Le moteur vibre sous nos pieds alors que nous avançons lentement dans la rue inondée. Le bruit du vent siffle à travers la vitre brisée, et je ressers ma veste autour de moi, frissonnant sous l'humidité glaciale qui s'infiltre partout. Jack garde les mains crispées sur le volant, le regard fixé sur la route presque invisible devant nous.
«Si on arrive à sortir de ce foutu quartier, on aura peut-être une chance de trouver un vrai abri,» lâche-t-il, jetant un coup d'œil aux voitures abandonnées sur les bas-côtés.
Je soupire en regardant mon téléphone. «J'ai encore du réseau. J'vais essayer d'appeler Grace.»
Il hoche la tête sans détourner les yeux de la route. J'appuie sur le contact de ma sœur, espérant entendre sa voix familière. La tonalité retentit, une fois, deux fois... puis un grésillement me fait sursauter.
«Riley ?» La voix de Grace est entrecoupée de parasites.
«Grace ! Tu vas bien ?! Où est Mia ? Vous êtes toujours à Lafayette ?»
Un bruit sourd couvre sa réponse. «Ouais, mais... statique... le vent... on a...»
«Grace, répète ! J't'entends mal !»
Le signal faiblit avant de revenir brièvement. «On est là... mais ça empire. Les routes... bloquées... statique... toi et Jack ?»
«On est toujours à Baton Rouge. On essaie de partir mais c'est... compliqué. Vous avez encore de l'électricité ?»
Elle semble hésiter. «On l'avait encore... bip... mais ça coupe. Écoute, sois prudente ! Ne restez pas—»
L'appel se coupe brusquement. Je fixe l'écran, déglutissant. «Putain.»
Jack jette un regard rapide vers moi. «T'as eu le temps de capter quelque chose ?»
«Elles vont bien, pour l'instant. Mais l'électricité commence à lâcher chez eux aussi. Et les routes sont bloquées. On va peut-être galérer à les rejoindre.»
Jack serre les mâchoires et tend la main vers son téléphone. «J'vais essayer mes parents.»
Pendant qu'il tente de les joindre, je fais défiler mes contacts et appuie sur celui de mes parents. Le téléphone sonne plusieurs fois, et j'entends enfin la voix de ma mère, légèrement troublée par l'interférence.
«Riley ? Chérie, tout va bien ?»
Un soulagement fugace me traverse. «Maman ! Oui, enfin... non. On est toujours coincés à Baton Rouge. L'ouragan empire. Vous êtes au courant ?»
«On suit les nouvelles...» Sa voix est tremblante, étouffée par un bruit de fond que je devine être la télévision. «On s'inquiète tellement pour toi et Jack. On a vu que la tempête a gagné en intensité. Vous êtes en sécurité ?»
Je ferme les yeux un instant, cherchant les bons mots. «Pas vraiment. On essaie de partir, mais les routes sont bloquées. La voiture tient encore, mais j'sais pas pour combien de temps.»
Un silence. Puis la voix de mon père, plus grave, intervient. «Ne prenez aucun risque inutile. Si vous trouvez un endroit stable, restez-y. On a entendu parler d'inondations soudaines.»
«Je sais... mais rester ici, c'est pas une option non plus.» Ma gorge se serre. «On essaie juste d'avancer. Vous voyez quoi aux infos ? C'est pire que ce qu'ils annoncent ici...»
«Les chaînes météo disent que la tempête pourrait encore gagner en intensité. Ils parlent d'inondations record et d'un risque de coupure d'électricité généralisée dans votre secteur.» Ma mère hésite. «Riley, quoi qu'il arrive, reste en sécurité. Promets-moi que tu ne feras rien de stupide.»
Je lance un regard à Jack, qui secoue la tête en raccrochant son propre appel. Toujours rien.
«Je promets,» murmuré-je, bien que je sache que cette promesse ne tiendra qu'à la merci de l'ouragan.
L'appel grésille, puis coupe brusquement. Je fixe mon écran, ma main légèrement tremblante.
