POINT DE VUE D’ÉLODIE
Je serrai Jasmine fort contre moi, accroupi, tout juste dissimulé par le bureau de caisse de la boutique.
Devant nous, des bruits de cordes tendues et de harnais métalliques.
Puis des pas, lents, lourds, brisant les débris de verres éparpillés sur le sol.
Des lasers parcouraient les murs traquant le moindre mouvement.
Soudainement, plusieurs voix retentirent :
— RAS.
— RAS.
— RAS.
Les bruits de pas retentissaient de tous les côtés, les ombres de quelques-uns d’entre eux se portant sur le mur d’en face.
Soudainement, un nouveau bruit de harnais retentissait suivi d’un claquement sourd, puis un autre, et un autre.
C’était une voix bien plus grave qui en révéla la nature :
— On occupe la salle de contrôle, unité trois et unité cinq, ramenez-moi le matos dans la salle, les autres, fouillez le bâtiment à la recherche de ses occupants. Exécution !
Les bruits de pas s’accéléraient et mon cœur faisait de même, je pouvais sentir Jasmine se serrer encore plus fort contre moi, tétanisé.
Combien était-il et surtout qui était-il ?
La réponse logique serait True Human, mais comment auraient-ils su, un coup de chance ?
La chance, je semblais en avoir, sûrement dû au faite que l’on était dans la boutique la plus proche de leurs points de descente, car personne ne venait fouiller notre salle.
Cependant, cette chance n’allait pas durer et, quand une personne remarquera qu’ils avaient oublié cette salle, nous serions mortes.
Je me tournais vers Jasmine me glissant au niveau de son oreille chuchotant :
— Je suis là, tout va bien… Je te promets qu’on va s’en sortir.
Elle hochait la tête, puis je relâchais mon étreinte.
Accroupie, tapie dans l’ombre, je me dirigeais au niveau du couloir.
Plusieurs escouades, ils portaient le même uniforme blanc de True Human, à une différence près, leurs vêtements étaient décorés de plusieurs bandes rouges au niveau du torse et des bras.
Une partie d’entre eux fouillait notre étage tandis que les autres se dirigeaient vers les étages inférieurs.
Réfléchis, Élodie, réfléchie…
Qu’aurait fait Adrien ?
Dans un premier temps, je devais retrouver d’autres membres, rester seul avec Jasmine serait une grande erreur.
Cependant, pour rejoindre des alliées, j’allais avoir besoin d’une arme.
Conclusion, je devais me rendre dans ma chambre pour récupérer la mienne.
Je retournais au niveau de Jasmine, lui caressant le bras tout en chuchotant :
— Il faut que l’on parte d’ici, est-ce que tu te sens capable de me suivre ?
Elle plongeait son regard dans le mien, puis acquiesça s’essuyant les yeux à l’aide de sa manche.
Je me rapprochais donc du couloir observant les différentes patrouilles ennemies, lorsqu’aucune d’entre elles ne regardait dans notre direction, j’attrapai le bras de Jasmine, puis courus en direction d’un couloir situé à quelque mètre.
J’esquivais les bouts de verre, gardant une certaine distance avec les cordes par lesquelles les intrus étaient descendus en rappel.
Rapidement, nous traversions le centre de contrôle, la porte entrouverte laissait échapper quelques voix couvrant le bruit de nos pas.
Une fois arrivée, j’ouvris rapidement la porte, la refermant immédiatement derrière nous.
Je pouvais finalement laisser échapper un profond soupir.
Une étape de faite.
Une première victoire de courte durée, stoppée net, par l’écho de plusieurs rafales de coup de feu provenant des étages inférieurs.
Ce couloir, autrefois réservé aux personnels, était entièrement plongé dans le noir.
Faisant comme si, rien ne s’était passé, je marchais à tâtons, agrippant toujours fermement la main de Jasmine m’assurant qu’elle marchait dans mes pas.
On avait pour habitude de déposer du matériel dans ce couloir, rien qui ne pouvait me servir dans cette situation, mais je préférais éviter de me cogner dedans et faire du bruit.
Finalement, nous arrivions au niveau de la porte que je cherchais, elle menait sur la cage d’escalier, nous permettant d’atteindre les étages inférieurs.
Nous entamions notre descente, prudemment, afin de ne pas tomber.
Soudain, sans crier gare, une porte à quelques marches en dessous de nous s’ouvrit brusquement, laissant échapper la lueur d’une lampe torche.
— Qu’est-ce que je déteste cet endroit, on y voit que dalle ! rouspéta une voix inconnue en contre bas
— Ouais et, comme d’habitude c’est à nous de nous en charger, mais bon, vois le bon côté des choses, il nous manque plus que le rez-de-chaussée et l’aile de services sera sécurisé.
— Ouais, ouais.
Les deux hommes ne prenant même pas la peine de regarder vers le haut des escaliers descendirent au niveau du rez-de-chaussée, continuant leurs discussions, mais prenant tout de même soin de balayer ce qui se trouvait en face d’eux avec leurs pointeurs laser.
J’attendais patiemment de ne plus entendre le son de leurs voix avant de descendre et d’emprunter la porte qu’il avait préalablement ouverte.
Rapidement un échange violent de coup de feu provenait du rez-de-chaussée, plus violent et plus long que la première fois.
Je pouvais sentir le cœur de Jasmine battre de plus en plus fort, cette fois-ci, je ne la tirais pas part le bras, mais glissait ma main dans son dos, lui donnant une impulsion, la faisant avancer a mon niveau coller contre mon flanc.
