Chapitre 3 - Le projet Thanatos.

« Pas un bruit, » souffle-t-il. « Ça commence. »

Je reste figé, mon cœur tambourinant violemment dans ma poitrine. « Qu'est-ce qui commence ? ».

Rowan esquisse un sourire. « La merde. Et ça sent vraiment pas bon. »

À peine a-t-il prononcé ces mots qu'une explosion lointaine secoue les murs autour de nous. Je sens mon cœur s'emballer et ma respiration devenir saccadée.

« On doit bouger, » ordonne Rowan en m'attrapant fermement le bras et en me tirant vers l'avant. « Ils vont arriver plus vite que prévu. »

J'acquiesce silencieusement, l'inquiétude me rongeant l'âme. « Qui sont-ils, exactement ? ».

Rowan s'arrête un instant. Après un long silence, il soupire profondément. « Ce sont des gens qui ne rigolent pas. Des gens qui veulent contrôler tout ce qui bouge ici, et qui n'hésitent pas à écraser quiconque se met en travers de leur route. »

Je fronce les sourcils, essayant de saisir l'ampleur de ses paroles. « Et ton projet ? Tu m'as dit que t'avais un plan. »

Rowan rit doucement, mais son sourire disparaît aussitôt. « Ce n'est pas juste mon plan, c'est la seule solution qu'on a pour foutre en l'air ce putain de système pourri. »

Il fixe mon regard avec intensité. « Tu crois que tout ça est un hasard ? Ce chaos, ces disparitions ? »

Je secoue vigoureusement la tête. « Non. Mais je veux comprendre exactement ce qu'on affronte. »

Rowan prend une profonde inspiration. « Ce que nous affrontons, c'est un ordre fondé sur la peur. Un pouvoir qui écrase les faibles et récompense les pires ordures. Mon groupe et moi, on a mis la main sur des documents; sur des preuves de ce qu'ils préparent. Expériences sur des prisonniers, manipulations, contrôle total...Ils veulent transformer les gens en pantins dociles, incapables de penser par eux-mêmes. Et toutes cette merde ça regroupe un même projet : le projet Thanatos. »

Un frisson glacé me parcourt le corps. « Et tu comptes faire quoi avec ces preuves ? ».

Rowan me fixe droit dans les yeux. « Les rendre publiques. Déclencher une réaction en chaîne qui renversera leur putain d'ordre. Mais il faut sortir d'ici avant qu'ils ne nous tombent dessus. »

Au loin, le bruit régulier de bottes se fait entendre. Rowan jette un regard plein d'urgence. « On se sépare. Si je me fais choper, tu continues. Compris ? »

« Attends, quoi ? » dis-je, surpris.

« T'as compris, Lior. »

Rowan pose une main ferme sur mon épaule et avec l'autre il me passe une clé usb. « Ne perds pas ton objectif. »

Puis, sans attendre, il se tourne et disparaît, attirant volontairement l'attention des soldats qui approchent.

Je reste là, seul, le regard vide, tandis que des coups de feu éclatent derrière moi. Mon estomac se noue en entendant Rowan crier pour distraire nos poursuivants. Même si j'ai envie de le suivre, je sais que je dois continuer. Je serre les poings, tourne les talons et me fond dans le décor.

Je cours à travers les ruelles, mes jambes brûlantes et mon cœur martelant ma poitrine. Chaque pas résonne comme une sentence, et les mots de Rowan « Ne perds pas ton objectif » tourbillonnent dans mon esprit. Le nom du Projet Thanatos s'inscrit désormais en lettres de feu dans mon âme.

Je traverse des rues désertes et des passages oubliés, l'esprit en proie à des questions sans réponses. Pourquoi toutes ces disparitions ? Pourquoi ce contrôle absolu ? Rien n'est laissé au hasard.

Un bruit sec me tire de mes pensées.

Des soldats patrouillent plus loin, leurs lampes fouillant chaque détails. Je me plaque contre un mur, l'adrénaline me vrillant les veines. Le moindre faux pas et c'est terminé. Je me glisse derrière des caisses renversées, retenant ma respiration.

Puis, dans le calme oppressant, un souvenir s'impose : la photo d'Elara. Son sourire éclatant, figé dans un passé révolu, me transperce le cœur. Mais cette fois, mes yeux se fixent sur un détail que j'avais manqué : un symbole discret, un cercle parfait traversé par un triangle inversé. Une clé. Ou un avertissement.

Je reprends ma fuite et parviens à une station de métro abandonnée, avalée par l'obscurité. Les néons vacillants projettent des ombres instables sur les murs tagués. Ici, loin des regards, je m'effondre sur un banc de béton, sortant la clé USB. Mes mains tremblent lorsque je la connecte à mon portable. Un fichier s'ouvre : « Dossiers Thanatos – État Alpha ».