Jack soupire. «T'as réussi à leur parler ?»
Je hoche la tête. «Oui. Ils vont bien. Mais ils s'inquiètent, et d'après eux, les infos annoncent encore pire que ce qu'on voit ici. Ça me dit rien qui vaille...»
«Évidemment.» Il secoue la tête. «Bon... je vais réessayer»
Jack compose rapidement le numéro, le portable pressé contre son oreille. Il attend, tapotant nerveusement le volant du bout des doigts. Après quelques longues secondes, il pince les lèvres et appuie sur le bouton de raccroché.
«Toujours rien. Messagerie directe, encore. »
Il tente à nouveau, les sourcils froncés. Cette fois, le téléphone sonne plus longtemps avant de basculer à nouveau sur le répondeur.
Jack soupire profondément, secouant la tête. «J'sais même pas s'ils sont au courant de ce qui se passe ici.»
«On essaiera plus tard. Pour l'instant, on doit juste... avancer.»
Il acquiesce et relâche légèrement la tension dans ses épaules. Devant nous, un amas de véhicules s'étend sur la route, bloquant le passage. Jack ralentit avant de s'arrêter complètement.
«Merde... c'est quoi ce bordel ?»
Je plisse les yeux à travers la pluie battante. Plusieurs voitures sont empilées, certaines portes ouvertes, d'autres semblant désertées en plein milieu de la route. L'eau monte à hauteur des bas de caisse, rendant l'ensemble encore plus chaotique.
Jack passe une main sur son visage. «On ne peut pas passer. Il va falloir contourner ou...» Il soupire. «Ou trouver un autre chemin.»
Je serre les dents, observant les alentours. «On pourrait essayer de dégager une voiture ? Juste assez pour passer ?»
Il grimace. «Vu le niveau de l'eau et l'état des véhicules, j'suis pas sûr que ce soit faisable. Mais...»
Il coupe sa phrase alors qu'un bruit anormal s'échappe du moteur. Un grincement sinistre. Puis un hoquet. Mon estomac se serre.
«Jack...»
Il tourne la clé dans le contact, tentant de relancer le moteur. Il tousse violemment, vibre sous nos pieds avant de caler complètement.
Jack s'enfonce dans son siège, le regard vide. «Putain.»
Il passe une main sur sa nuque, tendu, puis tente à nouveau de tourner la clé. Rien. Un silence lourd s'installe entre nous, seulement troublé par le battement régulier des gouttes de pluie sur le toit et les éclats de vent sifflant à travers la vitre brisée.
«C'est mort,» souffle-t-il finalement, les doigts crispés sur le volant.
Je me frotte les bras pour chasser le frisson qui me traverse. L'humidité s'infiltre partout, et le froid devient plus mordant. «On doit bouger alors.»
La pluie continue de marteler le pare-brise, et un silence pesant s'installe entre nous, uniquement troublé par le grondement lointain du tonnerre. Je serre les mâchoires, essayant d'ignorer la boule qui s'est formée dans mon estomac.
«On attend un peu ?» Je brise enfin le silence, même si la réponse me semble évidente. «Ou on sort et on trouve un autre moyen d'avancer ?»
Jack laisse échapper un soupir, ses doigts crispés sur le volant. «Sortir sous cette flotte maintenant, c'est la garantie d'être trempés en quelques minutes.» Il passe une main sur son visage humide, réfléchissant. «Mais attendre ici, c'est prendre le risque que l'eau continue de monter et qu'on reste coincés.»
Je regarde autour de nous, les reflets des lampadaires s'agitant sur l'eau trouble qui ne cesse de s'accumuler autour des voitures. L'inondation progresse lentement, inexorablement.
«Si on reste trop longtemps, on n'aura plus le choix,» dis-je d'une voix plus faible que je ne l'aurais voulu.
Jack hoche la tête, le regard rivé sur l'eau qui léchait déjà les bas de portières. «On prend encore deux minutes. Après, on bouge.»
