Chapitre 11 — Entre chaînes et flammes

Dans l’ombre d’une vieille poutre, Chibaki et Serah retenaient leur souffle, accroupis dans une salle attenante au repaire principal. À travers une fissure dans le mur, ils distinguaient nettement les voix des bandits, réunis autour d’un feu.

— On la vend demain à la première heure, dit l’un d’eux. Le marchand veut pas perdre de temps.

— Ce foutu elfe, il a dit que ça se négociait cher. Apparemment, un noble d’Astermir est prêt à aligner une somme ridicule juste pour une "pureté elfique". Tch... Ces types me dégoûtent.

— On fait que suivre les ordres du boss. Si l'autre con de gamin revient pour elle, on le choppe et on le vend avec. Ou mieux… on le balance aux chiens.

Chibaki serra les poings, son regard s'assombrissant.

Serah posa une main sur son épaule.

— C’est maintenant ou jamais, dit-elle dans un murmure à peine audible. Va la chercher. Je vais couvrir l’extérieur… discrètement.

Chibaki hocha la tête, convaincu qu’elle le suivrait.

Il s’éclipsa dans le couloir sans un bruit, se glissant entre les ombres comme un félin. Les planches craquaient à peine sous ses pas.

Au fond d’un long couloir faiblement éclairé, une porte de fer grinça. Derrière, une cellule étroite.

— Lyssaria…? chuchota-t-il.

Elle leva la tête d’un coup, surprise, les yeux embués.

— Chibaki… ! Tu es venu…

— Bien sûr que je suis venu.

Il brisa la serrure d’un coup d’épée précis. La porte s’ouvrit lentement, et Lyssaria, tremblante, sortit en silence.

Mais à peine eurent-ils mis un pied dans le couloir que des torches s’allumèrent tout autour. Une dizaine de silhouettes se dévoilèrent, armées.

— C’est bon les gars, le pigeon est tombé dans le piège, lança l’un des bandits avec un rire gras. Le boss avait dit que ce type reviendrait pour sa petite elfe.

Chibaki fronça les sourcils. Il se retourna. Serah n’était nulle part.

— …Serah ? murmura-t-il. Tch… Je suis seul, hein…

Les bandits fondirent sur lui. Il para un premier coup, recula pour éviter une dague, esquiva une massue de justesse. Le combat était rude, mais cette fois, quelque chose était différent. Il sentait les flux de Myuki autour de lui. L’énergie ambiante vibrait, pulsait… l’avertissait presque.

— Ils sont trois à droite… deux autres qui approchent par l’arrière.

Il se déplaçait plus instinctivement. Pas plus vite, mais plus lucide. Les coups ennemis devenaient lisibles, anticipables. Pourtant, ils étaient trop nombreux.

Un des assaillants réussit à le frapper à l’épaule. Il recula en grognant, fléchit un genou.

C’est alors qu’un cri retentit.

— CHIBAKI !!!

Il leva les yeux. Lyssaria, en larmes mais résolue, venait de ramasser une vieille épée tombée au sol. Elle s’élança, maladroite mais déterminée, et asséna un coup maladroit à un des bandits qui menaçait Chibaki par derrière.

— Lyz ! Ne reste pas là !

— Je… Je ne veux plus fuir ! Je ne veux plus te regarder souffrir sans rien faire !

Un court instant, tout sembla suspendu. Puis Chibaki se releva, le regard enflammé.

— Bien. Alors on se bat ensemble.

Ils combattirent dos à dos, Chibaki prenant l’initiative, Lyssaria le couvrant tant bien que mal. Les bandits, pris de court par la ténacité de leurs proies, commencèrent à reculer.

Après plusieurs échanges tendus, les deux compagnons réussirent à se frayer un chemin jusqu’à la sortie. Ils émergèrent à l’extérieur, haletants, couverts de sueur et d’égratignures.

Un petit rire cristallin résonna dans la nuit.

— Pas mal pour un amateur.

Chibaki se retourna, surpris. Serah était appuyée nonchalamment contre un arbre, les bras croisés.

— Serah... ! Où étais-tu ?! grogna Chibaki.