Les premiers mots s'affichent brutalement à l'écran :

« Neutraliser le système Thanatos pour sauver la société... »

D'autres lignes détaillent des manipulations, des techniques de surveillance prédictive et la suppression des opposants. Chaque mot renforce l'horreur du complot qui se dresse devant moi. Je me sens englouti par la réalité de ce projet, trop vaste pour être ignoré. Mais pourtant j'ignore tout, la description est détaillée mais je ne sais toujours pas qui sont nos ennemis.

Alors que l'horloge de mon portable approche de minuit, je reçois un nouveau message d'un numéro inconnu :

« Rendez-vous demain, 23h, au vieux quai du port. Seul. »

Le message me glace le sang. Il est signé Ethan Drake, un nom que je n'avais jamais entendu, mais qui émerge comme la prochaine pièce du puzzle. Je n'ai pas le choix : je dois me rendre à ce rendez-vous, même si le risque est immense.

Avant de partir de la station, je transfère l'audio qui se trouve parmi les fichiers sur mon téléphone. Le temps me paraît long. Le téléchargement est enfin terminé.

Je quitte la station et reprends ma course dans la ville plongée dans l'obscurité. Le grondement lointain des sirènes et le bruit des moteurs me rappellent que l'ennemi est partout. Je serre la clé USB contre moi et repense aux paroles de Rowan, me disant que je dois continuer, quoi qu'il arrive.

Finalement, j'arrive devant un vieux pont surplombant le port. En dessous, le quai est noyé dans un brouillard, et quelques lampadaires diffusent une lumière blafarde sur l'eau noire.

Je m'assois sur le rebord du pont, reprends mon souffle et laisse mes pensées vagabonder. Je repense à la photo d'Elara, à son sourire, à la promesse que Rowan m'a faite. Tout cela forme un puzzle macabre que je dois absolument résoudre.

Au loin, j'aperçois un magasin d'électronique. Sans perdre une seconde, je m'y rends en courant.

« Bonsoir, je vais vous prendre des écouteurs, s'il vous plaît. »

Le vendeur ne me répond pas. Parfait, ça m'arrange. J'insère mon argent dans la machine, récupère les écouteurs, et quitte le magasin sans un mot.

Je trouve un coin sombre, à l'abri des regards. Là, je mets les écouteurs fraîchement achetés.

Entre deux grésillements, une voix grave se fait entendre :

« ... contrôle émotionnel à grande échelle... »

« ... manipulation des comportements pour éviter les rébellions... »

« ... élimination discrète des éléments perturbateurs... »

Chaque phrase s'infiltre dans mon esprit comme un poison. Le puzzle devient plus clair, mais aussi plus terrifiant. Ce n'est pas seulement une question de contrôle ; c'est une domination totale, un avenir dans lequel aucune pensée libre ne pourrait subsister.

Mais en comprenant ça j'apprends aussi que le temps presse, et je reprends ma course dans les rues désertes, le cœur lourd mais déterminé. Chaque ruelle, chaque recoin d'ombre me rappelle que je suis surveillé. Le froid mord ma peau, et malgré la fatigue, je ne peux m'arrêter. Je serre la clé USB contre moi et repense aux paroles de Rowan, qui me hantaient : « Ne perds pas ton objectif. »

Alors que je traverse un quartier industriel en ruines, j'entends soudain des bruits de lutte et des coups de feu. Mon cœur se serre. Je me précipite vers l'origine du vacarme et, horrifié, je vois une scène sortie d'un cauchemar : dans une allée sombre, je distingue Rowan, menotté et plaqué au sol par deux hommes en costume. Leurs visages sont durs, sans aucune trace de compassion.

« Rowan ! » crie-je, la voix brisée par la douleur et la rage.

Rowan, malgré la souffrance, lève faiblement les yeux vers moi. Dans son regard, je lis la souffrance, la résignation, mais aussi une ultime lueur d'espoir. D'une main tremblante, il glisse un bout de papier dans la mienne.

« Trouve Ethan Drake. Et si je ne reviens pas... termine ce que j'ai commencé... » murmure-t-il, sa voix rauque emplie d'une détermination ultime.

Avant que je puisse protester, l'un des hommes en costume se jette sur lui, et en un instant, ils le maîtrisent. Les coups de feu, les cris, et le vacarme se fondent en un chaos indescriptible, puis le silence retombe brutalement.

Je reste figé, les oreilles sifflantes. Le papier tremble entre mes doigts.

« Ne perds pas ton objectif. »

La douleur se transforme en une rage sourde. Je me relève, le cœur en feu, et reprends ma course, conscient que Rowan est capturé et que je dois désormais affronter ce combat seul.