Je déglutis, puis jette un coup d'œil à l'extérieur. L'obscurité semble encore plus pesante avec la pluie battante qui réduit notre champ de vision à presque rien. Des ombres dansent sur l'eau, des branches cassées flottent en s'écrasant contre les carcasses des voitures abandonnées.
«On ne sait même pas ce qu'il y a dehors,» murmuré-je, plus pour moi-même que pour Jack.
«Ouais...» Il frotte son visage avec ses mains trempées. «Mais rester ici, c'est comme attendre qu'on se retrouve piégés pour de bon. L'eau monte, Riley. Et franchement, vu l'état de cette bagnole, même si elle redémarrait, j'suis pas sûr qu'on irait bien loin.»
Je serre les dents. Il a raison. Chaque seconde qui passe rend la fuite plus compliquée. Mais sortir sous cette pluie diluvienne, sans savoir où aller...
Jack brise le silence. «On attrape juste ce qu'on peut porter et on se tire. Pas besoin de tout prendre, juste le nécessaire.»
J'acquiesce d'un hochement de tête. «D'accord. Alors on fait vite.»
Jack tend le bras vers l'arrière et attrape son sac, fouillant rapidement à l'intérieur. «On prend les bouteilles d'eau, la lampe torche, quelques barres énergétiques...»
J'ouvre la boîte à gants et y trouve un paquet de mouchoirs, un couteau suisse et une carte routière froissée. Je la déplie brièvement, mais l'humidité l'a déjà rendue partiellement illisible. «Ça servira peut-être,» murmuré-je en la glissant dans mon sac.
Les bruits de la tempête dehors s'intensifient. Le vent s'engouffre dans la voiture, sifflant à travers la vitre brisée. Un frisson me traverse alors que je referme mon manteau d'un geste nerveux.
«Prends aussi le briquet,» ajoute Jack en me tendant un petit zippo noir qu'il gardait dans sa poche.
Je l'attrape avant de resserrer les sangles de mon sac. «On est prêts ?»
Jack acquiesce et pose la main sur la poignée de la portière, mais il ne l'ouvre pas tout de suite. Il jette un dernier regard vers moi, et dans ses yeux, je lis la même hésitation que celle qui noue mon estomac.
«Attends...» Je prends une grande inspiration avant de reprendre. «On sait où aller ? Parce qu'on ne peut pas juste se jeter dehors sans plan.»
Jack serre la mâchoire, puis regarde par la vitre trempée par la pluie. "On suit la route et on essaie de trouver un bâtiment encore debout. Peut-être une station-service, ou n'importe quoi avec un toit solide. Mais rester ici, c'est pas une option.»
Je hoche la tête, sentant mon cœur accélérer. «D'accord. Mais dès qu'on trouve un endroit correct, on s'arrête. Pas question de marcher sans but sous ce déluge.»
Il appuie son front contre le volant un instant avant de souffler : «Ça marche. On fait comme ça.»
L'eau frappe bruyamment contre les portières, et à chaque nouvelle rafale, la voiture tremble légèrement. Il n'y a plus d'hésitation à avoir. Jack appuie sur la poignée et pousse la porte, la pluie s'engouffrant immédiatement à l'intérieur, détrempant instantanément ses vêtements. Il jure entre ses dents et resserre son sac contre lui, tentant d'ignorer le vent qui siffle à ses oreilles.
«On va être trempés en deux secondes,» grogne-t-il, levant les yeux vers le ciel tourmenté où les éclairs zèbrent l'horizon.
Je prends une profonde inspiration et sors à mon tour, sentant immédiatement l'eau ruisseler sur mon visage et s'infiltrer dans mes manches. L'air est saturé d'humidité, et le tonnerre gronde comme un avertissement lointain.
«Il faut trouver un bâtiment vite,» dis-je en haussant la voix pour couvrir le bruit de la tempête. «Si on reste trop longtemps sous cette pluie, on va finir gelés.»
