Chapitre 4 – Larmes de roi et regards Croises

Le retour à l’Arbre-Monde fut solennel.

Les elfes, l'une après l'autre, furent guidées jusqu’à leurs familles, certaines directement dans des manoirs perchés dans les branches les plus hautes. Des cris de soulagement, des larmes, des accolades. C’était comme si le royaume entier avait recommencé à respirer.

Puis, Luca monta les dernières marches menant à la grande salle du trône, la princesse toujours sur le dos, somnolente mais éveillée. Devant les portes en cristal, deux gardes en armure végétale s’écartèrent sans un mot.

Dans la salle, un hurlement émotionnel fendit l’air.

MA FILLE !

Le roi Elarion Thaldir, souverain du royaume de Volkiata, se précipita. Le visage noble, d’ordinaire si calme, était inondé de larmes. Il prit la princesse dans ses bras avec une délicatesse infinie, posant sa main sur ses cheveux d’argent comme s’il voulait vérifier qu’elle était réelle.

Merci... merci... Par les Dieux... Je ne saurai jamais comment vous remercier...

Il tomba à genoux devant Luca et Seira, le torse encore secoué de sanglots.

— Vous avez rendu l’impossible. Je vous dois tout.

Seira s’inclina humblement, mais Luca resta droit, presque distrait, les yeux déjà fixés vers les balcons extérieurs. Il ne cherchait pas les remerciements. Il avait fait ce qu’il devait.

**

La princesse ouvrit les yeux, doucement.

— Papa…

— Je suis là, mon trésor, murmura Elarion, la voix tremblante.

Elle se tourna alors vers Luca, le fixant longuement.

— Tu es vraiment venu… comme dans les histoires…

Elle se redressa à peine, sa voix était douce, mais pas timide.

Je suis Lysaria. Tu m’as sauvée… toi. Je savais qu’un jour, quelqu’un franchirait les ombres pour venir me chercher. Et c’est tombé sur toi. Pas un prince. Toi. C’est encore mieux.

**

Lysaria avait quelque chose d’unique.

Pas la froideur distante de la noblesse elfique.

Elle riait d’un rien. Parfois en décalé.

Elle posait des questions bizarres :

"Tu penses que les feuilles rêvent pendant l’hiver ?"

"Tu préfères les fruits acides ou sucrés ?"

Et surtout, elle parlait à Luca comme si elle le connaissait depuis toujours.

— Tu sais… Tu ressembles au genre de héros que les bardes n’arrivent jamais à décrire correctement. Faut que je fasse attention, je pourrais bien tomber amoureuse, moi.

Luca haussa un sourcil, sans vraiment réagir. Il était ailleurs. Il observa un rayon de lumière filtrer à travers le plafond feuillu.

Puis il répondit, avec un demi-sourire :

— C’est pas moi, le héros. C’est Seira qui a battu le Logan.

Elle sourit plus fort encore.

— Tu le crois vraiment, ça ? Honnêtement ?

Elarion, lui, avait tout compris. Ce regard que sa fille portait, il ne l’avait jamais vu avant.

Mais il respecta. Il ne jugea pas.

**

Le roi se redressa finalement, essuyant ses yeux. Il déclara avec fierté :

— Vous êtes chez vous, ici, à Volkiata. Restez autant que vous le souhaitez. Les bois veilleront sur vous. C’est un ordre royal.

Seira répondit la première :

— Deux jours. Juste deux. Nos énergies… surtout notre sang rouge, sont trop bas. On va juste récupérer.

Le roi hocha la tête, reconnaissant.

Luca, toujours aussi détaché, murmura simplement :

— Deux jours. Ça ira.

**

Le soir tomba sur Volkiata, plus doux que les précédents.

Les vents étaient apaisés.

Et dans les hautes branches du palais, Lysaria regardait la lune, un sourire rêveur aux lèvres.

Luca, hein… ? Je me demande… ce que tu caches vraiment sous ce calme.

Fin du Chapitre 4.