— Je t’ai laissé gérer, dit-elle en haussant les épaules. Fallait bien voir si t’étais capable de protéger ce qui compte pour toi. Et je dois dire… tu t’en es pas si mal sorti. Même ta petite amie a sorti les crocs.

Lyssaria rougit violemment à cette remarque mais ne dit rien.

— Bref, finit Serah. Maintenant que vous avez passé votre petit test… on va pouvoir parler des vraies choses.

Elle se détourna et marcha lentement vers la route.

— Venez. Je vous expliquerai en route.

Chibaki, encore un peu secoué, échangea un regard avec Lyssaria. Puis ils suivirent Serah, sans un mot, tandis que la nuit s’effaçait lentement pour laisser place à l’aube.

Le trio marchait dans un silence pesant. Le ciel s’éclaircissait peu à peu, peignant l’horizon de nuances orangées. Les pas de Serah foulaient le sentier de terre battue d’un air détendu, comme si elle revenait d’une simple promenade.

Chibaki, lui, gardait les yeux rivés sur son dos, l’esprit encore agité par ce qui venait de se passer. Lyssaria marchait près de lui, tenant son bras gauche, blessé lors de l’affrontement. Malgré sa fatigue, elle gardait la tête haute.

— Alors ? demanda-t-il finalement. C’est quoi ces "vraies choses" dont tu parlais ?

Serah ne répondit pas tout de suite. Elle se contenta de sortir une petite gourde de sa sacoche et but une gorgée avant de la tendre à Lyssaria.

— Vous venez de vous frotter à des bandits, pas à des imbéciles isolés. Ces types-là avaient des consignes claires, et ils suivaient des ordres. Vous avez entendu leur chef, non ? Le marchand d’esclaves… Il ne travaille pas seul.

Chibaki fronça les sourcils.

— Tu parles d’une organisation ?

— Pas une, non. Des. Il y a un vrai trafic derrière tout ça, et ce qui est arrivé à Lyssaria n’est qu’un fragment du tableau. Ces ordures cherchent des individus rares, des hybrides, des races anciennes ou peu vues… et ils les revendent à des nobles, des collectionneurs, parfois même à des chercheurs fous. Et ça… c’est plus courant qu’on ne le croit.

Lyssaria serra les dents. Chibaki posa instinctivement une main sur son épaule, sans détourner les yeux de Serah.

— Tu le savais depuis le début, pas vrai ? Tu m’as laissé faire exprès pour… quoi ? Me tester ?

— Exactement, répondit-elle sans détour. Tu veux avancer, tu veux protéger les tiens ? Alors je devais savoir si t’avais les tripes pour encaisser ce monde tel qu’il est. Parce que ce qui vous attend… c’est bien pire que quelques bandits dans une cave.

Ils s’arrêtèrent au sommet d’une colline. Devant eux, la route serpentait jusqu’à une grande plaine verdoyante, avec les premières traces d’un hameau au loin.

— On va se reposer là-bas. Une vieille connaissance m’y doit quelques services.

— Et après ? demanda Chibaki.

Serah le regarda par-dessus son épaule, son expression sérieuse.

— Après, on traque ce réseau. Et on commence par ce foutu marchand.

Le vent souffla doucement, emportant les derniers lambeaux de nuit. Chibaki serra le poing.

— Alors on y va. Jusqu’au bout.

Lyssaria hocha la tête à son tour, un éclat nouveau dans le regard.

Ils descendirent la colline en silence, chacun perdu dans ses pensées. Les événements de la veille avaient laissé des traces – physiques pour certains, plus profondes pour d’autres.

Lorsque le trio arriva au petit hameau niché entre les collines, le soleil baignait déjà les toits de chaume d’une lumière dorée. Les villageois les observèrent avec une curiosité discrète, sans hostilité, mais pas tout à fait accueillants non plus.

Serah mena la marche sans ralentir, s’arrêtant finalement devant une maisonnette aux volets usés. Elle frappa trois coups rapides, puis deux plus espacés.

La porte s’ouvrit lentement, révélant un homme trapu au regard fatigué, les bras croisés et la barbe mal entretenue.

— Toi… grinça-t-il en la voyant.