Jack hoche la tête et jette un regard autour de nous. «La route est foutue. Trop de bagnoles, trop d'eau... Si on coupe par cette rue, on pourrait peut-être trouver un truc plus loin.» Il désigne une ruelle à moitié inondée qui longe un alignement de bâtiments commerciaux.
Je serre les dents en voyant l'eau atteindre presque nos genoux à certains endroits. «Ça passe, tu crois ?»
«Pas le choix,» répond-il en ajustant la sangle de son sac. «On avance. Peu importe ce qu'on trouve, ce sera toujours mieux que de crever de froid ici.» Je resserre mon sac sur mon dos et, à contrecœur, je me prépare à plonger dehors, dans l'inconnu.
Jack baisse la tête, luttant contre les rafales. «On suit la rue principale jusqu'à ce qu'on trouve un abri ! Mais on doit faire gaffe aux câbles tombés et aux débris.»
Je hoche la tête, plissant les yeux pour apercevoir quelque chose à travers le rideau de pluie. L'eau ruisselle le long de la chaussée, formant des vagues autour de nos jambes à chaque pas. Chaque avancée est une lutte contre l'eau glacée qui s'accroche à nous comme un poids mort. Le sol est instable, glissant sous nos pieds, rendant chaque pas plus dangereux que le précédent.
«Merde, c'est pire que je pensais,» grogne Jack en jetant un regard aux bâtiments environnants. Beaucoup ont subi des dégâts : des vitrines explosées, des panneaux publicitaires arrachés, et l'un des immeubles sur notre droite a un trou béant dans sa façade, dévoilant son intérieur ravagé.
Un frisson me traverse. Ce n'est pas qu'une simple tempête. C'est une force de destruction qui balaie tout sur son passage.
«On ne peut pas continuer longtemps comme ça...» Mon souffle est court, et mon corps est déjà raide à cause du froid. Chaque pas est un effort supplémentaire. L'eau semble aspirer nos jambes à chaque mouvement, comme si elle cherchait à nous retenir.
Jack s'arrête brusquement et désigne quelque chose au loin. «Là-bas ! Y'a une station-service !»
Je plisse les yeux, distinguant enfin les contours du bâtiment à travers le rideau de pluie. L'enseigne clignote faiblement, certaines lettres éteintes, rendant le mot illisible. Mais c'est un toit, et c'est tout ce dont on a besoin pour l'instant.
«T'es sûr qu'elle tiendra ?» Je crie presque pour me faire entendre au milieu du vacarme assourdissant.
Jack hésite un instant avant de hausser les épaules. «Elle est encore debout, c'est tout ce qui compte. On n'a pas le luxe de choisir !»
Je serre les dents et accélère le pas, sentant mes forces diminuer à chaque instant. «Alors on y va. Maintenant.»
Le vent hurle, plus violent à mesure que nous progressons. La pluie frappe mon visage comme des aiguilles glacées, et chaque pas me donne l'impression de traîner un poids mort attaché à mes chevilles. L'eau monte légèrement plus haut maintenant, rendant nos mouvements plus lents et plus incertains.
Jack trébuche contre quelque chose sous la surface, une boîte métallique ou un morceau de trottoir soulevé par la force des flots. Il jure et attrape mon bras pour retrouver son équilibre.
«Ça va ?» Je crie au-dessus du vacarme de la tempête.
«Ouais, mais faut vraiment qu'on fasse gaffe. On voit rien sous l'eau,» répond-il en serrant sa prise sur mon poignet un instant avant de me lâcher.
Nous avançons en diagonale vers la station-service, évitant les voitures à moitié submergées et les panneaux publicitaires arrachés qui flottent comme des épaves sur la route. Un claquement métallique attire mon attention et je lève la tête juste à temps pour voir une enseigne au-dessus d'une boutique se balancer dangereusement.
«Jack, bouge !» Je le tire par la manche juste au moment où un morceau de tôle se détache dans un hurlement strident et vient s'écraser dans l'eau à quelques mètres de nous.
Mon cœur cogne dans ma poitrine alors que nous accélérons le pas, le souffle court. Chaque mouvement devient une bataille contre les éléments.
