Chapitre 13 — Réunion d’urgence : Aeloria en quarantaine

Le ciel était voilé, étouffé par une brume épaisse. Trois silhouettes avançaient prudemment à travers la forêt. Équipés de cuir léger et d’armes utilitaires, ils avaient l’allure typique des aventuriers de rang B.

Léo, un archer brun à la carrure fine, menait le groupe. Derrière lui marchaient Marla, une guerrière trapue au visage sévère, et Ronan, un mage aux yeux cernés, concentré sur la moindre fluctuation de Myuki autour d’eux.

Léo

— C’est étrange… Cette zone n’était pas là la semaine dernière.

Il désigna une étendue devant eux. Une dizaine de mètres plus loin, le sol changeait brutalement de teinte. L’herbe devenait terne, grise, et les arbres étaient couverts de moisissures sombres. L’air semblait… plus lourd.

Marla

— Une magie noire ? Une malédiction ?

Ronan

(s’agenouille, posant la main au sol)

— Non… Pas une malédiction. C’est vivant. C’est... infecté.

Léo

— Attendez moi ici. Je vais jeter un œil.

Il franchit la lisière de la zone sans hésitation. À peine quelques pas. Dix mètres… quinze.

Il s’arrêta soudain, chancelant. Un râle étranglé lui échappa. Il porta la main à sa gorge, tomba à genoux. Du sang jaillit de sa bouche.

Marla

— LÉO !

Elle se précipita, tirant un tissu de son sac pour couvrir sa bouche et son nez. Ronan fit de même, activant une barrière autour de lui. Ils traversèrent la frontière invisible, récupérèrent leur compagnon inconscient, et repartirent aussi vite qu’ils le purent, le cœur battant.

Quelques jours plus tard

La tranquillité du village fut brisée par un grésillement magique. Un haut-parleur monté sur la grande tour de guet crépita, puis une voix solennelle résonna dans les rues :

« À l’attention de tous les aventuriers de rang A ou plus. Vous êtes convoqués d’urgence à la guilde centrale de la capitale. Une nouvelle menace liée à la maladie Lacroma a été confirmée.

Présentez-vous immédiatement. Cette convocation est prioritaire. Fin de transmission. »

La voix s’éteint dans un bourdonnement sourd, laissant derrière elle un silence glacé. Les passants se regardent, inquiets. Certains aventuriers s'arrêtent net dans leur marche, le visage tendu.

Chibaki serre la mâchoire. Il se précipite à l’intérieur.

Intérieur, chez la guérisseuse —

Serah et Lyssaria sont assises près du feu. La healeuse trie des racines médicinales dans un silence concentré. Quand Chibaki entre brusquement, les trois femmes lèvent les yeux vers lui.

Chibaki

(haletant)

— Vous avez entendu l’annonce ?

Serah

— Oui… et quand il convoquent les rangs élevés c'est rarement bon signe . Si ils parlent de Lacroma c'est que ca devient vraiment grave.

Chibaki hoche la tête, grave.

Chibaki

— Ils sont surement tomber sur une autre zone corrompue . Et j’ai vu ce que même eux n’ont peut-être pas encore compris. La forêt corrompue, la biche... le Myuki souillé. Si je n’y vais pas… ils risquent de manquer des informations essentielles.

Lyssaria

(s’approche, inquiète)

— Mais… tu n’es pas rang A. Tu crois qu’ils t’écouteront ?

Chibaki

— Peu importe. J’y vais quand même.

Un silence. La healeuse se redresse lentement, posant une main sur son épaule.

Guérisseuse

— Alors va. Mais sois prêt. je vais tout te dire sur ce que j'ai pu apprendre en quelque jours sur la maladie et tu leur donnera ce papier, ca les aidera a mieux comprendre.

Chibaki hoche la tête, serre la main de Lyssaria brièvement, prend son manteau, puis quitte la pièce en silence, déterminé.

Devant la guilde, une foule d’aventuriers s’était rassemblée. Tous de rang A ou plus. Des armures brillantes, des capes lourdes, des armes affûtées, et des visages fermés. Le tumulte de leurs conversations murmurait la même inquiétude : Lacroma. Ce mot revenait, encore et encore, comme un poison dans l’air.

Chibaki s’approcha en silence, son manteau tiré sur les épaules. Il se fondit un instant dans la masse, observant. Il y avait une tension, une nervosité palpable. Même les vétérans échangeaient des regards lourds de sens.

Soudain, la porte de la guilde s’ouvrit brusquement. Le maître Valen sortit, accompagné de deux officiers. Son visage était grave, marqué par le manque de sommeil.

Valen

— Aventuriers de rang A et au-delà, merci d’avoir répondu à l’appel. L’étage supérieur est prêt à vous accueillir pour une réunion exceptionnelle. Faites preuve de calme et de discipline. Vous serez appelés par petits groupes.

Un mouvement se créa dans la foule. Certains aventuriers commencèrent à avancer, d’autres murmuraient entre eux.

Chibaki fit un pas en avant.

Chibaki

(hausse la voix)

— Maître Valen !

Valen s’arrêta net. Il tourna la tête, cherchant l’origine de l’appel. Quand son regard croisa celui de Chibaki, il cligna des yeux, surpris.

Valen

— Toi ? Chibaki ? Ce n’est pas le moment. Cette réunion ne concerne que les classes supérieures.

Chibaki s’avança encore de quelques pas, les poings serrés.

Chibaki

— C’est à propos de Lacroma.

Un silence. Quelques têtes se tournèrent vers lui. Le simple fait d’avoir dit ce mot à haute voix suffit à faire taire plusieurs discussions.

