Réalisation plus grave

Bibliothèque centrale.

Jian soupira. « Elle ne prend pas trop de temps ? »

Nian cogna son front contre la table. « Être entouré de tant de livres me donne l'impression que mon cerveau va exploser. »

C'est alors qu'Ai arriva en marchant rapidement. Elle prit place, essoufflée. Son esprit était confus.

Les jumeaux inclinèrent la tête au même moment. Jian saisit cette occasion pour essayer de se rapprocher d'elle. « Que s'est-il passé ? Ton visage est un peu rouge. »

Ai tapota ses joues, surprise. « Vraiment ? »

« Oui. Tu es aussi essoufflée. Tu courais ? »

Eh bien, oui, elle courait. Elle ne savait pas à quoi penser, alors elle avait simplement continué à courir pour occuper son esprit.

« M-Ma pause s'est un peu prolongée, alors je me suis dépêchée de revenir. »

Nian ricana. « Et alors ? Tu n'es pas dans une école où tu dois revenir à la sonnerie. »

Elle se contenta de sourire.

Quelques minutes plus tard, Jun revint aussi. Leurs regards se croisèrent, mais ils détournèrent rapidement les yeux. Il resta figé un instant avant de retourner à son bureau.

Les jumeaux échangèrent des regards suspicieux.

Qu'est-ce qu'il a ?

À la fin de la journée, Jian chuchota avant de partir. « Euh. »

Ai leva les yeux.

Il semblait troublé. « À-À propos de ma déclaration... j'espère que tu y réfléchiras. »

Elle écarquilla les yeux.

J'ai complètement oublié...

« Ce- »

« Au revoir. »

« ... »

À l'heure de la fermeture, il ne restait plus qu'eux deux. D'habitude, avant de partir, Ai disait toujours à Jun : « Merci pour ton travail. »

Mais l'incident d'aujourd'hui avait créé un malaise entre eux.

Demain. Je le dirai demain.

Elle s'inclina simplement et partit.

La tête de Jun s'affaissa doucement sur son bureau.

Il était furieux. Mais il ne savait pas si c'était contre la situation ou contre lui-même.

L'espace d'un instant, il eut l'impression d'avoir trahi Shui. Mais ensuite, un rire triste s'échappa de ses lèvres.

À quoi est-ce que je pense ? Tout est fini entre nous.

Jun fixait le vide.

Au début, il pensait qu'il se détestait pour ne pas avoir repoussé Ai. Mais ensuite, il réalisa quelque chose de plus grave.

La pensée de Shui ne lui avait pas traversé l'esprit une seule fois pendant tout ce baiser accidentel. Elle n'était tout simplement pas présente du tout.

Cette révélation l'ébranla. Il avait consacré toute sa vie passée à Shui. Mais maintenant, embrasser une autre femme sans se sentir dégoûté le prenait complètement au dépourvu. Dans le passé, il aurait jeté cette femme aux requins.

Mais Ai...

Ses yeux... Ses yeux bouleversent toujours tout dans ma tête !

Qu'y a-t-il chez Zhou Ai ? Est-ce que simplement parce que nous sommes morts en même temps dans ma vie passée signifie qu'il y a un lien entre nous ?

C'est stupide !

Un lien entre nous... ne peut jamais exister.

—

Le lendemain fut à peu près identique. Ai arriva et vit Jun à sa place habituelle tôt le matin. Il la remarqua mais ne réagit pas.

Le « Bonjour » ne franchit pas non plus ses lèvres. Elle pinça les lèvres et se mit silencieusement au travail.

« Zhou Ai ! » s'exclamèrent les jumeaux.

« Bonjour, » les salua-t-elle poliment.

Jian semblait un peu nerveux. « Salut. »

Ai se souvint de sa déclaration. Mais elle savait déjà quoi dire. Elle se sentait triste à ce sujet, mais elle n'avait pas d'autre choix que de le rejeter. Elle attendait simplement le bon moment pour le lui annoncer.

Mais ce moment ne vint jamais car Jian évitait constamment ses demandes de rencontre. C'est ainsi que toute la journée passa sans qu'elle puisse parler à Jian.

Finalement, elle l'attendit dans le couloir en soirée, mais ce fut Nian qui sortit.

Il s'éclaircit la gorge. « Puis-je te parler un instant ? »

Ai pensa que peut-être il était au courant de la déclaration de Jian et qu'il venait lui en parler.

