Chapitre 57 : Au Cœur de la Verdoyance

Arcanis, debout sur un rocher flottant entouré d'une brume sombre, fixait le chaos qui se déployait au loin. Les débris suspendus dans l'air semblaient graviter autour de lui, comme pour refléter l'agitation de ses pensées. Ses yeux d'un vert incandescent trahissaient une rare lueur d'incertitude, une émotion qu'il ne laissait jamais transparaître devant ses ennemis.

Dans son esprit, les pièces du puzzle se bousculaient.

"Mes deux atouts, Lumiel et Kael'Ryn, sont désormais inutiles. Si Kenza et Centurion les ont convaincus, ils doivent déjà se préparer à me trahir. Lumiel peut manipuler le passé, et Kael'Ryn scruter le futur, mais leurs pouvoirs sont limités tant qu'ils n'ont pas atteint leur pleine puissance. Leur alliance temporaire avec ces vermines pourrait ruiner mes plans."

Arcanis croisa les bras, ses doigts tapotant lentement contre son sceptre endommagé.

"La vraie menace, c'est Dedem. Cet équilibre... cette maudite capacité peut inverser les règles mêmes de l'existence. Peu importe que je sois immortel et que la réalité elle-même ne puisse m'effacer : l'équilibre peut tout reconfigurer."

Un rictus se dessina sur ses lèvres.

"Je pourrais affronter Dedem maintenant. Après tout, je reste Arcanis l'Éternel. Mais l'union de Dedem et Centurion... Voilà une combinaison que même ma puissance ne peut ignorer."

Alors qu'il s'enlisait dans ses pensées, une idée traversa son esprit comme un éclair. Il posa son regard sur l'horizon, là où il savait que Momo se trouvait.

"L'œil mystique..." pensa-t-il, un sourire en coin.

"Cet artefact est bien plus qu'un simple jouet dimensionnel. Il me permettrait de transcender ces barrières. Avec lui, ni Centurion, ni Dedem, ni même cette barrière d'isolement ne pourraient me retenir. Si je l'obtiens, aucun sanctuaire, aucune réalité, ne pourrait me contenir."

Son sourire s'élargit, mais il s'effaça rapidement alors qu'une autre pensée le frappa.

"Mais s'approcher de Momo dans son état actuel est suicidaire. Sa forme de Nexus, combinée à son pouvoir, fait de lui un obstacle imprévisible. Et si Dedem intervient... Les choses pourraient mal tourner."

Arcanis ferma les yeux, respirant profondément.

"Je dois aussi considérer la barrière d'isolement. Si je la brise maintenant pour m'échapper ou attaquer directement, je risque de réveiller Kahi, la prêtresse de Fer. Cette vieille légende..."

Un frisson imperceptible parcourut son échine.

"Si Kahi s'éveille, les Golems Ancestraux suivront. Ce serait ma perte. Même avec tout mon génie, je ne pourrais pas lutter contre un sceau aussi ancien et puissant."

Il ouvrit les yeux, l'air résolu.

"Non, briser la barrière serait une erreur fatale. Mon seul choix est de me concentrer sur l'œil mystique. Mais pour cela, je dois m'assurer que Dedem soit distrait. Peut-être... Peut-être que je peux semer le doute en lui, encore une fois."

Arcanis fit un rapide inventaire mental de ses capacités restantes. Il leva une main, et des éclats d'énergie sombre et familière dansèrent au bout de ses doigts. Mais quelque chose n'allait pas. Les éclats tremblaient légèrement, comme une flamme vacillante.

"La magie que j'ai perdue face à Thalion m'a coûté cher. Je ne peux pas voyager dans d'autres dimensions. Pas encore. Et ma magie principale est trop fragmentée pour rivaliser directement avec leur union."

Il serra les poings, une colère froide montant en lui.

"Thalion... même dans la mort, tu continues de me gêner. J'ai besoin de temps. Du temps pour me régénérer, pour recréer ma magie perdue."

Arcanis se redressa, son expression redevenant calme et calculatrice.

"Voler l'œil mystique est risqué, mais c'est mon meilleur espoir. Une fois que je l'aurai, je pourrai non seulement échapper à cette barrière, mais aussi contrecarrer Dedem et Centurion, quelle que soit leur alliance. Mais pour cela, je dois les distraire. Les manipuler."

