Chapitre 36 — Entre jeux d'esprit et promesses silencieuses

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La porte massive de bois sculpté s'ouvrit en silence.

Jiayi pénétra dans la pièce spacieuse, où l'air était empli d'un parfum subtil d'encens de santal.

Au centre, sous l'immense fresque céleste du plafond, l'Empereur Nangong Liwei était assis en toute simplicité.

Devant lui, sur une table basse en bois de santal finement ciselé, était installée une partie de Go chinois inachevée.

Le souverain leva les yeux et accueillit Jiayi d'un sourire énigmatique, tapotant légèrement la place vide devant lui.

— « Approche, Jiayi. Assieds-toi. »

Jiayi, un peu surprise et légèrement blasée par cette scène inattendue, s'approcha en ajustant son manteau léger.

— « Votre Majesté… » dit-elle, les sourcils légèrement froncés. « Ne me dites pas que la fameuse "mission importante"… c'était pour une partie de Go ? »

Son ton, respectueux mais malicieux, tira un éclat de rire sincère à l'Empereur.

Il posa un pion noir sur le plateau, d'un geste décontracté.

— « N'est-ce pas là la plus grande des stratégies, Jiayi ? Conquérir sans épée, sans bataille. Viens donc m'affronter. »

Un petit sourire amusé naquit aux coins des lèvres de la jeune femme.

Elle s'assit gracieusement en face de lui, ses manches glissant doucement sur le sol lustré, et prit les pions blancs.

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La partie commença.

Les pions s'entrechoquaient doucement sur le plateau, ponctués par les remarques discrètes de l'Empereur.

Ils discutaient à voix basse, presque en chuchotements, mêlant jeu et conversation plus sérieuse.

— « Sais-tu pourquoi j'ai choisi ce jeu, aujourd'hui ? » demanda-t-il tout en posant un pion au centre.

Jiayi, concentrée, répondit sans lever les yeux :

— « Parce que chaque mouvement est un pas vers l'inconnu, et chaque erreur peut coûter une guerre. »

L'Empereur éclata d'un rire bref et approbateur.

— « Exactement. Une bonne stratège sait manier autant les épées que les pions. »

Les minutes s'étiraient. Malgré son habileté, Jiayi sentait peu à peu l'Empereur prendre l'ascendant.

Il jouait avec une dextérité impressionnante, tissant autour d'elle un piège de pierres noires dont elle peinait à se défaire.

Enfin, après un dernier mouvement implacable, l'Empereur leva les yeux et déclara avec amusement :

— « Échec et mat, si je puis dire. »

Jiayi laissa échapper un petit rire et s'inclina légèrement.

— « C'était une partie amusante, Votre Majesté. J'espère avoir d'autres occasions de perdre… mais peut-être aussi de gagner. »

L'Empereur hocha la tête, satisfait.

— « Je compte sur toi. Tu apprendras vite, j'en suis certain. »

Avec respect, Jiayi se leva, salua le souverain avec élégance, et sortit de la pièce, le cœur étrangement léger.

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Sur le chemin du retour, traversant les longs corridors ornés de tentures d'or et de soie, Jiayi aperçut deux silhouettes familières approcher.

Le petit prince héritier, rayonnant de bonne humeur, avançait à petits pas rapides, suivi de près par son fidèle précepteur Xu, toujours aussi droit et solennel.

Le jeune prince, en apercevant Jiayi, poussa un petit cri de joie.

— « Grande sœur Jiayi ! »

Jiayi s'agenouilla légèrement pour se mettre à la hauteur du petit garçon.

Le petit prince, tout fier, rougit légèrement avant de poser un baiser doux et rapide sur la joue de Jiayi.

Jiayi cligna des yeux, légèrement surprise, avant de sourire tendrement.

Le précepteur Xu, quant à lui, resta bouche bée, la bouche entrouverte, incapable de croire ce qu'il venait de voir.

Se reprenant rapidement, il saisit doucement mais fermement la main du petit prince.

— « Altesse… Nous devons discuter... longuement de la bienséance. »

Son ton était sévère, mais son visage trahissait un soupçon d'amusement résigné.

Le petit prince se laissa emmener sans protester, jetant un dernier regard espiègle à Jiayi.

— « À bientôt, grande sœur Jiayi ! »

Jiayi éclata de rire, agitant la main avec affection.

— « À bientôt, Votre Altesse. Courage, précepteur Xu. »

Le vieux précepteur grogna quelque chose d'inaudible mais respectueux, tirant le jeune prince avec lui vers une série de leçons visiblement interminables.

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Pendant ce temps, dans la capitale,

Xiaolan et Zhufan, les bras toujours chargés de leurs lourds paniers d'ingrédients et de tissus, se pressaient dans les ruelles étroites.

Leur cœur battait encore fort après ce qu'ils avaient entendu.

Yan Zhao, dans l'ombre d'une vieille taverne, préparait un plan sombre contre Jiayi.

Conscients que leur présence prolongée risquait d'attirer l'attention, Xiaolan murmura précipitamment :

— « Partons vite… Avant qu'ils ne nous voient. »

Zhufan hocha la tête sans hésitation.

Sans attendre davantage, ils firent demi-tour à petits pas précipités, prenant des chemins détournés pour éviter toute mauvaise rencontre.

Leur chemin fut long, mais ils n'échangèrent pas un mot, chacun ruminant ce qu'ils avaient entendu.

Quand enfin les hautes portes familières du manoir Shen apparurent, ils poussèrent un profond soupir de soulagement.

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La nuit tombait, et au manoir, la lumière chaleureuse des lanternes de soie accueillait leur retour.

Dans l'ombre d'une aile oubliée du palais, Yan Zhao, de son côté, peaufinait patiemment son venin.

La tempête se préparait.

Mais pour l'heure, dans la lumière dorée du crépuscule, Jiayi riait encore du souvenir du petit baiser princier, inconsciente des périls qui, une fois encore, tissaient leur toile autour d'elle.