— Moi, ouais. Et j’ai besoin d’un toit, Jeran. Une nuit. Deux, si t’es de bonne humeur.

Jeran grogna, puis s’écarta en maugréant dans sa barbe.

— Faut croire que j’suis d’humeur charitable aujourd’hui.

Ils entrèrent. L’intérieur était modeste, mais propre. Quelques fauteuils râpés, une grande table en bois, et une odeur persistante de tabac séché.

— Reposez-vous, leur dit Serah. On a une journée devant nous pour récupérer… et une nuit pour préparer notre prochain coup.

Chibaki s’assit lourdement, déposant son sac à côté de lui. Lyssaria, encore un peu tendue, prit place à côté, les mains posées sur ses genoux.

— Ce marchand… dit-elle soudain. Il était là, à Luwel. C’est lui qui t’a interpellé, Chibaki, non ?

— Ouais. Un sale type. Je l’ai senti dès le premier regard.

— Ce n’est pas qu’un marchand, reprit Serah en s’adossant au mur. C’est un maillon. L’un des nombreux relais d’un réseau bien plus vaste. Et ce réseau, il se nourrit de villes comme Luwel, où des gens en apparence tolérants servent d’appâts… comme le maire.

Chibaki releva brusquement la tête.

— Le maire ?

— Oui, confirma Serah. Il attire les races non humaines avec de belles paroles, leur promet sécurité et travail… mais il les livre ensuite au réseau. La ville est une façade. Une vitrine pour masquer le trafic.

Un silence lourd tomba dans la pièce.

— Et vous comptez tout démanteler à trois ? demanda Jeran avec un demi-sourire.

— Non, répondit Chibaki calmement. On va commencer par une cible. Une à la fois. Et on ne s’arrêtera que quand plus personne n’aura à vivre ce que Lyssaria a vécu.

Le regard de la jeune elfe s’abaissa, mais une petite lueur brillait dans ses yeux. Pour la première fois, elle sentait que sa douleur n’avait pas été vaine.

— Alors on frappe où ? demanda Chibaki, les poings serrés.

Serah sortit un vieux papier froissé de sa sacoche, le déroula sur la table. Dessus, une carte de la région, avec des annotations et des symboles tracés à la main.

— Ici, dit-elle en pointant un croisement marqué d’un X rouge. C’est un relais discret, à deux jours de marche. Peu de gardes, beaucoup de passage. Ils y entreposent souvent des captifs avant transfert. Si on intercepte là-bas, on trouvera peut-être des preuves… ou des prisonniers encore en vie.

— Deux jours, murmura Lyssaria. Alors reposons nous bien… parce que la prochaine fois, ce ne sera pas juste pour fuir. Ce sera pour frapper.

Chibaki hocha la tête.

— Et cette fois, on frappera fort.

Le soleil s’élevait lentement à l’horizon lorsque Chibaki, Lyssaria et Serah quittèrent le hameau. Aucun mot inutile n’avait été échangé ce matin-là : les regards, les gestes, et la tension contenue suffisaient à comprendre que tous savaient ce qui les attendait.

Ils marchèrent deux jours entiers, ne s’arrêtant que pour dormir brièvement ou se restaurer à l’abri des regards. La carte de Serah était précise : ils évitèrent les routes principales et progressèrent à travers bois et sentiers oubliés, jusqu’à ce que les signes du relais apparaissent enfin.

Un petit bâtiment en pierre, à flanc de colline. Une vieille structure abandonnée à première vue… mais les traces récentes dans la terre humide, les chevaux attachés à l’arrière et les deux hommes qui fumaient à l’entrée ne laissaient aucun doute.

Serah, accroupie derrière un bosquet, chuchota :

— Combien de présences tu ressens, Chibaki ? Utilise ta détection du Myuki. Là, maintenant.

Pris de court, il ferma les yeux, se concentra. L’air autour de lui vibra faiblement. Des pulsations. Des traces de flux. Des points de chaleur vivante.

— Trois dehors… deux autres à l’intérieur… peut-être un au sous-sol, dit-il à mi-voix.

Serah hocha lentement la tête.

— C’est pas parfait, mais pas mal du tout. T’as plus qu’à faire confiance à ton ressenti, maintenant.