De l’autre côté de la porte, toujours, autant de patrouilles fouillaient les pièces une par une, heureusement au vu du temps passer dans chacune d'entre elles, ils semblaient uniquement vérifier la présence de membre de notre faction et ne semblaient pas fouiller les pièces à la recherche de matériel.
On n’avait pas de temps à perdre une fois les patrouilles assez loin, j’avançais en direction de ma chambre.
Cependant à peine eus-je le temps de faire plus de deux pas que des voix s’élevaient à moins de deux mètres provenant d’une boutique toute proche.
Immédiatement, je fis demi-tour, fermant la porte rapidement, mais silencieusement, provoquant un léger grincement, puis je me dirigeais avec Jasmine à quelques marches en hauteur, éloigné de la porte.
Mon cœur semblait s’écraser contre ma poitrine à chaque battement.
Soudain la porte s’ouvrit une seconde fois, laissant apparaître un homme seul.
Il resta immobile l’espace d’une seconde, peut-être deux, scrutant les environs avant de crier.
— Laisse tomber, il m’avait semblé entendre du bruit. En même temps du bruit, toutes les escouades en font…
Il termina sa phrase tout en faisant demi-tour, fermant soigneusement la porte derrière lui.
Ouf…
Sur ce coup-là, j’avais eu chaud, j’ai failli faire une grossière erreur.
Ça m’apprendra à vouloir faire vite…
Je restais assise quelques secondes, adossée contre le mur reprenant mon souffle.
Jasmine me regardait d’un air inquiet, mais n’osait probablement pas me poser de question de peur de faire trop de bruit.
— Ne t’inquiète pas, je reprends mon souffle, puis on fonce dans notre chambre récupérer mon arme. chuchotai-je d’une voix la plus apaisée possible
Finalement je me redirigeais vers la porte, l’entrouvrais, cette fois, pas de précipitation, je prenais le temps d’analyser toutes les patrouilles m’assurant qu’aucune ne pouvait surgir de nulle part.
Après avoir la certitude que personne ne regardait vers nous, je vérifiais une fois de plus.
Tout de suite après, je partais en direction de ma chambre, essayant de garder un équilibre entre rapidité et discrétion.
Alors que nous nous trouvions a seulement quelques mètres de ma chambre, l’écho de coup de feu provenant du rez-de-chaussée se répercutait de mur en mur résonnant dans tout le bâtiment central.
Je profitais de cette occasion pour courir à toute vitesse dans ma chambre, ouvrant la porte d’un coup sec et la refermant aussi tôt une fois de l’autre côté.
Le bruit des coups de feu avait en grande partie camouflé le bruit que l’on avait provoqué.
La pièce était plongée dans le noir.
Esquivant le matelas de Jasmine situé au niveau de la porte d’entrée, mais qui n'était plus là, je tâtonnais jusqu’à trouver mon bureau que j’utilisais comme repère pour me rendre au niveau de mon lit.
Je fouillais sous celui-ci, glissant mon bras jusqu’à atteindre un grand carton où était stockée mon arme.
Je le tirais vers moi, afin de pouvoir l’ouvrir, puis finalement laisser échapper un long et profond souffle.
Mon arme était là et j’avais deux chargeurs pour nous défendre.
Certains diraient que c’étaient peu, pour moi c’était surtout mieux que rien.
Maintenant, si l’on croisait quelqu’un dans le pire des cas, je pouvais nous défendre.
Nous prenions le temps de souffler, les rafales semblaient s’être arrêtées, du moins pour le moment.
Parfois, les bruits de pas d’une patrouille passant au travers de la porte.
Mais nous avions assez pris notre temps, nous devions quitter le bâtiment, mais, avant cela, je voulais me rendre dans l’infirmerie voir si tout allait bien là-bas.
Prenant mon courage à deux mains, étant plus sereine, maintenant que j'étais armée, j’entrouvris la porte, vérifiant où se situait l’ennemie.
Une patrouille semblait terminer de vérifier une boutique, d’autres étaient accoudés à la rambarde observant le rez-de-chaussée.
Le chemin ne faisait aucun doute, je m’accroupissais me rapprochant le plus possible du sol et progressais en direction de l’escalier de service.
Cette fois n’ayant plus les mains libres, Jasmine devait garder le rythme seul, et ne jamais s’éloigner de moi et, sur ce point, je n’étais pas inquiète.
Marquant quelques pauses, m’assurant qu’aucune patrouille ne regardait dans notre direction ou ne s’approchait de notre aile, nous arrivions à l’escalier.
Plonger dans l’obscurité totale, nous descendions les marches, guettant le moindre bruit, il fallait à tout pris éviter de croiser une patrouille qui déciderait de remonter par ici.
Une fois en bas, je passais la porte, me dirigeant vers l’un des couloirs menant à l’infirmerie.
Le rez-de-chaussée, du moins, la partie où nous nous trouvions, était calme, sans le moindre signe de patrouille.
Plus nous approchions de l’infirmerie, plus les voix que l’on pouvait entendre au loin se rapprochaient et s’intensifiaient.
Alors que j’arrivais finalement dans la dernière ligne droite menant à l’infirmerie, je m'arrêtais nette, mon cœur se comprimant sur lui-même comme s’il cherchait à se faire le plus petit possible.
Le seul mouvement que j’eus pu faire, par un réflexe inconnu, était de tendre le bras au niveau des yeux de Jasmine.
Partout sur le sol, des traces de sangs encore frais, créant d’immenses traînées jusqu’au corps sans vie de leurs propriétaires.
Au milieu de ce carnage, plusieurs unités de True Human semblaient garder la position au niveau de la porte de l’infirmerie, fermée.