Tu pues

Lorsqu'on fait un métier où, du jour au lendemain, on peut venir frapper à votre porte pour vous arrêter, mieux vaut prévoir un plan d'urgence ou au moins une voie de fuite. Victor était assez prudent pour y penser, mais je devrais peut-être lui rappeler que les égouts ? Il ne doit pas vraiment avoir le nez fin.

Arrivé devant un certain mur, je palpai sa surface à la recherche d'un son particulier au niveau d'une brique mal posée.

Clic.

Aussitôt, un passage révélant un long couloir sombre se dévoila. Il menait au sous-sol de l'immeuble occupé par Victor, des passages semblables étaient dissimulés un peu partout pour prévenir certaines circonstances.Dès que je sortis, je pris une grande bouffée d'air frais.

Ensuite, je montai précipitamment les escaliers.

— Sirius, où étais-tu ? T'en as mis du temps !

Lucy tenait dans ses mains un plateau contenant une carafe d'eau chaude et des serviettes.

C'est étrange que je ne l'aie pas remarquée avant qu'elle ne me parle... Elle doit sûrement encore effacer sa présence sans s'en rendre compte.

— Je prenais un bain, répondis-je.

Elle me fixa étrangement avant d'étouffer un rire.

— Soyons sérieux, c'est vraiment le moment de prendre un bain ? Et comment tu fais pour puer autant ? Tu t'es lavé avec de l'urine de putois ?

Est-ce que je sens mauvais à ce point ? On dit que l'homme peut s'adapter à tout... Cette odeur est-elle devenue normale pour moi ?

— Heu, Lucy, t'es bien une fille, n'est-ce pas ? Puis-je avoir du parfum ? Tu ne dois sûrement pas en manquer, je te vois en mettre toutes les cinq minutes.

Plash.

Qu'est-ce que j'ai dit de travers ? Pourquoi m'avoir renversé de l'eau chaude sans raison ?

Lucy poursuivit sa marche rapide, s'éloignant de moi avant de crier furieusement :

— Brenda va bien, ça, je pense que monsieur ne s'en soucie pas ? Il préfère prendre une douche dans les égouts ? À son réveil, je lui dirai que tu t'en fiches qu'elle soit vivante ou morte !

Qu'est-ce qu'elle a aujourd'hui ? A-t-elle ses...

Pourquoi est-ce que je pense à un tel sujet ?

Eh bien, ce n'est pas aujourd'hui que je comprendrai les femmes.

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Je me retrouvai en peu de temps devant le bureau de Victor. Sans prendre la peine de frapper, j'entrai.

Je le retrouvai dans la même position que je l'avais laissé. La seule différence était le nombre de mégots de cigarettes qui s'étaient entassés.

— T'as foutu un sacré bordel dehors, lança-t-il aussitôt qu'il me vit, sans cacher le ton ironique de sa voix.

— Je t'ai connu de meilleure humeur.

Je n'eus droit qu'à un léger ricanement.

J'en profitai pour prendre place, tout en posant les pieds sur son mobilier luxueux.

Il renifla.

 — Enlève tes sales pattes de mon bureau.

Reniflement, reniflement.

— Tu pue le rat pourris.

Depuis quand tout le monde est devenu expert en odorat ? Je fis mine de n'avoir rien entendu.

— Ne crois-tu pas que tu as des choses à me dire ? demandai-je d'un ton implacable.

— Je te retourne la question. Trois immeubles réduits en poussière, des centaines de blessés, la ville sens dessus dessous... C'est un miracle qu'il n'y ait pas de morts, dit-il en faisant claquer son verre sur la table.

Je restai silencieux. Il ne servirait à rien de tenter de discuter avec lui dans cet état. Il allait se plaindre comme s'il allait dépenser ne serait-ce qu'une seule pièce pour la reconstruction. Encore une fois, je ne su pas étonné de la rapidité auquel il a pu obtenir toutes ses informations. Un jour je lui demanderai quel est son secret. Je doute qu'il me le dise gratuitement ,même sur son lit de mort, il cherchera à gagner quelques choses.

Je me demande ce qui s'est passé après que je sois parti.

Après un bon moment à faire semblant de l' entendre et juste à l'instant où j'allais m'ennuyer..

La porte s'ouvrit.

— J'espère que je ne dérange pas votre petit moment intime ?

Iris, vêtue d'une belle robe rouge, prit place sur la table, les jambes croisées, avant de se plaindre à son tour :

— C'est fatiguant d'être célèbre. J'ai eu tout le mal du monde à me débarrasser de mes nouveaux paparazzis.

Reniflement, reniflement.

— Oh, ça ne sent pas la rose ici.

Sans faire de commentaire, je la questionnai :

— Comment s'est fini ton spectacle ?

Posant un doigt sur ses lèvres, elle prit un air faussement pensif.

— Pas grand-chose, après que quelqu'un m'a tiré dessus.

Je sens qu'elle va me le faire regretter.

— Les Exécuteurs ont su rapidement calmer tout le monde, avec une telle facilité qu'on aurait cru de la magie. Ils ont trouvé le tireur, mais malheureusement, il s'est fait exploser avant d'être appréhendé. Aucun complice n'a encore été identifié, mais à en juger par la tournure des événements, on suppose qu'il s'agit d'une tentative ratée pour délivrer le maire.

— Hmm, les traîtres à l'Empereur ont été purgés par le peuple, aucun n'a été épargné.

Oh, Lucy a su faire passer Brenda pour morte. Je me demande comment elle s'y est prise.

Avec cela, on est éloigné de tout soupçon.

— Oh, j'ai failli oublier, dit-elle avant de se tourner vers

Victor d'une manière dramatique.

— Brenda s'est réveillée, et elle a beaucoup à nous apprendre.