Enfin, nous atteignons l'entrée de la station-service. Le bâtiment est légèrement surélevé sur une butte de terre, ce qui explique pourquoi l'eau n'a pas encore envahi l'intérieur. Pour l'instant, du moins. L'enseigne clignote faiblement, projetant une lumière intermittente sur les pompes à essence à moitié noyées dans l'eau. L'un des abris pour voitures s'est effondré sur le côté, les piliers brisés, et une grande baie vitrée est éventrée, laissant entrer la pluie à l'intérieur.
Jack pousse la porte battante du magasin, qui résiste quelques secondes avant de céder avec un grincement lugubre. L'air à l'intérieur est épais, chargé d'humidité et d'une odeur de plastique fondu mêlée à l'odeur rance des produits renversés.
Nous entrons prudemment, nos chaussures trempées laissant des traces sur le carrelage jonché de détritus. Des étagères sont renversées, certaines encore debout mais complètement vidées, preuve que d'autres ont déjà pillé les lieux.
«On dirait que quelqu'un est passé avant nous,» murmure Jack en pointant un frigo ouvert et vide.
Je frissonne et resserre mes bras autour de moi. «Au moins, on a un toit. Ça tiendra pour quelques heures.»
Jack hoche la tête et fait glisser son sac de son dos avant de regarder autour de nous. «On va voir s'il reste quelque chose d'utile. Des vêtements secs, peut-être de la nourriture. Et s'il y a encore un endroit sec où on peut s'asseoir.»
Je laisse mon regard errer sur les rayons en désordre. L'électricité fonctionne encore par intermittence, mais la lumière est faible, donnant à l'endroit une ambiance presque irréelle. J'essaie de ne pas penser au fait qu'on pourrait ne pas être seuls ici.
Jack s'éloigne vers le fond du magasin tandis que je m'avance près du comptoir. Derrière, une rangée de paquets de chips a été éventrée, certaines miettes flottant dans une flaque d'eau infiltrée par la baie vitrée cassée.
Je tends la main et attrape une bouteille d'eau encore scellée sur une étagère, puis une autre. «Y'a encore de l'eau potable ici !»
Jack revient avec une boîte de conserve cabossée. «Pas grand-chose, mais c'est mieux que rien.»
Je jette un coup d'œil vers l'extérieur. L'eau continue de s'accumuler lentement en contrebas, léchant le trottoir à quelques mètres de l'entrée. La pluie s'abat toujours avec la même intensité sur les vitres en morceaux, et un courant d'air froid s'infiltre à travers les ouvertures brisées. Je ne peux m'empêcher de me demander combien de temps cet endroit restera sec. L'ouragan est loin d'être terminé, et nous venons à peine de trouver un endroit pour reprendre notre souffle.
Jack pose la boîte de conserve cabossée sur le comptoir et s'étire en soupirant. «Bon, on a un toit sur la tête. C'est déjà ça.»
Je hoche la tête en regardant autour de nous. «Ouais... mais on est trempés. Si on garde nos fringues mouillées, on va finir congelés.»
Jack balaye la pièce du regard avant d'indiquer un coin du magasin où un présentoir de vêtements de pluie est encore intact. «Regarde, là. Peut-être qu'on peut se trouver de quoi se sécher et se changer.»
Je le suis jusqu'au rayon, et nous fouillons rapidement dans les vestes de pluie, les pulls et les pantalons de sport. J'attrape un sweat un peu large et un legging sec, tandis que Jack trouve un vieux jean et un pull polaire. Nous nous installons derrière une étagère renversée pour nous changer rapidement, profitant du maigre abri qu'elle nous offre.
Une fois vêtue de vêtements secs, je sens immédiatement la différence. L'humidité est toujours présente, mais au moins je ne tremble plus autant. Jack enfile son pull et secoue la tête. «Ça fera l'affaire pour la nuit. Demain matin, on verra où on en est.»
Je m'assois sur le sol, mon sac contre moi, et ouvre une bouteille d'eau en prenant une longue gorgée. «Tu crois qu'on devrait monter la garde, au cas où ?»
