"Le Sanctuaire Oublié"

La petite créature est blottie contre une pierre, l'observant avec une prudence mêlée de curiosité. Une boule de poils noirs, dotée de minuscules pattes et d'ailes délicates, presque trop frêles pour voler. Ses yeux ronds brillent dans l'obscurité, oscillant entre la peur et l'envie d'approcher. Elle ne semble pas savoir si elle doit fuir ou s'aventurer plus près.

Aleya tente, malgré la douleur, de tendre son bras vers elle. Un instinct profond, inexplicable, lui souffle qu'elle ne doit pas l'effrayer. Mais son corps refuse d'obéir plus longtemps. Ses muscles se crispent, ses paupières deviennent lourdes. Sa vision se trouble, et la dernière chose qu'elle voit avant que l'ombre ne l'engloutisse de nouveau, c'est la créature qui penche légèrement la tête.

Une demi-journée s'écoule lorsqu'Aleya revient à elle. Sa respiration est plus stable, et son corps, bien que meurtri, répond mieux. La régénération a fait son œuvre, du moins en partie. Les blessures de la chute guérissent bien plus rapidement que prévu, mais ne se sont pas complètement refermées. Tandis que celles infligées par Valhen persistent encore, profondes, brûlantes.

Rassemblant ses forces, elle roule sur le côté, utilisant son bras valide pour se redresser légèrement. Rampant avec effort, elle avance de quelques mètres, ignorant la douleur qui martèle ses membres. Chaque mouvement lui arrache un gémissement, mais elle n'a pas le choix. Rester immobile signifie mourir.

Soudain, un bruissement attire son attention.

La créature est de retour. Toujours craintive, mais moins hésitante. Elle trottine à quelques mètres d'Aleya, puis s'arrête, agitant ses ailes. Un appel, une invitation. Elle veut qu'elle la suive.

Aleya serre les dents. Bouger plus est un supplice, mais elle n'a pas d'autre choix. La petite chose s'éloigne un peu, avant de tourner la tête vers elle, l'encourageant silencieusement. Après plusieurs minutes d'efforts douloureux, Aleya parvient à suivre la créature jusqu'à un parterre de fleurs luminescentes, regroupées en cercle au pied d'un grand rocher.

Dès qu'elle pose une main sur le tapis végétal, une douce chaleur envahit son corps. Une énergie inconnue pulse sous sa peau, et elle sent une partie de ses forces revenir. Son souffle devient plus fluide, ses muscles moins tendus. Une étrange sensation de bien-être l'enveloppe, effaçant légèrement l'ombre de la douleur.

Elle reste là quelques instants, savourant cette accalmie. La clairière… l'aide-t-elle à guérir ? Elle n'a jamais entendu parler d'un tel phénomène. Mais il est indéniable que son corps récupère plus vite ici. Son regard glisse vers la créature qui l'observe toujours, blottie non loin. Aleya lui adresse un faible sourire.

— …Merci, souffle-t-elle d'une voix rauque.

Un frémissement parcourt les ailes de la créature. Puis, après un court instant d'hésitation, elle s'éloigne à nouveau. Cette fois, Aleya parvient à se redresser lentement sur ses jambes. Elle boîte encore, mais elle peut avancer. Suivant son guide, elle progresse au cœur de la clairière.

Finalement, elle atteint un espace dégagé, où trois monolithes se dressent, formant un triangle parfait. La petite créature s'arrête juste devant eux, comme pour l'attendre. Aleya observe les pierres anciennes, sentant quelque chose d'étrange émaner d'elles. Une présence, un écho du passé peut-être. Elle ne sait pas encore ce que signifie cet endroit.

Alors qu'elle effleure l'une des pierres du bout des doigts, une onde de chaleur traverse son bras. Les symboles gravés à sa surface semblent vibrer sous sa peau.

— Qu'est-ce que…

Un grondement lointain s'élève, comme si la terre répondait à sa présence. Elle recule d'un pas, le cœur battant. Un murmure siffle dans l'air, indistinct, mais envahissant. Puis, sans crier gare, une intense lumière jaillit des monolithes.

Aleya plisse les yeux, aveuglée. Lorsqu'elle les rouvre, un portail se déploie entre les pierres. Une brise inexpliquée soulève ses cheveux, faisant danser les ombres autour d'elle.

Son souffle se coupe. Est-ce une issue ? Un piège ?

Elle hésite, la prudence lui criant de reculer. Mais inconsciemment elle fait un en avant et tend sa main vers la surface lumineuse.

Dès qu'elle effleure l'énergie, tout bascule.

Une force irrépressible l'aspire, la précipitant dans l'inconnu.