Chibaki hocha la tête. Lyssaria, juste à côté de lui, avait le regard durci. Elle portait une courte épée à la ceinture – rien de spectaculaire, mais assez pour défendre sa vie.

— Je viens aussi, dit-elle doucement.

Chibaki voulut protester, mais croisa son regard. Elle n’était plus la jeune elfe apeurée des jours passés. Il vit dans ses yeux une détermination calme. Pas de haine, juste la volonté de ne plus jamais être enchaînée.

— Très bien, dit-il. On reste groupés. Discrets. Rapides.

Serah esquissa un sourire satisfait.

Ils contournèrent les buissons, longeant la paroi arrière du bâtiment. Une petite fenêtre entrouverte leur permit d’accéder à l’intérieur sans bruit. Une fois dedans, l’odeur d’humidité et de sueur rance les frappa.

— À gauche, chuchota Serah en désignant un couloir mal éclairé. Les cellules sont probablement là. Moi, je prends l’étage. S’il y a des documents ou des plans, je les trouverai.

Elle leur fit un clin d’œil avant de disparaître dans l’ombre.

Chibaki et Lyssaria avancèrent à pas feutrés dans le couloir, l’arme au poing. Ils entendirent des voix dans la pièce principale – des hommes jouaient aux cartes, insouciants. Mais au fond du couloir, une lourde porte en fer grinça légèrement dans un courant d’air. Derrière elle… des gémissements. Des chaînes. Des souffles brisés.

Chibaki s’approcha de la serrure, la testa doucement. Elle n’était pas verrouillée.

— On libère ceux qu’on peut, murmura-t-il. Mais dès qu’on agit, ils sauront.

— Alors on agira vite, répondit Lyssaria, déjà prête.

Il ouvrit la porte.

L’instant d’après, l’enfer se déchaînerait… mais pour l’heure, c’était encore le silence avant la tempête.

La porte s’ouvrit doucement, révélant une petite pièce sombre, où plusieurs silhouettes affaiblies et enchaînées s’efforcèrent de bouger à leur arrivée.

— Chut… doucement, dit Chibaki en s’avançant,

Il sortit un petit couteau pour couper les chaînes les plus fragiles.

Lyssaria, aux aguets, surveillait le couloir, son épée prête.

Quelques prisonniers commencèrent à se redresser, leurs yeux pleins de reconnaissance mêlée à la douleur.

— Plus vite, il faut sortir d’ici avant que quelqu’un n’entende, chuchota Lyssaria.

Soudain, des pas lourds retentirent dans le couloir.

— Chibaki se figea.

— Ils arrivent.

Les voix de plusieurs hommes s’approchaient.

Sans perdre une seconde, il fit signe aux prisonniers de le suivre. Ils ressortirent en silence, progressant vers la sortie de secours derrière eux.

Juste quand ils croyaient s’en sortir, un sifflement aigu fendit l’air.

— « Attention ! » cria Chibaki.

Des flèches de Myuki renforcées, brillantes d’une lueur bleutée et presque vivante, fondirent vers eux. Ces projectiles n’étaient pas comme les flèches ordinaires : elles semblaient vibrer d’une énergie concentrée, capables de transpercer armures et boucliers classiques.

Chibaki fit un bond en arrière, repoussant une flèche à l’aide de son épée, tandis que Lyssaria plongeait sur le côté pour éviter un tir qui s’écrasa avec force contre le mur, laissant une marque incandescente.

— « Ces flèches… elles sont alimentées au Myuki ! » haleta Lyssaria, impressionnée et inquiète.

Grâce à sa détection du Myuki ambiant, Chibaki anticipait leurs trajectoires, mais il savait que s’ils restaient exposés trop longtemps, ils seraient en grave danger.

Les flèches de Myuki renforcées fusaient dans leur direction, tranchantes comme des rasoirs chargés d’énergie. Chibaki, concentré, détectait leurs trajectoires en anticipant chacun de leurs déplacements.

— Par ici ! cri a-t-il en attrapant Lyssaria par le bras. Faut sortir d’ici vite.

Ils se précipitèrent hors de la pièce, guidant les esclaves vers la sortie, quand soudain, un cri étouffé retentit.

