Chapitre 9: L'éveil de l'aura

Déon ne s’était pas préparé à cette éventualité. Il voulait fuir, mais c’était déjà trop tard, l’hydre était déjà devant lui. Déon fut brutalement projeté contre un arbre et, tant bien que mal, essaya de vite retrouver son équilibre. Quelques tirs de l’hydre l’avaient touché, et sa peau commençait à fondre.

Il utilisa avec précipitation les potions de guérison avant que son état ne s’aggrave.

Les secondes suivantes, le spectacle qu’il voyait le laissait bouche bée : l’hydre avait fait fondre les flèches incrustées dans ses yeux avant de commencer à se régénérer. Il n’avait lu nulle part que ses yeux contenaient de l’acide.

Bientôt, l’hydre était comme neuve. Elle avait dissous toutes les armes dans ses yeux et s’était régénérée. Déon était de retour à la case départ.

Il se tenait face à l’hydre, mais sans aucun plan. Pas parce qu’il était confiant, mais parce qu’il n’avait pas le temps de réfléchir sous cette pression insoutenable. L’heure était à l’improvisation. Les trois têtes de l’hydre sifflaient en crachant du poison dans sa direction.

Cette fois-ci, Déon la chargea en esquivant ses tirs. Il regrettait de ne pas avoir un pouvoir ou un attribut plus adapté pour ce combat. Selon la légende, pour tuer un hydre, il fallait soit lui couper toutes les têtes en même temps, soit les trancher une à une en les cautérisant pour l’empêcher de se régénérer.

Mais il existait une dernière méthode, si difficile qu’on en parlait à peine. Les hydres possédaient un noyau régénérateur dissimulé dans leur organisme. C’était la raison principale pour laquelle elles pouvaient se régénérer sans cesse. S’il parvenait à le trouver et à le détruire, l’hydre deviendrait un vulgaire serpent.

Le localiser était extrêmement difficile, car son emplacement changeait de façon aléatoire, mais pour Déon, c’était la seule alternative. Il ne pouvait pas percer les écailles, même avec son arc. Couper les têtes de l’hydre lui était impossible, la vitesse de régénération était trop élevée.

Trouver le noyau régénérateur, puis le détruire, était sa seule option.

Maximisant sa compétence innée, Déon ressentait même les moindres changements dans l’environnement. Il se concentra sur l’esquive des coups fatals tout en encaissant ceux qu’il jugeait inévitables.

Même s’il se faisait repousser, il n’avait pas encore commis d’erreur de jugement. Les techniques de pas qu’il avait perfectionnées grâce à l’entraînement de la technique de la vérité oubliée étaient en train de lui sauver la vie.

En se concentrant encore plus sur les mouvements de l’hydre et sa morphologie, Déon commença à percevoir un léger déplacement dans son ventre, comme une bille qui se déplaçait toutes les cinq minutes d’un endroit à un autre.

Une fois sûr de la position du noyau, Déon prit rapidement de la distance avec l’hydre en sautant sur une branche d’arbre. L’hydre, le voyant s’éloigner, ne se laissa pas faire. Elle se contorsionna comme un ressort avant de s’élancer sur la branche où se trouvait Déon.

Mais celui-ci s’était déjà préparé. Cette fois-ci, il visait le ventre de l’hydre, la seule partie dépourvue d’écailles. Rapidement, il décocha deux flèches successives sur l’hydre.

Fwish !

Les flèches atteignirent leur cible, mais la pénétration n’était pas assez profonde. Il n’eut pas le temps d’en préparer une troisième. L’hydre, complètement sur lui, lui cracha en pleine figure son poison.

À peine Déon reçut-il le jet qu’il sentit son visage commencer à se corroder. Peur, anxiété, désespoir, tout se mélangea en lui, provoquant une poussée d’adrénaline.

Hurlant de douleur, Déon attrapa la flèche qu’il tenait et la planta profondément dans les entrailles de l’hydre. Le noyau fut percé. Lui et la bête tombèrent tous deux de l’arbre et s’écrasèrent au sol.

Il y avait plus urgent à faire. Déon sortit précipitamment de son anneau dimensionnel tout ce qui lui restait comme potions de soin.

L’hydre n’était pas morte, mais les dégâts qu’elle avait subis étaient si importants qu’elle ne pouvait plus bouger.

[Ding !]