Un sourire narquois étira ses lèvres.

"Si Dedem est maintenant l'Élu de l'Équilibre, je dois faire en sorte qu'il perde cet équilibre. S'il s'effondre à nouveau dans le chaos, il deviendra mon outil le plus destructeur."

Arcanis, debout sur son rocher flottant, balaya les environs du regard. Il tendit la main, invoquant un portail d'ombre vers un point plus sûr, là où il pourrait observer les événements tout en préparant son prochain mouvement.

"Momo, Dedem, Centurion... Continuez à jouer vos rôles. Moi, je suis le metteur en scène de ce chaos, et bientôt, vous danserez tous à nouveau sous ma direction. L'œil mystique sera mien, et avec lui, le monde entier."

Il laissa échapper un rire sombre avant de disparaître dans la nuit, prêt à orchestrer son prochain coup.

L'air trembla dans un silence oppressant. Une distorsion soudaine déchira l'espace, et avant que quiconque ne puisse réagir, une explosion d'énergie pure projeta une onde de choc à travers le champ de bataille.

Une silhouette fondit à une vitesse incommensurable, brisant les lois de la physique. En un battement de cils, Arcanis était sur Momo.

Momo, encore sous le contrecoup de sa connexion à l'esprit de Dedem, n'eut même pas le temps de percevoir l'attaque.

Un hurlement déchira l'air. Un bruit atroce, celui de chair et d'os se tordant sous une force inhumaine.

Momo fut projeté en arrière, une douleur insupportable traversant son abdomen. Il vacilla, les yeux écarquillés, avant de s'effondrer à genoux.

Son souffle saccadé souleva une poussière dorée. Il regarda avec horreur la plaie béante à son ventre.

L'Œil Mystique avait disparu.

Lyria ressentit un frisson glacial lui parcourir l'échine.

Elle n'avait rien vu.

« Non... » souffla-t-elle, stupéfaite.

Son regard se tourna instantanément vers Arcanis, qui tenait l'Œil Mystique dans sa main, triomphant.

Célestion, les ailes battant avec fureur, rugit. « Enfoiré... ! » Sa voix résonna comme un coup de tonnerre. « T'avais encore un foutu coup en réserve ?! »

L'atmosphère s'alourdit. Une tension indescriptible s'installa, comme si tout le monde venait de comprendre l'ampleur de la catastrophe.

Mais au milieu de ce tumulte, Dedem ne bougea pas.

Son regard restait immobile, fixé sur Arcanis. Il ne montrait ni panique, ni surprise.

Juste... une sérénité absolue.

Arcanis, quant à lui, souriait d'un air carnassier

Arcanis, quant à lui, souriait d'un air carnassier. Il leva lentement l'Œil Mystique au-dessus de lui, l'énergie de l'artefact pulsant entre ses doigts.

« Enfin... » murmura-t-il, un éclat d'avidité traversant ses yeux. « Plus rien ni personne ne pourra m'arrêter désormais. »

Il raffermit sa prise sur l'artefact, prêt à l'absorber.

Mais alors... son sourire disparut.

L'Œil Mystique commença à trembler violemment entre ses mains.

Arcanis fronça les sourcils. Une onde d'énergie se propagea depuis l'artefact, vibrant dans l'air comme un cri muet.

Puis, dans un éclair aveuglant, l'Œil Mystique s'arracha de ses doigts.

« QUOI... ?! » Arcanis recula instinctivement, les pupilles contractées par l'incompréhension.

L'Œil flotta un instant dans les airs, puis se mit à descendre lentement... vers Dedem.

Dedem leva lentement les yeux. L'artefact plana devant lui, vibrant d'une énergie contenue. Son éclat se mêlait à l'aura de Dedem, résonnant avec lui.

Puis, une nouvelle onde mystique éclata.

Deux autres Œils Mystiques apparurent au-dessus de Dedem.

Celui de Robert.

Celui de Novemcaudus.

Ils brillèrent d'une lueur irréelle, leurs formes se superposant dans un tourbillon d'énergie instable.

Arcanis observa la scène, incrédule. Il pouvait sentir la connexion entre ces artefacts. Ils n'étaient pas simplement des outils de pouvoir. Ils étaient liés par une résonance cosmique.

