La créature rugit et fonça sur Yup Mo, ses griffes prêtes à le déchirer. Avant qu'il ne puisse réagir, il fut projeté violemment contre un mur. La douleur envahit son dos, et il tomba au sol, son esprit noyé dans la confusion.
Lorsqu'il se redressa, il aperçut des cadavres autour de lui, des soldats en uniforme, leurs corps déchiquetés et ensanglantés. Le sol était couvert de sang, et l'odeur de la mort emplissait l'air. Il n'avait jamais vu une scène aussi horrifiante.
"Qu'est-ce qui se passe ici ?" murmura-t-il, le cœur battant la chamade.
Soudain, la créature se lança à nouveau vers lui, griffes prêtes à l'atteindre. Alors, son regard se posa sur une épée abandonnée au sol. Il se précipita dessus, et à peine l'eut-il saisie qu'une sensation étrange envahit son corps. La voix dans sa tête, répétant "Tue, tue", devint insupportable. Un instinct violent s'empara de lui, il n'était plus maître de ses gestes.
À l'instant où la créature se précipitait vers lui, il leva l'épée instinctivement, esquivant l'attaque et frappant d'un geste rapide. La créature hurla, reculant sous la douleur d'une large entaille sur son torse.
Yup Mo, tout comme la bête, resta figé. Il ne comprenait pas ce qui venait de se passer. Mais une chose était certaine : il ressentait un besoin incontrôlable de détruire cette menace.
"TUE !" hurla la voix dans son esprit, le poussant à achever ce qu'il avait commencé.
Yup Mo était encore sous le choc. Jamais il n'aurait imaginé qu'une simple épée puisse libérer une telle force en lui. La voix dans sa tête hurlait sans cesse de tuer, mais ça ne lui ressemblait pas. Ce n'était pas lui.
Il essaya de reprendre le contrôle, de comprendre ce qui venait de se passer. Mais avant qu'il puisse réfléchir, la créature fonça à nouveau, ses griffes prêtes à le déchiqueter. L'instinct prit le dessus. La voix dans sa tête devint plus forte, le forçant à attaquer. Il n'avait plus le choix.
La créature s'effondra, le bruit sourd de sa chute résonnant dans la ruelle. L'épée de Yup Mo, couverte de sang noir, tremblait entre ses mains. Il n'arrivait pas à réaliser ce qu'il venait de faire. Était-ce vraiment lui ? Ou était-ce la voix dans sa tête qui l'avait poussé à agir ainsi ?
Il fixa le corps inerte de la créature, son cœur battant la chamade. Mais alors que la poussière retombait, un frisson glacé parcourut son dos. D'autres ombres apparaissaient dans la ruelle, plus petites, mais tout aussi menaçantes. La menace ne faisait que grandir.
"Ce n'est pas fini", murmura la voix dans sa tête, plus forte que jamais. "Pas encore..."
Yup Mo se redressa lentement. Il se sentait vidé. Il n'était pas prêt pour ça. Pas du tout. Il jeta un coup d'œil autour de lui, son regard se perdant dans le chaos. Il n'avait pas de plan. Il n'était même pas sûr de savoir quoi faire.
Il entendit des bruits de pas précipités, des cris lointains. Puis, des ordres, mais il ne comprenait rien. Une langue qu'il ne connaissait pas. Des voix, mais aucun sens derrière. Un cri déchira l'air, perçant la confusion dans laquelle il se trouvait. Il se figea, les yeux écarquillés.
Des soldats ? Peut-être. Il les aperçut enfin, courant à travers la ruelle dévastée, mais il ne pouvait pas comprendre ce qu'ils disaient. Tout ce qu'il entendait, c'était du brouillard, des sons étrangers. Une ligne de soldats s'approchait, armés et prêts à se battre, mais leurs mots étaient inaudibles.
"Reste où tu es ! Ne bouge pas !" cria l'un d'eux, mais Yup Mo ne capta rien. Tout lui paraissait flou, comme s'il était à l'extérieur de la scène.
Un soldat plus grand s'avança, le regardant avec intensité. "Tu es... seul ici ?" demanda-t-il.
Yup Mo ne répondit pas. Il voulait parler, mais les mots restaient coincés dans sa gorge. Il n'avait pas l'énergie. Il se sentait comme un étranger dans ce monde. Les soldats autour de lui s'agitaient, mais la langue était un obstacle insurmontable.
"On doit se regrouper !" hurla un autre soldat, mais le son se dissipait dans l'air, sans qu'il n'y ait de sens pour Yup Mo. Il secoua la tête, perdant pied.
Ils se préparaient à se battre, et il se sentait là, au milieu d'eux, comme un étranger invisible. Il ne savait même pas comment réagir. Les créatures se rapprochaient, et il restait là, pris dans cette confusion, sans comprendre ce qu'on attendait de lui.
