Aleya vacille sous la lumière intense du portail. Le sol sous ses pieds se stabilise enfin, mais avant qu'elle ne puisse réagir, une force écrasante émerge en elle, un grondement sourd se levant dans ses entrailles. L'énergie s'engouffre dans ses veines avec une violence inouïe, chaque fibre de son corps vibre sous la pression. Ses veines s'illuminent d'un violet éclatant, partant de sa poitrine et se répandent lentement, filant le long de ses bras, de son cou, et jusqu'à ses mains. Elles pulsent, comme si elles cherchaient à s'échapper de sa peau.
L'air semble se resserrer autour d'elle, compressant ses muscles et ses nerfs. La douleur devient insupportable, l'énergie étrangère gronde à l'intérieur d'elle, forçant chaque cellule à se tendre sous la pression. Tout son être tremble, pris dans un tourbillon d'énergie pure, prête à exploser.
Elle lutte pour maintenir son équilibre, appuyant sa main contre un arbre. Puis, aussi soudainement que cela a commencé, la pression se relâche. Le silence reprend sa place, les veines perdent leur éclat.
Aleya tombe lentement à genoux, son cœur battant fort dans sa poitrine. L'instant s'est évaporé aussi vite qu'il est venu, mais une chose est certaine : quelque chose en elle a changé. Un pouvoir nouveau, une présence inconnue, est désormais ancrée. Elle se redresse, son corps encore tremblant, mais la détermination l'emporte sur la confusion.
Aleya se trouve toujours dans la même clairière, mais cette fois, le paysage qui l'entoure est différent. Il est pur, presque apaisant, l'énergie magique ici est stable et douce, une caresse sur sa peau. La lumière qui inonde l'endroit est chaude, presque réconfortante. Les spores lumineux de la clarière ont disparu, remplacés par des insectes bioluminescents qui dansent autour d'elle.
Elle se tient au cœur de cette forêt splendide, un monde à la beauté envoûtante et étrangement sereine. Les arbres aux formes fascinantes s'élancent vers le ciel, leurs feuilles dansant doucement sous le souffle léger du vent. Tout autour d'elle, la végétation est d'une richesse que ses yeux n'ont jamais connue : des fougères qui se courbent sous le poids de la lumière, des fleurs aux couleurs improbables. Le tout est habitée par des insectes aux ailes scintillantes, dont le bourdonnement paisible semble en harmonie avec le paysage.
Bien que la beauté de cet endroit soit époustouflante, Aleya reste sur ses gardes. Ses pas sont discrets, prudents. Ses poursuivants ne sont peut-être pas loin, et l'inexplicable phénomène qui vient de se déclencher en elle ne fait que s'ajouter à l'inquiétude qui bouillonne en elle. Pourtant, elle avance, comme attirée par cette splendeur, un monde si différent du sien.
Elle croise des cerfs majestueux, des biches effleurant les clairières sans crainte, et même un groupe de petits animaux qu'elle n'a jamais vus. Chacun d'eux semble indifférent à sa présence, comme si elle n'était qu'une ombre parmi tant d'autres. Elle avance sans bruit, ses yeux capturant chaque détail, son esprit noyé dans la curiosité, malgré la tension qui ronge ses pensées.
Alors qu'elle s'enfonce un peu plus dans la forêt, un bruit la fait se figer. Des voix. Elle s'approche, se cachant derrière les arbres, et observe un groupe d'humains en pleine confrontation avec une créature qu'elle n'aurait jamais imaginée. Un félin de deux mètres d'envergure, aux griffes acérées comme des lames, se bat avec l'un des hommes. Son corps noir contraste à la végétation, ses yeux, brillants d'une lueur inquiétante, ne laissent aucun doute sur sa nature sauvage.
Les trois humains semblent parfaitement entraînés. La femme, agile et rapide, manie une épée avec une précision mortelle. L'homme portant un bouclier fait office de protection, protégeant son allié tout en ripostant avec des coups puissants. Le dernier, un homme à la lance, harcèle la créature à distance, ne lui laissant aucun répit.
Finalement, après un échange intense, le félin tombe sous les coups. Le groupe se regroupe, essoufflé mais indemne. Aleya écoute leur conversation, cachée dans les ombres, veillant à ne pas être repérée.
— "Bien joué tout le monde ! Rien de cassé ?", demande la femme, essuyant la sueur de son front.
— "Rien de grave", répond l'homme au bouclier. "Mais ce chat … il n'a rien d'ordinaire. Que faisait-il en plein jour ?"
L'homme à la lance se frotte les bras, observant la créature morte. "Aucune idée ! Mais c'était notre mission ! Je pense je vais aller me poser à la taverne. Un petit coup pour décompresser, ça ferait du bien."
— "Je te suis, ça me tente aussi !", réplique la femme, et tous deux échangent un sourire complice.
Aleya reste silencieuse, scrutant chaque mouvement, chaque mot, avant de les suivre discrètement lorsqu'ils se remettent en marche.
Ils arrivent près d'une rivière. Le groupe décide de faire une pause. La femme s'éloigne, se dirigeant vers l'eau pour remplir les gourdes. Aleya, qui la suit de loin, peine à la suivre à travers la dense végétation. Chaque mouvement d'Aleya est calculé, cherchant à ne pas se faire repérer. Pourtant, la végétation semble de plus en plus difficile à traverser.
En cherchant à retrouver sa trace, elle se perd un instant dans les dédales de la forêt. Soudain, au détour d'un arbre, elle tombe nez à nez avec la femme. Les deux se fixent, surprises de se retrouver face à face. Plus aucun bruit ne se fait entendre. La tension est palpable.
Aucun mot ne s'échange, mais le regard de l'inconnue est chargé de curiosité et de méfiance.