1030 heures - Rotation 241, Cycle 2451 (Calendrier Universel)/Système Delta Pavonis / Planète AEGIS V, Salon de coiffure d'une rue commerciale de Fort Aeternum
Journal de Nyxélia – Entrée 9 : Un Peu de Liberté
Colonie d'AEGIS V – Capitale Fort Aeternum
17 ans – Permission.
État d'esprit : Nostalgique, mélancolique, mais cherchant une forme d'apaisement.
Aujourd'hui, pour la première fois depuis des mois, je porte des vêtements civils.
Plus d'uniforme. Plus de rigueur militaire. Juste une journée où je peux être quelqu'un d'autre.
Ou peut-être simplement moi.
J'ouvre la porte du salon de coiffure. Une petite cloche tinte, et une odeur de shampoing et de produits capillaires m'enveloppe aussitôt. Rien à voir avec l'odeur de métal et de désinfectant qui règne dans les bases militaires.
Une femme aux cheveux auburn attachés en chignon tourne la tête vers moi et m'adresse un sourire chaleureux.
— Bienvenue ! Installe-toi, je m'occupe de toi dans un instant.
Je hoche la tête et m'assois devant un grand miroir. Mon propre reflet me fixe. Mes cheveux noirs corbeau tombent en cascade le long de la chaise, soyeux, avec leurs reflets bleutés naturels.
Je glisse une mèche entre mes doigts. Aujourd'hui, je vais enfin faire ce que je voulais depuis si longtemps.
La coiffeuse revient et se place derrière moi. Ses doigts effleurent mes cheveux, les soulevant doucement pour les examiner.
— Tes cheveux sont magnifiques. Noirs profonds avec des reflets bleutés… J'ai rarement vu une texture pareille.
— Merci.
— Alors, qu'est-ce qu'on fait aujourd'hui ?
Je la regarde à travers le miroir et réponds d'un ton calme, posé :
— Je veux éclaircir les pointes. Bleu clair.
Elle réfléchit un instant, puis hoche la tête.
— Très bon choix. Avec ton noir profond, ça va créer un très beau contraste. Si un jour tu reviens et décide et que tu veux essayer autre chose, du violet ou du gris argenté t'iraient aussi à merveille. Voir même en vert si tu veut tenté un peut de Fantaisie.
Je regarde mon reflet et murmure :
— Peut-être un autre jour.
Elle commence à préparer la coloration tout en continuant à discuter.
— Tu es de passage ?
— En permission.
Elle arque un sourcil, visiblement intriguée.
— Oh, militaire alors ? Tu n'as pas l'air du genre à suivre un cursus classique.
J'esquisse un très léger sourire. J'ai déjà entendu cette remarque plusieurs fois.
— Je suis a l'Académie des Officiers Spécialistes d'Helios.
— Vraiment ? tu dois avoir… 20 ans au moins pour les Officiers Spécialistes .
Je ne réponds pas. Je sais que mon regard, ma posture, mon comportement ne sont pas ceux d'une adolescente ordinaire.
— Tu as de la chance. D'habitude, les militaires doivent garder les cheveux courts. Mais toi, tu les as laissés pousser ?
— Je suis dans un cursus spécial. J'ai quelques libertés. et c'est pour cela que j'y suis plus tout que la normale.
— Eh bien, profite-en. Des cheveux comme ça, c'est un luxe.
Alors qu'elle applique la coloration, mes doigts effleurent instinctivement la bague autour de mon cou. Un réflexe inconscient.
Je ne m'en rends même pas compte.
Mais elle, si.
— C'est un tic, non ?
Je cligne des yeux, légèrement prise de court.
— Quoi ?
Elle désigne le pendentif.
— Tu touches souvent cette bague. Un souvenir important ?
Mes doigts se figent. Je baisse les yeux et sens le métal contre ma peau.
Mais en baissant les yeux, elle remarque autre chose. Une autre bague, à mon annulaire gauche.
— Oh… Tu es mariée ?
J'ouvre la bouche pour répondre… mais je n'y arrive pas tout de suite.
Je ne suis pas mariée. Mais j'aurais dû être fiancée. J'aurais dû être mariée l'année prochaine.
Mais la réalité a été différente.
Elle perçoit mon trouble et pose doucement une main sur mon épaule, un sourire compréhensif aux lèvres.
— Tu sais, tu n'es pas obligée de répondre. Parfois, certaines histoires sont trop personnelles. Mais si un jours en revenant tu veux en parlé tu pourras.
Je baisse légèrement les yeux avant de souffler un simple mot :
— C'est une promesse.
Un silence s'installe. Elle acquiesce lentement, sans poser d'autres questions.
Le seul bruit qui reste est celui des gants frôlant mes cheveux.
Finalement, elle change de sujet avec douceur.
— Tu sais, tes yeux sont magnifiques.
Je relève légèrement la tête, surprise.
— Ce n'est pas souvent qu'on voit des yeux ambrés aussi claire… À la lumière, ils ont presque une teinte dorée.
J'esquisse un faible sourire.
— C'est la première fois qu'on me dit ça.
Elle sourit, amusée.
— Eh bien, il faut un début à tout.
Une heure plus tard, elle retire délicatement les serviettes et commence à sécher mes cheveux.
Face au miroir, je découvre mon reflet transformé.
Mes longs cheveux noirs tombent toujours en cascade, mais maintenant, les pointes ont une teinte bleu clair vibrante.
Je passe une main dans mes mèches. C'est… différent. Mais j'aime ça.
— Voilà. Ça te va vraiment bien.
Je me lève, observe encore mon reflet, puis souffle doucement :
— Ça me va.
Un peut plus tard, avant de dormir
Cette couleur… c'est un rappel.
Un rappel d'une femme de mon monde, que j'avais admirée enfant.
Mais aussi un rappel que, parfois, je peux encore faire des choix qui n'ont rien à voir avec l'armée, avec la guerre.
C'est peut-être insignifiant.
Mais ce soir, en me regardant dans le miroir, j'ai l'impression de me réapproprier une petite partie de moi-même.