"Jean !" Le cri délicat de Jeanne parvint aux oreilles de son chevalier.
Sans avoir besoin de plus de mots, l'un des dix chevaliers aux côtés de Jeanne s'élança hors du groupe, emportant avec lui un peloton de cinquante cavaliers au minimum.
Le regard de Leonel se posa sur la hampe du drapeau dans les mains de Jeanne, mais son visage resta impassible. Il était certain que cela était invisible pour les autres, mais il avait très clairement vu une ligne de Force quitter Jeanne et pénétrer dans le corps de Jean. À cet instant, bien qu'il soit difficile d'évaluer les statistiques de Jean puisqu'il était à cheval, au moins, sa monture elle-même avait bénéficié d'une augmentation de 10 % de toutes ses caractéristiques physiques.
L'armée chevauchait actuellement à travers des plaines, mais une forêt se dressait devant eux. Semblant réaliser que quelque chose clochait, Jeanne envoya une escouade de cinquante cavaliers en éclaireurs.
'Alors c'est Jean Poton…' pensa Leonel, courant aux côtés des chevaux avec Aina à ses côtés. Très franchement, il aurait aimé monter un cheval lui aussi. Mais, il pensait tout simplement ne pas avoir eu le temps d'apprendre, alors il n'avait même pas essayé.
Selon l'histoire, l'action de Jean avait repoussé la tentative d'attaque surprise des Anglais et les avait mis sur la défensive. Étant donné que la plupart des forces anglaises cachées étaient des archers longue portée, les pertes furent dévastatrices et basculèrent complètement la bataille en leur faveur. Cette bataille se termina complètement sans siège.
'Mais ça… ce n'est définitivement pas comme l'histoire…'
Les sens aiguisés de Leonel détectèrent quelque chose d'étrange caché dans les ombres des cavaliers éclaireurs. Il n'avait jamais rien vu de semblable auparavant, mais c'était suffisant pour éveiller sa méfiance. Quant à Jeanne, soit elle ne l'avait pas remarqué, soit elle faisait semblant de ne pas l'avoir vu. Leonel trouvait qu'elle était difficile à lire.
Sans ralentir, Leonel attrapa son atlatl à sa hanche, y fixa une fléchette et envoya une ligne argentée percer l'air.
Il était tout à fait conscient du type de discipline qu'une armée exigeait, et encore plus conscient de combien il était mal vu d'agir sans les ordres de son commandant. Mais, Leonel jouait son rôle en tant que roturier. Comment un roturier pourrait-il être conscient de telles choses ?
Sa fléchette fendit l'air, provoquant une brusque inspiration de la part des hommes qui continuaient à charger à ses côtés. La raison en était que son lancer non seulement était beaucoup trop rapide, mais il traversait le peloton de 50 comme si leurs vies n'avaient aucune importance.
Leonel ne se concentra pas sur les réactions des soldats autour de lui. Ses yeux étaient entièrement fixés sur la fléchette aux plumes blanches.
Elle plongea dans l'air, manquant de peu plusieurs chevaliers éclaireurs. Juste avant de quitter le groupe, elle passa juste au-dessus d'une ombre qui semblait apparaître lentement.
Comme si effrayée, l'ombre se replia rapidement dans le sol, donnant l'impression que rien n'avait changé. Cependant, la fléchette de Leonel continua son vol, pénétrant dans la forêt d'arbres et provoquant le cri douloureux d'un archer embusqué.
Tandis que l'Anglais en armure de cuir tombait de l'arbre, plusieurs regards incrédules se tournèrent vers Leonel avant qu'un rugissement imprégné de moral traverse les rangs des Français.
De son cheval blanc, Jeanne lança un regard à Leonel, mais elle reçut en retour un sourire innocent et un pouce levé. Il ne paraissait pas différent d'un enfant heureux d'être utile pour la première fois. Ainsi, toute pensée de le réprimander disparut de son esprit.
L'escouade d'éclaireurs pénétra dans la forêt. Sans aucun doute, tous les archers ne pouvaient pas se cacher en haut d'un arbre. Si cette forêt était si dense, elle ne serait jamais sur la route de leur destination. La plupart tentaient de se cacher sur les côtés du chemin, attendant de tirer une pluie de flèches lorsque l'armée passerait, mais ce à quoi ils ne s'attendaient pas, c'était une réponse aussi préparée.