Dedem posa enfin son regard sur Arcanis.

Ses yeux verts perçaient l'ombre, lumineux et intangibles.

« Tu ne peux pas contrôler ces artefacts aussi facilement. » déclara-t-il d'une voix calme, mais lourde d'une vérité implacable.

« Ils sont en lien les uns avec les autres. Et cette connexion... te dépasse. »

Arcanis serra les dents. Il ne comprenait pas totalement ce qui se passait, mais une chose était claire : il n'avait plus le contrôle.

Il fit un pas en arrière.

Il devait fuir.

Mais Dedem le savait déjà.

« Tu es bien trop dangereux. » poursuivit-il, avançant d'un pas lent. « Je ne peux pas te laisser partir. »

Arcanis sourit, mais son regard trahissait une tension croissante.

« Et que comptes-tu faire ? Me tuer ? » souffla-t-il avec amusement. « Tu sais que c'est impossible. »

Dedem ne répondit pas immédiatement. Il observa Arcanis avec une intensité glaciale, ses pensées tournant à toute vitesse.

Il savait qu'Arcanis ne pouvait pas mourir.

Mais...

Il pouvait être scellé.

Un éclat déterminé passa dans les yeux de Dedem.

Il savait exactement quoi faire.

L'air vibra.

En une fraction de seconde, Dedem disparut.

Une téléportation.

Arcanis ne vit rien venir.

Un impact terrifiant le projeta en arrière. Il sentit quelque chose s'abattre sur lui avec la force d'une étoile en chute libre.

Dedem était devant lui.

Sa main agrippait la nuque d'Arcanis, le maintenant en place avec une force inhumaine.

Un frisson de panique traversa le sorcier.

« QUOI... ?! »

Un froid absolu se répandit.

Dedem leva son autre main.

Et dévoila la Glace Éternelle.

Une tornade de givre éclata autour d'eux, déchirant l'atmosphère.

Arcanis tenta d'invoquer une barrière, mais rien ne se forma. Son pouvoir était trop instable après son combat avec Thalion. Il avait sous-estimé Dedem.

Un sourire amer lui échappa. « Hah... »

Il allait être scellé.

La glace remonta sur son corps, englobant ses bras, son torse, ses jambes.

Lentement, inexorablement.

« Impressionnant... » murmura-t-il, son regard se figer dans une fascination morbide.

La glace atteignit son cou.

Puis son visage.

Un dernier rictus figé.

Et enfin, un silence absolu.

Arcanis était figé dans la Glace Éternelle.

Le vent cessa de souffler.

Le champ de bataille devint étrangement paisible.

Dedem recula lentement, observant l'immobilité parfaite du sorcier.

Mais alors...

Une goutte.

Une seule.

Une goutte de sang violette.

Elle perla sous la glace. Lente, silencieuse.

Elle coula...

Puis disparut dans le sol.

Personne ne la vit.

Personne... sauf l'ombre qui s'étendait doucement sous le corps gelé.

Dedem ne quitta pas Arcanis des yeux.

Son instinct lui hurlait que quelque chose n'allait pas.

Mais pour l'instant, il avait gagné.

Du moins...

C'est ce qu'il croyait.

Le vent caressait doucement les ruines fumantes du champ de bataille alors que Dedem avançait vers les Draco-Chevaliers. Galahad et Zoryn se tenaient là, leur souffle irrégulier, leur corps encore secoué par l'essence draconique instable qui les rongeait. Leurs yeux, illuminés par la rage et la puissance brute, fixaient un point invisible dans l'horizon, leur transformation inachevée tremblant encore dans l'air.

Dedem les observa un instant, sans un mot. Puis, sans prévenir, il disparut dans un éclat vert et réapparut face à eux, posant une main sur leur front respectif. Un souffle d'énergie verte traversa leurs corps, et instantanément, la pression dans l'air s'effondra. Leurs muscles tendus se relâchèrent, leurs pupilles reprirent une teinte plus humaine. L'énergie en eux s'équilibrait à un rythme naturel, et la fureur aveugle dans leurs regards se dissipa peu à peu.

