Le chemin du retour (1)

C’est un plafond inconnu.

Oh, comme c’est original de dire ça.

Je n’aurais jamais cru dire une telle chose un jour.

J’ai mal à la tête.

Ma tête tourne et j’ai la nausée.

Mon abdomen, surtout, me fait atrocement mal.

J’ai réussi à peine à m’asseoir après bien des efforts.

…Où suis-je ?

…Je suis sûr de m’être évanoui dans la salle du coffre secret.

La capacité d’absorption démoniaque s’était activée sans mon accord et avait absorbé tout ce qu’il y avait dans la perle que le serpent m’avait donnée.

Il semble que ce que j’avais absorbé dépassait de loin ce que je pouvais contenir, ce qui m’a fait perdre connaissance.

En repensant à tout ça, un sentiment d’inquiétude m’envahit, et je mobilisai mon Qi.

Pour que cela m’ait fait perdre connaissance, il était évident que la quantité de Qi absorbée n’était pas négligeable.

Ce serait problématique si mon corps avait subi des dommages irréversibles à cause de ça.

– Swoosh !

Je mobilisai mon Qi, et les résultats me laissèrent stupéfait.

« Qu’est-ce que… »

J’étais choqué par la chaleur que je venais de générer.

C’était bien plus rapide et brûlant que ce à quoi j’étais habitué.

Je pouvais jurer avoir utilisé la même quantité de Qi que d’habitude, mais ce que j’avais produit dépassait toutes mes attentes.

Troisième royaume.

Mon art martial de flamme destructrice, qui était resté bloqué au deuxième royaume pendant si longtemps, venait de bondir jusqu’au troisième.

Non, d’après ce que je ressentais, il avait même atteint le sommet du troisième royaume.

Le Qi que j’avais absorbé de cette perle équivalait à ce qu’on pourrait obtenir après trente années d’entraînement assidu.

Je ne m’attendais vraiment pas à autant…

En repensant au Qi que j’avais absorbé, honnêtement, je n’avais pas l’impression qu’il était si abondant.

En revanche, je pouvais affirmer une chose : il était d’une pureté exceptionnelle.

Existe-t-il encore des Qi aussi subtils et puissants que celui-ci ?

En tenant compte du fait qu’après en avoir absorbé autant, je ne ressentais aucun Qi démoniaque en moi, je devais reconsidérer mes hypothèses…

Peut-être que ce n’était pas une pierre démoniaque après tout ?

J’avais pensé qu’il y avait une possibilité que mon feu ait une nouvelle fois absorbé du Qi démoniaque, mais cette fois, c’était différent.

Le Qi que je possédais désormais était terriblement puissant.

La seule raison pour laquelle je n’avais pas directement atteint le quatrième royaume était les limites de mon corps actuel ; je sentais que si je renforçais correctement mon physique, je l’atteindrais en un rien de temps.

En pensant à cela, je commençai à réfléchir aux adversaires que je pourrais désormais affronter avec mon nouveau niveau de puissance.

Ce bâtard de Namgung serait peut-être encore trop fort, mais quelqu’un comme Gu Jeolyub, je pourrais m’en débarrasser sans problème.

Pour être honnête, je pensais pouvoir affronter des gens du niveau de Gu Jeolyub ou plus sans utiliser mon Qi.

Mais le Dragon Foudroyant restait un cran au-dessus.

Même si j’étais familier avec l’art de l’épée du Clan Namgung, dans un vrai combat impliquant le Qi, je n’aurais probablement toujours aucune chance contre lui.

Mais sérieusement… où suis-je ?

Je regardai autour de moi après avoir fini d’évaluer mon corps.

Il y avait des meubles délabrés, et une odeur de médecine flottait dans l’air.

« Jeune Maître ! »

« Woah ! »

Alors que je regardais autour de moi, encore confus, quelque chose surgit et me sauta dessus.

C’était Wi Seol-Ah.

« Jeune Maître, tu vas bien maintenant ? »

« …D’abord, descends de moi. »

Quel genre de personne saute sur un malade en lui demandant s’il va bien ?

Je me dégageai rapidement de Wi Seol-Ah.

J’étais quand même reconnaissant qu’elle n’ait pas l’air blessée, au vu de l’énergie qu’elle dégageait encore.

Je posai alors la question suivante, qui me brûlait les lèvres.

« Où est le serpent ? Et que s’est-il passé dans la salle du coffre secret ? »

« Le serpent ? »

Wi Seol-Ah me regarda, visiblement perdue.

Hein ? C’est quoi cette réaction ?