Valen le fixa un instant, sondant son regard.

Valen

(plus bas, sérieux)

— Tu sais quelque chose…?

Chibaki hocha la tête, sans un mot. Il sortit un petit rouleau de parchemin de son manteau, soigneusement scellé.

Chibaki

— Je viens de la forêt du sud. J’ai vu une zone contaminée… et ce que j’ai à dire pourrait changer votre compréhension de cette maladie.

Valen resta silencieux une seconde, puis fit un signe de tête à ses gardes.

Valen

— Laissez-le passer. Il vient avec moi.

Un grondement monta dans la foule. Un aventurier en armure lourde, aux cicatrices profondes, lança d’un ton irrité :

Aventurier

— Quoi ? C’est qui ce gamin ? Il est même pas rang B !

Valen se retourna brusquement, son regard tranchant.

Valen

— Je décide qui entre ou non. Si vous n’êtes pas contents, la porte est là.

Un silence immédiat tomba.

Chibaki entra dans la guilde aux côtés de Valen, le cœur battant, conscient que cette fois, sa voix allait compter.

INT. GRANDE SALLE DE LA GUILDE – QUELQUES INSTANTS PLUS TARD

Une grande salle baignée par la lumière du jour, remplie de murmures nerveux. Les aventuriers de rang A et plus sont installés autour d'une table massive. Le silence s’impose lorsque le maître de guilde, Valen, entre, suivi de Chibaki, qui reste légèrement en retrait, adossé à un mur.

Valen

(ton grave)

— Merci à tous d’être venus aussi vite. La situation est préoccupante. Il y a quelques jours, une zone auparavant sans danger est soudainement devenue inhabitable. Trois aventuriers de rang B y sont entrés. L’un est toujours dans le coma, les deux autres sont instables. Les symptômes sont similaires à ceux d’un fléau oublié : Lacroma.

Un frisson traverse l’assemblée. Valen poursuit.

Valen

— Les premières analyses indiquent que la maladie ne se transmet plus uniquement par les plaies. Elle est plus rapide. Plus subtile. Et... potentiellement plus intelligente.

Les murmures s’intensifient. Valen désigne Chibaki.

Valen

— Ce jeune aventurier a rencontré une première zone corrompue dans la forêt, il y a plusieurs jours. Il n’est pas rang A, mais ses observations peuvent être précieuses.

Chibaki s’avance, puis tend une feuille à Valen.

Chibaki

— Une guérisseuse que j’ai rencontrée a noté l’évolution des symptômes. Taches noires sur le corps, déshydratation sévère, douleurs chroniques… et parfois des cauchemars récurrents avant la perte de conscience.

Il marque une pause, observant les visages tendus autour de lui.

Chibaki

— Dans cette forêt, j’ai vu une biche. Vivante, mais… pas normale. Ses yeux étaient vides, son corps malade. Elle m’a regardé, puis elle est partie. Mais ce n’était pas un simple animal malade. Elle était... altérée. Comme si elle était consciente de ma présence.

Un silence tendu.

Chibaki

— Ce Myuki, cette maladie... elle n’est plus naturelle. Elle agit avec une intention. Comme si elle choisissait sa manière de se propager en fonction de l’environnement.

Valen

(sérieux)

— Et ce que tu dis semble se confirmer.

Une assistante entre, haletante, et lui tend une missive urgente. Il la lit rapidement, son visage se fige.

Valen

— Une autre ville vient d’envoyer un rapport : Zarnen. À l’opposé de Luwel. Eux aussi sont touchés par Lacroma… mais sous une autre forme.

Des regards se croisent, alarmés.

Valen

— Là-bas, la maladie se propage par l’air stagnant dans les quartiers humides… ou via certaines sources d’eau. Plus discrète, mais tout aussi mortelle. Les symptômes restent similaires… mais la méthode d’infection est différente.

Chibaki

(à mi-voix)

— Elle s’adapte…

Valen

— Pour l’instant, ils n’ont aucune solution. J’ai reçu, grâce à Chibaki, une ébauche d’un remède préventif expérimental, conçu par une guérisseuse . c'est écrit sur la lettre qu'Il n’a pas encore été testé en profondeur, c'est aussi ecrit que le remède ne fonctionne pas encore sur tout le monde et qu'elle a besoin de temps, elle nous livrera la version finale. Peut-être qu’il fonctionnera aussi là-bas… mais nous ne pouvons pas l’affirmer.

Un aventurier se penche en avant, inquiet.

Aventurier

— Et combien en avons-nous ?

Valen

(amer)

— Trop peu. À peine quelques doses. Et, je pense que les nobles vont tenter d'en avoir l'exclusivité en payant de grosses sommes

Un silence lourd s’abat dans la salle.

Valen

— Nous ne sommes qu’au début. Cette chose n’a pas fini de muter. Restez prêts, surveillez vos équipes, et signalez la moindre anomalie. Ce n’est plus une simple épidémie. C’est une guerre invisible.

Chibaki quitta la salle de réunion, l’esprit encore chargé des discussions lourdes. Le murmure des aventuriers s’estompait derrière lui tandis qu’il s’engageait dans les rues étroites de la ville.

Son pas était lourd, mais déterminé. Il pensa à Lyssaria, à la guérisseuse, à tout ce qui se jouait autour de cette mystérieuse maladie.

Il voulait la revoir, s’assurer que son amie allait bien, qu’elle tenait le coup dans ce monde qui semblait s’assombrir un peu plus chaque jour.

Le vent frais caressa son visage alors qu’il s’éloignait de la guilde, emportant avec lui une promesse muette : trouver une solution, coûte que coûte.