Jack s'appuie contre un mur, les bras croisés. «Je sais pas. Y'a pas grand-chose à voler ici, et on est les seuls à avoir voulu entrer sous cette tempête. Mais bon, si tu veux qu'on fasse des tours de garde, on peut alterner.»
Je hoche la tête en soupirant. «On verra. J'essaie juste d'anticiper.»
Un silence s'installe entre nous, seulement troublé par le grondement du vent et le bruit intermittent de la pluie martelant le toit. La station-service tient encore, mais l'ambiance est pesante. Comme si la tempête elle-même attendait son heure pour frapper plus fort.
«C'est pas vraiment le road trip qu'on s'était imaginé, hein ?» lâche Jack avec un sourire en coin.
Je ricane, secouant la tête. «Ah ouais, c'est clair. J'avais pas prévu 'nuit dans une station-service abandonnée sous un ouragan' dans mes options de vacances.»
Jack rit doucement avant de sortir une barre énergétique de son sac et de me la lancer. «Tiens, mange un truc. On sait pas quand sera notre prochain vrai repas.»
Je croque dans la barre sans grand enthousiasme, mes pensées ailleurs. Puis mon regard tombe sur une petite étagère près du comptoir, où des allumettes et des briquets sont encore accrochés.
«Attends une seconde...» Je me lève d'un bond et attrape une boîte d'allumettes. «On pourrait faire un feu improvisé. Ça nous réchaufferait et on pourrait même chauffer cette fichue conserve.»
Jack hausse un sourcil avant de sourire légèrement. «Pas con. Faudra trouver quelque chose qui brûle et un récipient pour faire chauffer ça.»
Nous fouillons un moment avant que Jack ne dégote un vieux bidon métallique abandonné à l'arrière du magasin. Je récupère quelques papiers détrempés et un peu de carton sec derrière une caisse. L'humidité rend l'allumage difficile, mais après quelques essais, de petites flammes commencent à danser au fond du bidon.
Je tends les mains vers la chaleur naissante, sentant immédiatement une vague de soulagement parcourir mon corps glacé. «Ça fait un bien fou.»
Jack s'installe à côté de moi et pose la conserve au-dessus des flammes en équilibre sur un bout de métal tordu. «On dirait presque un campement.»
Je secoue la tête en souriant faiblement. «Ouais... sauf qu'on n'a pas de guitare, ni de chamallows grillés.»
Jack ricane. «Ouais, et pas vraiment l'ambiance non plus.»
Un silence s'installe entre nous alors que la pluie continue de tambouriner contre le toit. L'odeur du métal chauffé envahit l'air, mêlée à celle du carton qui crépite doucement. Pour la première fois depuis le début de la tempête, je me sens presque bien, même si une ombre d'inquiétude ne quitte pas mon esprit.
«Tu crois que demain sera pire ?» Je brise le silence, ma voix plus faible que je ne l'aurais voulu.
Jack ne répond pas tout de suite. Il fixe les flammes un instant avant de soupirer. «Je sais pas. Mais on fera avec. Comme toujours.»
Je prends une grande inspiration et ferme les yeux un instant, profitant de cette maigre chaleur, sachant qu'elle ne durera pas éternellement. La nuit est encore longue.
Je l'attrape et l'ouvre sans hésiter. «T'as raison.»
Nous mangeons en silence, savourant chaque bouchée malgré l'ambiance chaotique autour de nous. Ce n'est pas grand-chose, mais c'est suffisant pour apaiser un peu la tension.
Soudain, un bruit sourd résonne à l'extérieur. Je me fige, le cœur battant. Jack tend l'oreille, posant lentement sa barre énergétique sur son sac.
«C'était quoi ?» murmuré-je.
Il secoue la tête, visiblement aux aguets. «Probablement un truc qui s'est décroché. Peut-être une enseigne ou un panneau.»
Mais au fond de moi, je ne peux pas m'empêcher de ressentir un malaise. La nuit va être longue