Chapitre 31 — Le poids de la vérité

Le silence étouffant semblait pétrifier tout le pavillon du prince héritier.

Le jeune enfant, après l'intervention rapide du médecin, se reposait paisiblement dans une chambre voisine, sous la surveillance attentive de deux nourrices.

Dans la cour, le temps semblait suspendu, jusqu'à ce que des pas précipités résonnent soudain sur les dalles de pierre.

Tous se tournèrent immédiatement.

L'Empereur, majestueux dans sa robe de soie noire brodée de dragons dorés, franchit le seuil d'un pas rapide, suivi de près par le garde Wei, au regard tranchant comme une lame. Derrière eux, des soldats de la garde impériale s'alignèrent avec discipline.

— « Que s'est-il passé ? » demanda la voix grave de l'Empereur, résonnant comme un coup de tonnerre.

Avant même que Jiayi ne puisse répondre, une silhouette arriva en courant :

La noble consort Ying, vêtue d'une robe céladon élégante, ses cheveux relevés avec soin, s'agenouilla immédiatement devant lui.

— « Majesté ! Ayant appris l'incident, je me suis précipitée. Je vous supplie d'écouter la vérité : Dame Jiayi est innocente. Elle n'a fait que protéger l'Altessse. »

Derrière elle, les murmures commencèrent à enfler parmi les courtisans présents. La noble consort avait la réputation d'être intègre : son soutien pesait lourd.

Puis, Xiaolan, la servante dévouée de Jiayi, s'avança à son tour, ses yeux étincelants de ferveur.

— « Majesté ! Ma Dame n'a jamais voulu du mal à l'Altessse. Elle l'aime sincèrement. Quelqu'un d'autre a dû échanger le gâteau ! »

L'Empereur fixa Jiayi, l'invitant à parler.

Jiayi, droite, digne malgré la pression, répondit avec calme :

— « Majesté. Quelqu'un a remplacé le gâteau que j'avais préparé pour l'Altessse. Nous avons retrouvé une servante tentant de s'éclipser discrètement. »

Un garde s'avança à cet instant, tenant fermement une jeune servante, dont le visage pâle trahissait la terreur.

Dans ses mains, il montrait un mouchoir taché de résidus de noix écrasées.

Jiayi s'inclina légèrement et demanda :

— « Avec la permission de Votre Majesté, j'aimerais prouver son implication. Qu'on m'apporte une bassine d'eau. »

Un ordre fut donné d'un simple signe de tête.

Peu après, une large bassine d'eau claire fut placée au centre de la cour. Jiayi se tourna vers la servante accusée :

— « Trempez vos mains. »

La jeune femme hésita, ses yeux affolés cherchant une échappatoire, mais sous les regards insistants, elle finit par plonger ses mains dans l'eau.

Presque immédiatement, des irisations grasses apparurent à la surface, révélant la présence d'huile.

— « Elle a manipulé quelque chose contenant des noix ! » s'écria l'un des médecins impériaux.

La servante, prise au piège, s'effondra en larmes.

— « C'est vrai ! Je... j'ai échangé le gâteau… sur ordre… »

Mais avant qu'elle ne puisse dire de qui venait cet ordre, l'Impératrice elle-même, impassible, intervint d'un ton glacial :

— « Elle a trahi le palais. Faites-la disparaître. »

D'un geste sec, elle congédia la servante, qui fut aussitôt emmenée, malgré les protestations de Jiayi :

— « Elle doit parler, Majesté ! »

Mais l'Empereur posa calmement une main pour l'apaiser. Sa voix grave coupa court à toute contestation :

— « L'essentiel est que l'Altessse soit saine et sauve. »

À peine cette déclaration faite, deux silhouettes surgirent, haletantes : le précepteur du prince et le conseiller Huang.

— « Majesté ! » supplia le conseiller. « Dame Jiayi n'a rien fait de mal ! »

— « Elle est innocente ! » renchérit le précepteur.

Mais ils arrivaient bien trop tard.

Les preuves, irréfutables, parlaient d'elles-mêmes :

La main souillée d'huile, le gâteau original retrouvé dissimulé au coin du jardin, la tentative de fuite de la servante…

L'Empereur, silencieux quelques instants, sembla réfléchir.

Puis, il avança de quelques pas vers Jiayi.

Tout le monde retint son souffle.

Ses yeux d'aigle se posèrent sur la jeune femme avec une intensité rare.

— « Jiayi, » déclara-t-il d'une voix forte, « pour ta bravoure, ta clairvoyance, et ton dévouement envers mon fils… »

Il marqua une pause, regardant brièvement la noble consort, puis Xiaolan, puis tous les courtisans.

— « À partir de ce jour, tu seras nommée "Compagnie de Jeu Officielle du Prince Héritier". Tu veilleras à ses divertissements, à son bonheur, et tu continueras à être sa lumière. »

Un murmure d'étonnement parcourut l'assemblée.

Être "Compagnie de Jeu Officielle" n'était pas un titre politique, mais il s'agissait d'un privilège immense, car il signifiait avoir l'accès direct au prince héritier — et donc à l'avenir de l'Empire.

Jiayi s'inclina profondément :

— « Je suis honorée, Majesté. Je m'acquitterai de cette tâche avec tout mon cœur. »

Derrière elle, Xiaolan rayonnait de fierté.

Quant à l'Impératrice, bien qu'elle sourît froidement, ses yeux, eux, lançaient des éclairs de haine.

Elle n'avait pas seulement échoué à discréditer Jiayi.

Elle l'avait, malgré elle, propulsée encore plus près du cœur du pouvoir.