosser.

Elena se méfia immédiatement.

— Juste comme ça ?

Il haussa les épaules et s'éloigna en haussant la voix :

— T'as gagné cette manche. Mais la journée est longue, Elena. Très longue…

Elle le fixa partir et souffla profondément.

Ce mec était une épreuve à lui tout seul.