Zoryn tomba en arrière, une main plaquée contre son crâne. « Qu'est-ce que... ? » Il haletait, tentant de comprendre ce qu'il venait de ressentir. Il jeta un regard à ses mains, puis à son armure, sentant un changement profond. Galahad, lui, s'agenouilla, serrant les poings avant de frapper violemment le sol. « Ce foutu Arcanis... il nous a utilisés. » Sa voix était lourde de colère contenue. Il se redressa, fusillant Dedem du regard. « Il est où ?! Je vais lui arracher la gorge ! »

Dedem leva calmement une main. « Il est scellé. »

Le silence tomba brutalement. Galahad détourna le regard, inspirant profondément. « Tch... Quelle humiliation. » Il se redressa lentement, ajustant son armure comme si ce simple geste pouvait masquer la honte de s'être fait manipuler. Zoryn, bras croisés, secoua la tête avec un sourire en coin. « On dirait bien que la chasse a pris une tournure inattendue. »

Dedem ne répondit pas. Il savait que la discussion n'avait plus d'importance. Il se détourna d'eux et marcha vers Kenza et Centurion.

Centurion, affaibli mais toujours debout, observa Dedem avec un soupir. Son armure se fissura lentement avant de revenir à sa forme originelle. Il paraissait fatigué, mais il tenait encore fermement son glaive. Kenza, elle, n'attendit pas et se précipita vers Dedem, l'enlaçant sans retenue.

« Dedem ! » Sa voix tremblait. Il était là. Il était vivant.

Elle serra son frère contre elle, comme si elle craignait qu'il ne disparaisse à nouveau. « Je suis tellement contente... » murmura-t-elle, fermant les yeux un instant pour savourer ce soulagement. Mais elle sentit alors quelque chose. Dedem ne réagissait pas. Son étreinte restait rigide, distante.

Elle recula légèrement et croisa son regard. Ce regard... froid. Un frisson lui traversa l'échine. Elle déglutit et baissa la tête. « Je suis désolée. » Dedem haussa légèrement un sourcil. Kenza serra les poings. « Je n'ai pas pu tout empêcher... J'ai cru que je pourrais y arriver... mais j'ai échoué. »

Dedem posa doucement une main sur son épaule. « Ce n'est pas ta faute. » Elle releva les yeux vers lui, cherchant un reproche qu'il ne lui donnerait pas. Il poursuivit : « Le véritable responsable, c'est moi. »

Kenza ouvrit la bouche, mais Dedem continua. « Je ne maîtrise rien... » Son regard se perdit sur l'horizon meurtri. « Je répète les erreurs des anciens Élus. J'ai agi comme eux. » Ses doigts se crispèrent légèrement. « Je ne peux pas parler d'équilibre... alors que moi-même, je ne le comprends pas encore totalement. »

Un silence pesant s'installa. Centurion s'avança alors, et sous les yeux surpris de tous, il s'inclina devant Dedem. Ce n'était pas un simple geste symbolique. C'était un véritable signe de respect.

Dedem cligna des yeux, légèrement pris au dépourvu.

Le Chef de la Légion de Fer... s'excusait.

« J'ai moi aussi failli à ma mission. » déclara Centurion d'une voix grave. « Je devais protéger cette région. Je devais mener mes hommes. Assurer la paix. » Il observa le champ de bataille. « Regarde ce que nous avons perdu. »

Dedem fixa Centurion un instant, silencieux. Puis, enfin, il répondit. « Si tu n'avais pas été là... je ne serais peut-être même pas en train de te parler aujourd'hui. »

Centurion releva lentement les yeux, surpris. Dedem esquissa un faible sourire. « On ne peut pas tout prévoir. Même si on entrevoit le futur... il change continuellement. »

Un ricanement discret s'échappa de Centurion. « Tch... Tu parles comme un vieux stratège, maintenant. »

Kenza essuya les larmes qui perlaient au bord de ses yeux et attrapa la main de Dedem. « Viens. »

Ils avancèrent ensemble vers Koko.

Lumiel était toujours là, assise aux côtés de Koko. Ses doigts glissaient doucement dans ses cheveux, presque mécaniquement. Kael'Ryn observait la scène, immobile.

Lorsque Dedem arriva, Lumiel leva les yeux vers lui.