Lyssaria s’effondra, une flèche fichée dans le flanc. Son visage se crispa de douleur, mais elle ne lâcha pas son arme.

— Lyz ! s’exclama Chibaki, horrifié.

Elle tenta de se relever, serrant les dents, puis posa une main sur sa blessure.

— Je… je peux gérer, murmura-t-elle faiblement, un éclat de détermination dans le regard.

Chibaki secoua la tête, furieux.

— T’es folle ?! Tu devrais être allongée, pas en train de courir au combat !

La rage monta en lui, brûlant tout son être. Sans réfléchir, il concentra tout son Myuki dans sa lame, activant sa technique ultime.

— Lame Tempête !

Une vague d’énergie tranchante jaillit de son épée, balayant les bandits comme une tempête déchaînée. En quelques secondes, ils étaient à terre, terrassés.

Essoufflé mais déterminé, Chibaki chercha Serah du regard.

Il la trouva bientôt, engagée dans un duel acharné contre le chef du relais. Serah parait en difficulté, chaque coup lui coûtant visiblement.

— Serah ! cria Chibaki en courant à ses côtés, lame encore vibrante d’énergie.

— J’arrive, répondit-elle, essuyant une goutte de sang sur sa joue.

Chibaki et Serah attaquèrent ensemble, leurs mouvements s’accordant parfaitement. La Lame Tempête frappait en rafales, la puissance de Chibaki compensant l’épuisement de Serah.

Après un échange intense, ils mirent finalement le boss à terre.

Essoufflés, ils se tournèrent vers Lyssaria, qui les regardait, toujours debout, bien que pâle.

— Comment… tu as fait ? demanda Serah, étonnée.

Lyssaria posa une main sur son flanc, sa respiration encore difficile.

— J’ai réussi à… me soigner un peu, instinctivement, je suppose. Mais ce n’est pas fini.

Chibaki fronça les sourcils, mêlant inquiétude et colère.

— T’aurais pas dû bouger. T’es blessée ! Tu pouvais aggraver ça !

Elle baissa les yeux, consciente qu’il avait raison.

— Je voulais juste aider… Je ne voulais pas rester là sans rien faire.

Chibaki secoua la tête, plus doux cette fois.

— Promets moi de faire plus attention. On a besoin de toi, mais pas comme ça.

Lyssaria hocha la tête, un sourire timide aux lèvres.

— Promis.

Chibaki portait Lyssaria sur son dos, ses bras fermement enroulés autour de son cou, tandis que Serah fermait la marche, vigilante. Autour d’eux, les autres esclaves suivaient, lents mais sûrs, le poids de la liberté leur donnant une énergie nouvelle.

Le soleil commençait à percer l’horizon, illuminant doucement la plaine qui s’étendait devant eux.

À mesure qu’ils s’éloignaient de l’ombre du bâtiment sinistre, des sanglots éclatèrent.

— Je… je pensais que je ne reverrais jamais la lumière du jour, murmura une vieille femme, la voix brisée par l’émotion.

Une autre, les larmes coulant sur ses joues, s’agrippa à Lyssaria.

— Tu es notre ange. Sans toi, on serait encore là-bas, enfermés, sans espoir.

Lyssaria, malgré la douleur qui lui lançait le flanc, esquissa un faible sourire.

— Ce n’est pas moi… c’est vous tous. Vous avez tenu bon. Vous êtes libres.

Un homme, les poings serrés, les yeux brillants d’une ferveur nouvelle, s’adressa à Chibaki.

— Merci… merci d’être venu. Tu nous as sauvés.

Chibaki, les traits tirés, le souffle court, répondit d’une voix rauque :

— C’est pas fini. On doit s’assurer que plus personne ne subisse ça.

Lyssaria, la tête posée contre le dos de Chibaki, murmura :

— Peu importe la douleur… tant que vous êtes libres, ça vaut tout.

Elle serra les dents, essayant d’ignorer la brûlure.

Serah, en arrière, observa la scène avec un léger sourire, une rare douceur dans ses yeux.

Le groupe avançait vers l’aube d’un nouveau jour, porteur d’espoir, de lutte… et d’un futur à reconstruire.