Je lui reposai la question, un étrange frisson courant dans mon dos.

« Le serpent géant qu’on a vu dans le coffre secret. »

« Hmm… ? »

« …Tu t’en souviens pas ? »

« Nan ! »

« Alors, jusqu’où remontent tes souvenirs ? »

Je reformulai ma question.

Wi Seol-Ah roula des yeux avant de répondre.

C’était facile à remarquer, avec ses grands yeux.

« Jusqu’au moment où j’ai commencé à te suivre ! »

« …Hein ? »

Donc elle a tout oublié… ?

Peut-être que le coffre secret et le serpent n’étaient qu’une hallucination ?

Impossible…

Cela n’expliquerait pas le Qi que je possédais maintenant, ni la hausse générale de mon art martial.

Alors… le serpent aurait-il effacé la mémoire de Wi Seol-Ah ?

Mais… pourquoi ?

Je ne comprenais pas.

« Tu ne te souviens vraiment de rien ? »

« Non… Quand je me suis réveillée, je dormais avec le Jeune Maître en pleine montagne ! »

« Qu’est-ce que… »

– Creak.

Quelqu’un entra après avoir ouvert la porte voisine.

C’était un vieil homme ; ses cheveux étaient blancs, et son dos semblait courbé de façon notable.

« Pourquoi il fait si chaud ici ? »

Le vieil homme semblait agacé. La chaleur venait sans doute de mes tests de Qi…

Il nous adressa ensuite la parole.

« Alors tu t’es enfin réveillé. »

« …Et vous êtes ? »

« Tu t’es réveillé après avoir dormi pendant deux jours entiers. »

…Hein ? Deux jours ?

« Vous dites que j’ai dormi deux jours ? »

Dormir aussi longtemps signifiait que j’avais épuisé tout le temps dont je disposais pour explorer le coffre secret.

« Oui, tu ne semblais pas blessé, mais tu ne te réveillais pas, alors j’ai cru que tu étais mort. »

« …Puis-je vous demander où je suis en ce moment ? »

« Tu n’as toujours pas deviné ? Je suis médecin, donc ici, c’est évidemment une salle de soins. »

…Comment suis-je censé deviner que vous êtes médecin ?

Il portait des vêtements usés et semblait bossu.

Je suppose que l’odeur médicinale dans la pièce pouvait être un indice… ?

« Tu te sens mieux maintenant ? »

Demanda le vieil homme.

« Oui… Je me sens mieux. »

Le vieil homme expliqua que cette salle de soins était située au pied des montagnes. Alors comment suis-je arrivé ici ?

Wi Seol-Ah avait dit que quand elle s’était réveillée, on était en pleine montagne, et non dans la salle du coffre secret.

Donc… le vieil homme nous a trouvés et portés jusqu’ici ?

Le vieil homme demanda calmement tout en préparant des remèdes :

« Qu’est-ce qui t’a pris de dormir au bord d’une falaise ? »

Une falaise, hein…

J’aurais juré que cette falaise s’était transformée en plaine avec l’érable blanc.

Donc elle est redevenue une falaise ?

Je n’arrivais pas à assembler mes pensées, alors je décidai d’abord de remercier le vieil homme.

« …Merci, Monsieur. Je suppose que c’est vous qui nous avez sauvés ? »

« Te sauver, mon cul. Remercie plutôt la fille à côté de toi. Elle a un si joli visage, mais la force d’un bœuf. C’est elle qui t’a porté jusque-là. »

Quand je regardai Wi Seol-Ah après ces mots, elle se tenait fièrement.

Elle m’avait porté depuis le sommet de la montagne ?

« M-Merci. »

« Pas de soucis ! »

Ses os étaient vraiment spéciaux, puisqu’elle m’avait suivi depuis le Clan Tang jusqu’ici.

Je me moquais toujours de sa rondeur, mais en réalité, elle était plutôt fine.

Elle avait juste toujours quelque chose dans la bouche, ce qui la faisait paraître plus ronde.

Mais comment pouvait-elle être si forte avec des bras aussi frêles… ?

Le vieil homme m’observa, toucha mon bras, puis déclara :

« Puisque tu sembles aller bien, je préférerais que tu partes. La pièce est petite, je ne peux pas vous garder ici plus longtemps. »

« …Oh, bien sûr. Merci, Monsieur. Grâce à vous, j’ai pu me réveiller sain et sauf. »

« Haha, un jeune homme aussi poli, ça ne court pas les rues. »

Ce n’était pas rien de recueillir un inconnu et de le laisser dormir deux jours dans sa chambre, même s’il semblait jeune.