« Qui es-tu ? »

Dedem afficha un léger sourire. « Un simple aventurier. »

Il fit un geste de la main, lui indiquant de se lever. Elle hésita une seconde, puis se releva lentement.

Sans plus attendre, Dedem posa une main sur Koko et activa son équilibre. Une lueur verte l'enveloppa aussitôt. Mais à peine la guérison commençait-elle à se propager qu'elle fut immédiatement rejetée.

Dedem haussa un sourcil. « Hmph. »

Le corps de Koko refusait toute intervention.

Il comprit rapidement. Il connaissait cette obstination mieux que quiconque.

Un fin sourire étira ses lèvres. « Typique de lui. »

Il se redressa et regarda Lumiel et Kael'Ryn. « Prenez soin de lui. »

Kael'Ryn croisa les bras et fixa Dedem avec intensité. « Pourquoi mentir ? »

Dedem ne répondit pas immédiatement.

« Nous savons qui tu es réellement. »

Kael'Ryn plongea son regard dans celui de Dedem.

Mais Dedem n'avait pas besoin de parler. Son regard parlait pour lui.

Un regard froid.

Un regard chargé de vécu.

Kael'Ryn ressentit un léger frisson.

Il comprit immédiatement.

Il n'aurait pas de réponse.

Parce que ce regard... se suffisait à lui-même.

Dedem, perdu dans ses pensées, sentit le regard insistant de Kenza sur lui. Lorsqu'il tourna enfin la tête, il vit que quelque chose dans ses yeux était différent. Une gravité inhabituelle, comme si elle portait un fardeau qu'elle s'apprêtait enfin à déposer.

« J'ai quelque chose à te dire. »

Dedem arqua un sourcil, surpris par le ton sérieux de sa sœur. Il hocha lentement la tête et fit un geste de la main, lui indiquant qu'il l'écoutait.

Kenza inspira profondément avant de prendre la parole. « En réalité... nous sommes frère et sœur. »

Le silence s'étira entre eux.

Dedem cligna des yeux, comme si ses pensées refusaient de traiter l'information immédiatement. « ...Quoi ? » Sa voix n'était pas agressive, juste incrédule.

Kenza poursuivit. « Ça paraît impossible, je sais. Mais c'est plus complexe que ça. » Elle serra les poings, cherchant les bons mots. « Imagine un cœur. Toi, Dedem, tu es le cœur. Et Koko et moi sommes ses veines principales. »

Dedem fronça légèrement les sourcils, essayant de suivre.

Kenza continua. « Koko vient du passé, il incarne la structure et la mémoire. Moi, je viens du futur. Je porte l'espoir et la vision. Toi, tu es l'équilibre qui unit ces deux forces... C'est comme si l'Arbre-Monde nous avait créés pour harmoniser passé, présent et futur. »

Dedem ouvrit légèrement la bouche, mais aucun son n'en sortit.

« Mais ce n'est pas tout, » ajouta Kenza. « Koko est un Ancien Constructeur. Il vient d'une époque où les fondations de ce monde ont été bâties. Moi... » Elle marqua une pause, son regard s'assombrissant. « Moi, je viens d'un futur où l'équilibre a été détruit. »

Dedem sentit un frisson lui parcourir l'échine. Un futur... où tout s'effondrerait ?

Kenza continua, la voix plus basse, plus hésitante. « Je n'ai aucun souvenir de cette vie future. Ni comment j'ai été transportée ici. Pareil pour Koko. On a des instincts, des fragments d'émotions... mais pas de souvenirs réels. »

Un silence pesant s'installa entre eux.

Dedem passa une main sur son visage, comme pour remettre de l'ordre dans le chaos de ses pensées. « C'est insensé... » Il regarda Kenza avec intensité. « Comment est-ce qu'on aurait pu être rassemblés... et surtout... pourquoi ? »

Puis, une image lui revint en tête.

Trois ans plus tôt.

Le moment où il avait rencontré Kenza et Koko pour la première fois. Un simple hasard, du moins c'est ce qu'il croyait. Mais aujourd'hui, cette coïncidence paraissait trop parfaite. Il y avait un schéma... un fil invisible qui les reliait depuis le début.

« C'est encore plus flou maintenant... » murmura-t-il, plus pour lui-même que pour Kenza.

