Chapitre 20 : La Montagne des Monstres

Le voyage jusqu’au quartier général du Cercle d’Éclipse avait été long, silencieux, presque irréel. Kaito, seul dans un hélicoptère blindé, observait le paysage défiler sous ses yeux. Après des heures de vol, le monde moderne semblait disparaître, laissant place à une nature sauvage, presque oubliée.

Puis, elle apparut.

La montagne d’Éclipse. Une masse rocheuse colossale, couverte de brume, perçant les nuages. Niché dans une vallée secrète, au flanc de cette montagne, se trouvait un complexe à l’architecture noire et acérée, comme taillée à même la roche. Invisible à l’œil nu, seuls ceux qui avaient été invités pouvaient y accéder.

L’appareil atterrit sur une plateforme dissimulée entre deux pics escarpés. Dès que la porte s’ouvrit, un souffle glacé frappa Kaito. L’air y était différent. Plus dense. Chargé d’énergie.

Un homme l’attendait à l’entrée. Vêtu d’un uniforme noir aux reflets métalliques, il avait les bras croisés et un sourire froid.

— « Bienvenue au Cercle d’Éclipse, Kaito. Ici, tu découvriras ce que signifie vraiment être un monstre. »

Kaito le suivit à l’intérieur. Le complexe était immense, plus vaste que tout ce qu’il avait imaginé. Des couloirs sombres, des salles d’entraînement suréquipées, des laboratoires... et surtout, des êtres comme lui, partout.

Dans une grande salle circulaire, une dizaine de personnes se tenaient là. Tous l’observaient en silence.

L’homme se tourna vers lui.

— « Voici ton équipe. Tous, sans exception, sont le fruit du Projet Anima. Tous ont survécu à l’implantation de gènes d’animaux… et ont été transformés. Mais chacun a évolué différemment. »

Kaito balaya la salle du regard. L’un d’eux, torse nu, la peau recouverte d’écailles noires, dégageait une aura reptilienne terrifiante. À ses côtés, une femme fine et élancée, à la chevelure blanche et aux yeux rouges, laissait planer une odeur de sang — elle avait les sens d’un fauve.

Un autre, aux cheveux hérissés et au sourire carnassier, portait des gants renforcés. Il semblait doté d’une force brutale, presque bestiale. Plus loin, un adolescent au visage neutre flottait dans les airs, son corps partiellement éthéré, mi-animal, mi-ombre.

Chaque membre avait sa propre transformation, sa propre malédiction. Mais tous semblaient accepter ce qu’ils étaient devenus.

— « Ici, Kaito, tu vas apprendre à libérer ton vrai potentiel. Tu n’es pas seul. »

Une femme d’âge mûr, visiblement respectée par les autres, s’avança. Sa voix était douce mais ferme.

— « On m’appelle Argenta. Je suis la responsable de l'entraînement. Tu vas passer les prochaines semaines avec nous. Nous allons évaluer ton niveau… et réveiller ta vraie nature. »

Kaito serra les poings. Il savait que son pouvoir n’était pas encore totalement contrôlé. Sa transformation de loup-garou blanc teinté de noir n'était qu’un début… une forme primitive. Mais au fond de lui, il sentait qu’il existait d’autres niveaux, d’autres métamorphoses, bien plus puissantes, bien plus dangereuses.

Il hocha la tête.

— « Je suis prêt. »

Argenta sourit.

— « Parfait. Car demain, tu te battras contre l’un d’entre eux. Pas pour te punir. Mais pour révéler ce que tu caches. »

Kaito accepta le défi sans hésiter. Il voulait tester ses limites… et peut-être aussi comprendre qui il était réellement.

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Plus tard dans la nuit.

Dans sa nouvelle chambre — sobre, creusée à même la roche, avec un lit métallique et un miroir fissuré — Kaito s’assit sur le sol. Il ferma les yeux, se concentrant sur sa respiration.

Il repensa à Saya et Reiji. À leur promesse de rester en contact. À la douleur qu’il lisait dans leurs yeux au moment de leur séparation. Mais il n’avait pas le choix. Il devait devenir plus fort, devenir un monstre s’il le fallait, pour les protéger.

Un bruit sourd le sortit de ses pensées. Quelqu’un toqua à sa porte. C’était l’adolescent à demi-ombre vu plus tôt.

— « Moi c’est Kuro. Demain, c’est moi qui t’affronte. »

Il tourna légèrement la tête, un sourire presque compatissant aux lèvres.

— « Je veux juste te prévenir : ici, on ne retient pas nos coups. Prépare-toi à voir ta vraie nature. »

Kaito répondit par un regard froid, déterminé.

— « J’attends que ça. »