[Votre endurance augmente de +5]

[Votre force augmente de +3]

[Votre agilité augmente de +2]

[La somme de vos statistiques dépasse le seuil de votre expérience. Des points de statistiques sont créés. Montez de rang pour les attribuer.]

[Une nouvelle énergie s’éveille dans le corps de l’utilisateur. La statistique de l’aura a été créée.]

"Aaaaah, tais-toi, putain !" cria-t-il, allongé à quelques mètres de l’hydre.

Déon le sentait : son corps était différent. Il ressentait une énergie totalement différente du mana. Sans qu’on ait besoin de lui expliquer, il savait déjà que c’était l’aura.

L’aura était la récompense des guerriers qui avaient dépassé leurs limites. L’entraînement seul ne suffisait pas pour l’éveiller. Selon les dires, elle ne s’éveillait que dans des situations critiques.

Mais l’heure n’était pas à la contemplation. Il devait achever l’hydre. Prenant son arc, il effectua le deuxième mouvement de sa technique d’archer, Kamikaze.

Boom !

Il venait d’exploser les trois têtes de l’hydre. Son père ne lui avait pas demandé, mais il recueillit le sang de l’hydre avant de transférer son cadavre dans son anneau.

Il voulut ouvrir sa fenêtre de statut pour voir à quoi elle ressemblait, mais soudain une énorme fatigue l’envahit. Après la chute d’adrénaline, il ressentait plus vivement la douleur de ses blessures. Même avec les potions de guérison qu’il avait utilisées, Déon n’était pas complètement rétabli. Le poison de l’hydre le rongeait encore.

Il traîna lentement son corps endolori pour se cacher dans une grotte afin d’éviter d’éventuels prédateurs, car il était désormais au milieu de la forêt.

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Dans cette même forêt, non loin de Déon, une fille était en train de se faire pourchasser par une salamandre de feu.

"Hmmm, faut croire que c’est encore trop tôt pour moi", pensa-t-elle avant de semer la salamandre et de se réfugier dans une grotte.

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Déon souffrait encore des effets du poison quand ses sens l’avertirent de la présence d’une personne. Rapidement, en maîtrisant sa respiration, il se fondit dans l’environnement, prêt à juger l’individu avant de se montrer.

Quelques minutes plus tard, il aperçut la silhouette d’une fille en sueur, au souffle saccadé. Elle était plutôt grande, tenait une épée et portait une armure en cuir laissant ses bras et ses cuisses blanches exposées à l’air.

De là où Déon s’était caché, il ne pouvait pas voir son visage, mais elle ne semblait pas être une menace. Sortant de sa cachette, il s’approcha d’elle pour l’aborder, espérant obtenir des potions de soin.

"Hey, as-tu des potions de soin ? J’aimerais…"

"Sylphide !" cria-t-elle, surprise d’entendre une voix derrière elle.

Déon n’eut pas le temps de finir sa phrase avant d’être éjecté par une bourrasque de vent.

Alexia, surprise d’entendre quelqu’un lui murmurer à l’oreille, invoqua précipitamment son esprit de vent. Elle était aux aguets. C’était la première fois qu’elle s’aventurait aussi loin, et personne ne savait quel type de créatures rôdait au centre de la forêt.

En se retournant, elle vit le jeune homme qu’elle venait de projeter, allongé au loin, l’air très amoché.

"Ça va ?" demanda Alexia, visiblement inquiète mais toujours sur ses gardes.

Se relevant après s’être fracassé contre les parois de la grotte, Déon hocha la tête en guise de réponse.

"As-tu quelques potions de soin à me donner ? Je te les rembourserai."

"Oui, tiens", dit-elle en s’approchant de lui, toujours méfiante.

Voyant son visage de plus près, Déon eut une impression de familiarité. Il prit les potions des mains de la fille et les utilisa immédiatement.

Pendant que la potion faisait effet, il réfléchissait. Ce sentiment… d’où venait-il ? Puis il se souvint.

"Alexia…" murmura-t-il en la fixant dans les yeux.

Maintenant que le visage de Déon, érodé par le poison, s’était régénéré, Alexia le reconnut à son tour. Elle n’avait jamais eu de contact avec lui depuis leur enfance, mais elle savait qui il était.

Plus tard, elle avait appris qu’il n’avait aucun talent en magie et passait toutes ses journées enfermé, mais ce n’était pas quelque chose qui la concernait. À vrai dire, elle s’en fichait.

Ce qui la tracassait le plus, c’était ce qu’il faisait ici, au fin fond de la forêt.