Au moment où l'unité de Leonel envahit la forêt, les Anglais étaient plongés dans le chaos.
Il attrapa sa lance dans son dos, sentant une chaleur familière dans son sang. Aina restait tout près derrière lui. Ce genre d'environnement n'était définitivement pas le meilleur pour son style de combat. Cela n'était pas pour dire qu'elle ne pouvait pas se battre. En fait, elle pourrait traverser ces arbres comme du beurre. Le problème était de savoir comment les autres soldats pourraient gérer les arbres tombant dans son sillage. Prenant cela en considération, elle n'agissait pas.
Leonel n'allait pas au-devant des Anglais pour les trouver et les tuer. Il profitait de la confusion totale sur le champ de bataille pour tracer une ligne droite vers l'unité de Jean.
Lorsqu'il avait lancé cette fléchette, ces ombres avaient définitivement émergé du sol sur plusieurs mètres de hauteur. Pourtant, personne sauf lui ne semblait les remarquer. Cela faisait sens si quelques-uns ne les voyaient pas, ou même la majorité, mais pas une seule personne ne réagissait. Cela signifiait une seule chose : les autres ne pouvaient pas les voir.
'Ça doit venir de l'état dans lequel ils se trouvent. Pour pouvoir entrer dans cette forme semblable à une ombre, ils deviennent essentiellement une fusion de Force. Mais, les humains ordinaires ne peuvent pas percevoir la Force. Et, les utilisateurs de Force avec des sens faibles ne peuvent pas la voir non plus. Puisque le cerveau est incapable d'interpréter ce qui est juste devant lui, la Force devient une zone aveugle !'
Il y avait quelque chose qui confondait Leonel encore davantage, cependant. Ces ombres n'avaient clairement aucune intention malveillante. En fait, cette ombre particulière ne ciblait pas le chevalier, mais plutôt l'archer caché dans l'arbre.
'Est-ce une des capacités de Jeanne ?'
Leonel et Aina traversèrent la forêt clairsemée comme deux volutes de fumée. Leur vitesse était déjà supérieure à celle des chevaux, alors rattraper l'unité de Jean n'avait rien d'un défi.
Comme prévu, attendant sur le côté opposé de l'embuscade et hors de la forêt, il y avait un autre groupe d'Anglais. Mais, les Français désorganisés et pitoyables qu'ils attendaient ne se matérialisèrent jamais. À la place, Jean avait parfaitement formé son escadron.
Brandissant sa pique et rugissant, il chargea, une lumière dorée éclatante entourant sa puissance.
"Au nom de Dieu ! Pour la France !"
La première ligne des Anglais fut décimée par une force semblable à un champ de force. Leurs hommes en avant furent éjectés de leurs positions, souffrant de graves fractures avant même que la bataille ne commence vraiment.
La réalité ne dévia pas de l'histoire. En fait, avec Leonel et Aina, le résultat fut encore plus dévastateur. Cette fois-ci, la Bataille de Patay ne fut pas seulement une victoire retentissante, ce fut un écrasement.
Et, tout comme l'histoire, les semaines suivantes continuèrent sur cette lancée. L'armée française, sous la direction de Jeanne, balaya le centre-nord de la France, enchaînant des victoires jusqu'aux portes de Reims, où Charles VII serait couronné.
Durant cette période, Leonel et Aina devinrent tout aussi célèbres que n'importe lequel des chevaliers de Jeanne. Bien qu'ils ne portaient pas d'armure, ni de montures, leurs résultats étaient indéniables. Jeanne ne tenta même pas de les freiner, leur permettant d'agir librement au sein des armées selon leurs envies.
En un peu plus d'un mois, plusieurs territoires autour de Paris étaient tombés et la menace des Bourguignons — traîtres français de la dernière génération — était tombée avec les Anglais. En quelques jours, Charles serait officiellement couronné à Reims, le lieu même où la quasi-chute de leur nation avait commencé.