Il serra les poings, l'esprit en ébullition. Tout cela... ce n'était pas naturel. Comme si une force, un être supérieur, les avait guidés sans qu'ils ne s'en rendent compte.

Quelqu'un qui observait de loin, manipulant leur destinée.

Un nom lui vint immédiatement en tête.

Omégion.

Son cœur s'emballa

Son cœur s'emballa. Était-ce possible ? Omégion aurait-il orchestré leur rencontre ? Mais... non. Omégion ne donnerait jamais à Dedem des alliés aussi puissants. Il le voulait brisé, pas renforcé.

Alors qui ?

Son esprit explora une autre possibilité.

Alpharion.

Alpharion

Non... impossible. Alpharion était censé être mort. Les Élus n'étaient que ses descendants, un vestige de sa grandeur passée. Il ne pouvait pas être derrière tout ça.

Puis soudain, une idée s'imposa à lui.

Son souffle se coupa.

Un seul nom lui vint en tête, plus menaçant encore que tous les autres.

Astral.

Un frisson glacé lui parcourut la colonne vertébrale

Un frisson glacé lui parcourut la colonne vertébrale. Il se figea, une goutte de sueur perlant sur son front. Astral... l'ombre derrière les ombres. Était-il possible qu'il tire les ficelles depuis le début ?

« Astral... ? » murmura-t-il.

Son cœur battait à un rythme effréné.

Puis il inspira profondément et secoua la tête. Il n'avait pas encore assez de preuves. Il le découvrirait plus tard. Pour l'instant, il avait plus urgent à gérer.

Il leva les yeux vers l'horizon.

Célestion, Lyria et Momo l'attendaient.

Il se redressa, son regard redevenant ferme. Puis, sans un mot, il se rua vers eux.

Lorsqu'il arriva, Momo se tenait droit, son aura irradiant une sérénité qu'il n'avait jamais eue auparavant. Ses yeux rencontrèrent ceux de Dedem, et un sourire énigmatique étira ses lèvres.

Il l'attendait.

Il voulait parler.

Dedem savait que cette conversation allait être cruciale.

Alors, il s'arrêta devant lui, et dans ce moment suspendu dans le temps, il se prépara à entendre ce que Momo avait à dire.

Dedem se tenait face à Momo, l'ancien Nexus, dont l'aura avait changé. Plus stable. Plus lumineuse. Il avait retrouvé son propre équilibre.

Momo croisa les bras et prit une grande inspiration. « Je vais partir. »

Dedem resta silencieux, attendant la suite.

« Alane est une menace bien trop grande pour que vous l'affrontiez maintenant. Il est à un niveau proche de celui du Warden, et contrairement à ce dernier, il n'est pas seul. Il est accompagné de guerriers redoutables... des êtres qui rivalisent avec les Champions de Fer. »

Dedem haussa légèrement un sourcil, mais son regard restait froid et inébranlable.

Momo poursuivit. « Je vais sceller l'Aether. C'est le seul moyen de l'empêcher de venir pour l'instant. Il faudra du temps avant que mon scellement ne cède, mais ce temps, vous en aurez besoin. »

Dedem leva lentement la tête, puis déclara d'une voix calme, presque désintéressée : « Je m'en fiche. »

Momo cligna des yeux, surpris.

Dedem reprit. « Je ne suis pas ici pour m'occuper d'Alane. Je suis ici pour récupérer les Yeux Mystiques. Si je veux plus de puissance, les Yeux sont un bon moyen. »

Un silence s'installa.

Momo l'observa un instant, puis esquissa un léger sourire. « Tu m'en veux pas, alors ? »

Dedem secoua doucement la tête. « Non. » Il croisa les bras. « T'en vouloir serait inutile et prouverait que je n'ai rien compris à mon propre rôle... et encore moins à la leçon de Thalion. »

Le vent souleva légèrement sa cape alors qu'il poursuivait. « Je pardonne. Mais je n'oublie pas. Juger quelqu'un uniquement sur son passé sans prendre en compte ce qu'il est maintenant... ce serait stupide. » Son regard brilla légèrement. « Ce ne serait pas digne d'un Élu. L'équilibre... c'est savoir pardonner, mais ne jamais oublier. »

Momo le fixa, avant de sourire, sincèrement cette fois-ci. Il semblait soulagé. « T'es vraiment intéressant, Dedem. »

Il recula légèrement, levant une main au ciel. « Je sais qu'on se recroisera. Un événement particulier nous réunira... » Il afficha un air amusé. « Alors à plus tard. »

Dedem hocha la tête, son regard toujours sérieux, observant l'instant où Momo disparut lentement dans une lumière bleuâtre, s'évaporant de la réalité.