« Oui. »

« En fait... » il se gratta la tête et parut embarrassé. « Je... je t'observe depuis deux jours et je... »

Ai cligna des yeux.

Pourquoi ai-je une impression de déjà-vu ?

« J-Je t'aime vraiment ! »

« ... »

« Je sais que c'est un peu précipité. Écoute-moi avant de penser que c'est bizarre. Jusqu'à présent, toutes les femmes n'étaient attirées que par mon argent. Mais toi, tu n'en as rien à faire. Je me suis senti... en paix après longtemps. C'était étouffant d'être avec ce genre de femmes. Mais toi, tu es différente. J'avais même perdu l'espoir de trouver quelqu'un qui ne s'intéresserait pas à mon statut. Et puis je t'ai rencontrée. Je sais qu'il est trop tôt pour juger, mais je sens que je peux te faire confiance. »

Ai était perdue.

Ils se sont tous les deux déclarés à moi ?

« Tu... »

« Non, non ! » Il se couvrit les oreilles. « Je ne veux pas entendre ta réponse. Enfin, si, mais euh ! Je suis trop nerveux ! Mon cœur n'était prêt que pour la déclaration. Alors, ne dis rien aujourd'hui ! J'espère juste que tu y réfléchiras. »

Il respira profondément et se retourna. « A-Au revoir ! »

Ai resta seule dans le couloir, sans voix.

Les jumeaux se tapèrent dans la main et rirent.

« Hoho, c'était du bon jeu d'acteur. Tu n'as jamais pensé à devenir acteur, Nian ? »

Il sourit d'un air suffisant. « Nan. C'est seulement amusant quand c'est pour s'amuser, pas pour une vraie carrière. »

Jian jeta un coup d'œil à Ai. « Elle a l'air si troublée. »

« Je me demande qui elle choisira ? »

« Eh bien, sa réponse est son test final~ Voyons ce qu'Ai aura à dire demain. »

—

Le jour suivant fut encore pire entre Ai et Jun. Le peu de conversation qu'ils avaient l'habitude de partager avait également disparu. C'était comme s'ils étaient redevenus des étrangers.

Jun la regarda, et un sentiment d'agacement monta en lui. Pendant deux jours d'affilée, elle ne lui avait pas adressé ses salutations habituelles, et cela commençait à l'irriter pour une raison qu'il ne comprenait pas.

Ai, de son côté, se sentait également un peu mal à l'aise face à cette distance. Elle prit silencieusement place.

Les jumeaux préparaient encore un mauvais coup. Ils la regardèrent, pleins d'attente et d'embarras.

Le premier jour, elle avait rencontré les jumeaux. Puis ils lui avaient fait leur déclaration l'un après l'autre, et elle avait même partagé un baiser accidentel avec Jun.

Qu'est-ce qui ne va pas avec ma chance ces jours-ci ? se demanda-t-elle sérieusement.

Les jumeaux étaient assez agités toute la journée, ou du moins faisaient semblant de l'être.

Finalement, vers l'heure de fermeture du quatrième jour, elle appela Nian à l'extérieur de la bibliothèque. Les jumeaux se firent un clin d'œil, et il sortit avec empressement.

« Hé... As-tu réfléchi à nous ? »

Ai dit sérieusement : « D'abord, j'aimerais te dire que Jian s'est déclaré à moi avant-hier. »

Nian parut « choqué ».

« Quoi ? »

« Oui. Mais- »

« T-tu le choisis plutôt que moi ? » Il semblait blessé. « Zhou Ai, s'il te plaît, ne fais pas ça ! »

Ai fut surprise. « Peux-tu m'écouter ? »

« Non, non ! Je sais ce que tu vas dire ! Tu veux Jian, n'est-ce pas ? C'est... C'est toujours comme ça ! Nous aimons toujours les mêmes choses. Et maintenant nous aimons la même femme aussi ! C'est comme si être jumeaux était une malédiction pour nous. Mais tu sais quoi ? Quand c'est comme ça, c'est toujours Jian qui l'obtient. Alors... s-s'il te plaît, choisis-moi plutôt que Jian ! »

Il rit nerveusement. « Ça n'a pas d'importance, n'est-ce pas ? Nous sommes jumeaux, après tout. Nous nous ressemblons. Quelle différence cela ferait-il si c'est moi ou lui ? »