Wi Seol-Ah mâchait une chose inconnue, que je supposai être donnée par le vieil homme.

« …Qu’est-ce que tu manges ? »

« Hmm ? Grand-père Cheon me l’a donné comme collation ! »

Grand-père Cheon ?

Donc Wi Seol-Ah et le vieil homme s’étaient présentés.

Le vieil homme ajouta :

« C’est rien. Je lui ai juste donné un peu de ginseng que je jugeais inefficace. Je n’avais rien d’autre, c’est une salle médicale après tout. »

…Du ginseng ? Il existe du ginseng inefficace ?

C’était déjà étonnant, mais le fait que Wi Seol-Ah mâche cette chose amère comme si de rien n’était l’était encore plus.

Je pensais qu’elle n’aimait que le sucré, mais en fait, elle aimait tout.

« Je m’excuse… »

« C’est rien, alors dégagez maintenant. Vos parents doivent être morts d’inquiétude. »

Parents ? Inquiets ?

Je pensai à mon père.

Il y avait peu de chances qu’il se fasse du souci pour moi.

Ironiquement, ce serait probablement Muyeon qui s’inquiéterait le plus.

Je fouillai mes poches et dis au vieil homme :

« Je n’ai pas grand-chose, je suis parti précipitamment… »

« Hein ? »

« Quel genre d’enfant a de l’argent ? T’inquiète pas, j’ai fait ça parce que je m’ennuyais— »

En fouillant mes poches, je trouvai quelques pièces d’argent.

Heureusement, j’avais au moins ça.

– Clink-clank !

En voulant les sortir, les pièces tombèrent au sol. Le vieil homme, en les voyant, resta bouche bée.

Deux pièces d’argent.

« Je n’ai pas grand-chose, je ne peux pas offrir beaucoup— »

Le vieil homme m’interrompit et me saisit la main.

Son expression devint soudain sérieuse.

Qu’allait-il dire… ?

Après un silence pesant entre nous deux, le vieil homme parla enfin :

« Mon Seigneur, si vous le souhaitez, vous pouvez rester ici plus longtemps. Oh, quelle impolitesse de ne même pas avoir offert du thé à des invités si précieux ! Attendez ici, ce vieil homme est un maître dans l’art du thé ! »

« … »

Heureusement, les pièces semblaient lui avoir plu.

__________

Je quittai la pièce après avoir décliné le thé que le vieil homme essayait presque de me forcer à boire.

Il n’arrêtait pas de vouloir me donner des choses, alors je partis rapidement.

Heureusement, il était encore tôt le matin, un bon moment pour partir.

Mon corps me semblait plus léger grâce à l’augmentation de mon Qi.

Si j’utilise mon Qi actuel pour courir jusqu’à la ville où j’ai laissé la lettre, est-ce que je pourrai y arriver directement ?

« …Peut-être que c’est trop ? »

Ce serait probablement possible si je faisais des pauses entre-temps, mais comme je devais aussi prendre en compte Wi Seol-Ah qui me suivrait, je me retins.

Attends, non, peut-être que Wi Seol-Ah peut aussi me suivre ?

J’avais pensé que puisque Wi Seol-Ah avait réussi à me suivre quand j’avais quitté le Clan Tang, elle pourrait suivre mon nouveau rythme. Mais je me rappelai alors qu’elle ne possédait aucun Qi, donc ce serait probablement impossible.

Maintenant que je pensais à elle, je vérifiai à nouveau si elle possédait du Qi dans son corps.

Le résultat était le même.

Elle n’avait aucune forme de Qi en elle.

Mais alors comment ?

Comme elle avait tout oublié, je ne savais même pas ce qui s’était passé après que j’aie perdu connaissance.

Je ne pouvais pas dire ce qu’était exactement ce serpent, ni comment la plaine s’était à nouveau transformée en falaise, ni ce qu’était cette étrange magie spatiale, ni…

Je m’arrêtai net en me rappelant une chose importante.

« …Hé. »

« Oui ? »

« L- les- les perles ! »

« Hein… ? »

Je tremblais.

Toutes ces perles de clair de lune… Je n’en avais même pas récupéré une seule.

En me rappelant les perles, j’eus envie de tomber à genoux et de frapper le sol.

« …Attends, non, peut-être qu’elles n’existaient même pas à la base… De toute façon, la salle secrète a disparu… »

J’essayais de penser positivement, mais…

Et la perle que j’avais eue du serpent… ?