L'atmosphère s'apaisa.

Lyria, qui se tenait à quelques pas derrière, poussa un long soupir avant de s'avancer. Ses cheveux étaient redevenus bleus, sa forme de base rétablie.

Un sourire léger éclaira son visage. « Je suis contente, Dedem. »

Mais alors qu'elle attendait une réponse, Dedem détourna le regard. Son expression s'assombrit légèrement.

« J'ai encore échoué. »

Lyria cessa de sourire. « Vis-à-vis de moi... » compléta-t-elle.

Dedem hocha la tête. Il n'osait pas la regarder dans les yeux. Il avait failli à sa mission de la protéger, il avait perdu le contrôle. Si Momo et elle n'avaient pas été là, il aurait pu tuer n'importe qui. Y compris elle.

Soudain, un petit choc retentit.

Paf.

Dedem sursauta en sentant une main s'abattre sur sa tête. Il releva brusquement les yeux et vit Lyria le fixer, son regard sérieux.

« Arrête ça, Dedem. »

Il écarquilla légèrement les yeux.

Lyria croisa les bras. « Il ne faut pas toujours t'en vouloir une fois que la situation est réglée. Le principal, c'est de comprendre tes erreurs. »

Dedem ouvrit la bouche, mais Lyria ne lui laissa pas le temps de répondre.

« Je ne t'en veux pas. »

Le silence tomba.

Elle sourit doucement. « Ce que je veux, c'est continuer cette aventure avec toi. »

Dedem resta immobile. Les mots de Lyria résonnèrent en lui, comme une vague douce et apaisante qui contrastait avec le chaos qu'il venait d'affronter.

Puis une ombre massive s'avança.

Célestion.

Le dragon aux écailles éclatantes marchait d'un pas lourd et puissant. Dedem se tourna vers lui, mais son regard fut immédiatement attiré par la large cicatrice sur son torse.

La cicatrice que lui avait laissée.

Dedem s'approcha, son expression s'assombrissant. Il leva lentement sa main, son équilibre prêt à guérir la blessure.

Mais avant qu'il ne puisse l'atteindre, Célestion le repoussa d'un mouvement d'aile.

Dedem releva la tête, surpris.

Célestion le regarda dans les yeux, puis il sourit légèrement.

« Ne la soigne pas. »

Dedem fronça les sourcils. « Pourquoi ? »

Le dragon posa une patte sur sa cicatrice. « C'est une preuve. »

Dedem haussa un sourcil.

Célestion continua, sa voix grave mais teintée de bienveillance. « Une preuve que tu as réussi à t'en sortir. Une marque de ta victoire. »

Dedem resta silencieux.

Célestion lâcha un léger rire. « Dedem... je te connais. Tu passes ton temps à t'en vouloir pour tout. Mais regarde autour de toi. »

Dedem regarda.

Le ciel était sombre, les terres dévastées... mais il voyait Kenza, Centurion, Lyria, Célestion... et même les Draco-Chevaliers qui s'étaient calmés.

Ils étaient toujours là.

Malgré tout.

« Tu ne pourras pas toujours tout empêcher. Mais ce n'est pas grave. Tant que tu avances... tant que tu tires des leçons de tes erreurs... c'est ça, l'équilibre. »

Dedem baissa légèrement la tête, son cœur battant plus calmement.

Célestion souffla une puissante bouffée d'air chaud. « Tch. Tu réfléchis trop, Dedem. »

Lyria rit doucement. Kenza esquissa un sourire en coin. Même Centurion laissa échapper un léger ricanement.

Dedem releva lentement les yeux, et pour la première fois depuis un long moment, un sourire naquit sur son visage.

Ce n'était pas fini.

Mais pour l'instant... il était encore debout.

Et c'était tout ce qui comptait.

À suivre...