La bataille faisait rage, et Yup Mo se tenait à l'écart, observant, presque figé. Les soldats, malgré leur nombre, semblaient être en sous-effectif. Les créatures étaient nombreuses, rapides, et leur apparition semblait presque infinie. Le bruit des combats emplissait l'air, mais Yup Mo n'arrivait pas à s'y mêler. Il observait, sans savoir s'il devait intervenir ou simplement rester en retrait.
Tout lui semblait irréel. Une partie de lui était terrifiée. L'autre, celle qui avait tué la créature, sentait qu'il y avait quelque chose de plus grand à accomplir, quelque chose qu'il ne comprenait pas encore. Mais il savait que cela ne suffirait pas.
Il aperçut des soldats en fuite, leurs visages épuisés, marqués par la peur. "Restez ici ! Ne laissez pas les créatures nous submerger !" hurla le commandant, mais les mots n'avaient plus de sens. Tout se brouillait dans sa tête. Il n'arrivait même pas à saisir l'urgence de la situation.
Il ferma les yeux un instant, pris dans un tourbillon de confusion et de frustration. Pourquoi était-il là ? Que devait-il faire ? Ses jambes étaient lourdes, son corps fatigué. Il ne comprenait rien à ce qui se passait autour de lui. Et pire encore, il ne pouvait pas s'échapper.
Le chaos continuait autour de lui, comme une scène dont il ne faisait plus partie. Il se sentait tellement seul.
La bataille avait laissé ses marques, mais celles qui comptaient le plus étaient invisibles. Après avoir été sauvé par un des soldats, Yup Mo n'avait plus vraiment su où il se trouvait. Les souvenirs de ce jour-là étaient flous, comme un rêve qui s'échappe dès qu'on ouvre les yeux. Il n'avait pas compris ce qui s'était passé après sa chute, ni comment il s'était retrouvé dans ce camp de soldats.
Il était un étranger dans ce monde, un étranger dont la langue restait un océan infranchissable. Les mots des soldats lui glissaient dessus comme de l'eau sur du sable, sans jamais laisser de trace. Même après plusieurs mois d'efforts, il ne parvenait à saisir que quelques bribes : "soldat", "danger", "attaquer". Mais tout le reste… c'était comme un écho lointain, un murmure qu'il ne parvenait pas à comprendre.
Ils n'avaient pas cherché à lui enseigner la langue. Non, ce qu'ils avaient préféré, c'était le pousser dans une routine stricte de discipline et de cultivation. C'était plus simple, plus rapide. Après tout, il n'avait pas besoin de comprendre chaque mot pour être utile. On l'avait formé, encore et encore, dans l'espoir de faire de lui un soldat capable de tenir son propre rôle dans ce monde dévasté.
Les soldats l'avaient accepté. Pas par gentillesse, mais parce qu'il n'y avait pas de place pour les faibles dans cet endroit. Il avait appris à se battre. Pas vraiment pour une cause, pas pour un idéal qu'il pouvait comprendre, mais simplement pour survivre. Chaque jour était une nouvelle épreuve, un nouveau test de résistance, de volonté. Au début, c'était un combat contre son propre corps, contre la douleur, contre la fatigue. Petit à petit, les gestes étaient devenus plus fluides, plus instinctifs. Mais chaque victoire sur son corps était aussi un échec dans la compréhension de ce qui se passait autour de lui. Les soldats parlaient, ordonnaient, mais il ne comprenait toujours pas.
C'était une vie solitaire. Pas parce qu'il était rejeté, mais parce qu'il se sentait à chaque instant comme un étranger dans sa propre peau. Parfois, il entendait des rires, des échanges légers, des moments de camaraderie entre les autres soldats. Et lui, il était là, dans son coin, un observateur silencieux, enfermé dans un monde qu'il ne pouvait pas saisir.
Mais malgré la distance, quelque chose bouillonnait en lui. Pas encore clairement, pas encore entièrement, mais il sentait cette étrange énergie, cette force qui l'avait poussée à tuer la créature, cette voix qui murmurait dans son esprit, persistante et insistance. Il n'avait pas de réponse, pas encore, mais il savait qu'il y avait quelque chose à comprendre, quelque chose de plus grand qui se jouait. Il n'était pas sûr de ce que c'était, mais il avait l'impression qu'il n'était pas là par hasard. La guerre, la violence… tout cela semblait être un simple jeu d'échecs où il n'était qu'une pièce parmi d'autres. Et pourtant, une partie de lui savait que sa place ici n'était pas définitive. Qu'il y avait quelque chose qui l'attendait. Mais il n'arrivait pas à voir quoi.