« … »

« Jeune Maître ? »

« …Ça va, j’ai juste un peu la tête qui tourne. »

Elle ne m’appartenait même pas à la base… c’est ce que j’aurais dû penser, mais c’était difficile de raisonner ainsi à cause de ma cupidité humaine naturelle…

Wi Seol-Ah sourit en voyant mon visage.

« Jeune Maître, vous avez vraiment une tête affreuse en ce moment. »

« Comment peux-tu être aussi cruelle d’un coup !? »

« Mais vous avez vraiment l’air moche… »

Comment peut-elle être aussi cruelle envers quelqu’un qui vient de traverser tout ça…

Wi Seol-Ah était, parfois, méchamment inattendue.

Puis, Wi Seol-Ah attrapa le bord de mes vêtements.

Je me demandai ce qu’il se passait et remarquai qu’elle pointait du doigt un restaurant que nous venions de dépasser.

Je lui demandai alors :

« T’as faim ? »

« …J’ai faim, mais manger des raviolis va aussi réparer le visage du Jeune Maître ! »

« Oh, tu veux que je mange… ? »

Alors que c’est toi qui as vraiment faim…

Je n’étais pas contre l’idée de m’arrêter pour manger, mais je n’avais pas beaucoup de temps.

Je sentais qu’il serait plus sage d’arriver d’abord à destination.

Qu’est-ce que je fais, est-ce que je cours vraiment jusque-là ?

J’avais l’impression que mon corps en était capable maintenant.

Je réfléchissais en regardant Wi Seol-Ah qui tenait mes vêtements.

« …Je pense qu’on devrait commencer à courir maintenant, mais qu’est-ce que je fais de toi ? »

« Hein… ? Oooh, oooh ! Je suis super forte pour couri— »

« Peut-être que je devrais juste te porter ? »

« …Hein ? »

« Qu’est-ce que tu viens de dire ? »

Je crus l’avoir entendue dire quelque chose.

J’allais lui redemander, mais elle s’assit soudainement par terre.

Comme elle s’était assise d’un coup tout en tenant mes vêtements, j’en fus déséquilibré.

« A-aïe, aïe ! »

Puis elle poussa un cri maladroit.

« Qu- qu’est-ce qu’il s’est passé ? »

« M-mes jambes ! Ça fait mal ! Je crois que je suis blessée ! »

« Quoi… ? C’est grave alors. On retourne à l’infirmerie ? »

« On est pressés ! J-je ne pense pas être si blessée que ça. »

« Donc tu peux marcher ? »

« …Zut. »

« Hmm ? »

Qu’est-ce qu’elle veut ?

C’était la première fois que je voyais Wi Seol-Ah aussi tiraillée dans ses pensées.

Après une longue hésitation, elle parla enfin d’une petite voix.

« Por-porte-moi… »

Après avoir dit ça, ses oreilles devinrent légèrement rouges.

Je fus choqué par ce que je venais de voir.

…Donc elle peut ressentir de la gêne, hein ?

Je croyais qu’elle ne pouvait pas ressentir la moindre honte…

« Haha ! »

Je laissai échapper un rire, et Wi Seol-Ah fit la moue en réaction.

Je baissai lentement mon corps et lui tournai le dos.

Wi Seol-Ah entoura doucement mon cou avec ses bras et se mit à l’aise.

En sentant sa chaleur contre mon dos, je me relevai.

Je ressentis soudain une envie de taquiner, alors je la narguai :

« T’es lourde. »

Wi Seol-Ah cria de surprise.

« Je ne le suis pas ! »

« Si… on dirait que je porte un rocher. »

« Vous êtes tellement cruel… ! L-laissez-moi descendre ! »

« Non, trop tard. »

…C’était quand, déjà ?

J’avais l’impression que quelque chose comme ça s’était déjà produit.

Mais ce n’était pas dans la même ambiance joyeuse qu’on vivait en ce moment, pas que Wi Seol-Ah s’en souvienne de toute façon.

J’étais le seul à me souvenir de ce qui s’était passé à ce moment-là.

Et je serai aussi le seul à m’en souvenir à l’avenir.

De toute façon, ce ne serait pas une bonne chose si cela devait se reproduire.

J’utilisai mon Qi pour me lancer dans une course en portant Wi Seol-Ah.

Je fus choqué un instant par la vitesse et la hauteur de mon saut.

Je pensai que Wi Seol-Ah s’amuserait avec le vent qui la frappait, mais à la place, elle enfouit son visage dans mon dos.

Je pensai qu’en courant à ce rythme, j’arriverais à destination sans aucun problème.