Chapitre 38 — Scandales et lames aiguisées

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Dans l'opulent manoir du marquis Zhao, un silence tendu emplissait le salon principal.

Seul le bruit des pas nerveux de Yan Zhao troublait l'atmosphère. Il allait et venait, les sourcils froncés, les mains jointes dans le dos. L'impatience mordait ses nerfs.

Les assassins qu'il avait envoyés n'étaient toujours pas revenus.

Pas même un messager.

Rien.

Cela ne présageait rien de bon.

— « Pourquoi… pourquoi rien ne bouge ! » marmonna-t-il entre ses dents serrées.

Alors que sa colère montait, des pas légers retentirent.

Su Meilin, sa nouvelle épouse, entra dans le salon.

Ses cheveux étaient encore humides, témoignant de son récent entraînement martial. Contrairement à ce que son apparence douce pouvait laisser croire, Meilin cachait un tempérament de feu.

Elle toisa Yan Zhao avec un mépris à peine voilé.

— « Hmph, pathétique. »

La voix de Meilin claqua dans l'air comme un fouet.

Yan Zhao s'arrêta net, se retournant vers elle.

— « Que dis-tu ? » grogna-t-il.

Meilin croisa les bras sous sa poitrine, son regard noir brillant de défi.

— « J'ai dit que tu es pathétique, Yan Zhao. Tu n'es même pas capable de faire aboutir un plan aussi simple. Envoyer quelques assassins et même cela échoue ! »

Les mâchoires de Yan Zhao se crispèrent sous l'insulte.

Sa patience explosa.

— « Tais-toi, Meilin ! » hurla-t-il, sa voix résonnant dans toute la pièce. « Ce n'est pas à toi de me dire ce que je dois faire ! »

Meilin ne broncha pas. Elle le fixa, glaciale.

— « Ce n'est pas l'homme que j'ai épousé. » dit-elle d'une voix tranchante.

— « Où est passé celui qui avait l'assurance d'un conquérant, la détermination d'un chef ? » Elle plissa les yeux. « Serait-ce cette… Jiayi qui t'a réduit à cet état lamentable ? »

À cette accusation, Yan Zhao baissa les yeux, incapable de répondre.

Meilin esquissa un sourire amer.

— « Pitoyable. »

Sans un mot de plus, elle tourna les talons et quitta la pièce, laissant Yan Zhao seul avec sa rage et son humiliation.

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Pendant ce temps, au manoir Shen,

la lumière dorée du matin baignait la cour intérieure.

Jiayi, fidèle à son habitude, s'entraînait à manier son sabre sous le cerisier en fleurs.

Ses mouvements étaient précis, fluides, parfaitement contrôlés. Chaque coup découpait l'air avec une élégance féroce.

Non loin de là, Xiaolan, portant un plateau couvert de mets appétissants, s'approcha timidement.

— « Mademoiselle Jiayi… » murmura-t-elle.

Jiayi abaissa son sabre, essuya la fine sueur de son front et s'approcha avec un sourire.

— « Merci, Xiaolan. Tu es toujours aussi attentionnée. »

Alors qu'elle allait tendre la main vers son petit-déjeuner, un cri tonitruant retentit à l'entrée du manoir.

— « SHEN JIAYI ! SORS IMMÉDIATEMENT ! »

Xiaolan sursauta, manquant de faire tomber le plateau. Jiayi, elle, haussa légèrement un sourcil, presque amusée.

— « Voilà qui promet d'être divertissant... »

Avec calme, elle reposa son sabre, s'essuya les mains, et se dirigea vers l'entrée.

Là, le père du marquis Zhao, un homme au ventre proéminent et au visage rougeaud, tempêtait, escorté de sa femme, la marquise Zhao, une matrone guindée à l'air hautain.

À leur vue, Jiayi resta imperturbable, droite et sereine.

Le vieux marquis, fulminant, cracha :

— « Une jeune femme comme vous n'a pas à se conduire ainsi ! À manier l'épée comme un homme, à salir votre nom dans les rues ! Votre place est à la maison, à servir votre mari dignement ! »

Un murmure d'indignation parcourut les quelques serviteurs rassemblés à distance respectueuse.

Mais Jiayi ne perdit rien de son calme.

Elle fixa froidement le vieillard et répliqua, d'une voix polie mais coupante comme une lame :

— « Je suis Général Shen Jiayi, la seule descendante du clan Shen. »

Elle s'avança d'un pas, et son regard devint tranchant.

— « Vous dites que ma place est de servir ? Pendant trois longues années, je vous ai servi, vous, votre fils, et votre épouse, comme une moins que rien. »

Le vieux marquis ouvrit la bouche, prêt à répliquer, mais Jiayi continua, implacable :

— « Et lorsque votre fils est revenu avec une femme inconnue, devais-je encore baisser la tête et servir, m'humilier davantage ? »

Un silence de plomb s'abattit sur l'assemblée.

Les veines du vieux marquis saillirent sur son front. Il était rouge de colère, mais aucun mot ne franchit ses lèvres.

Voyant cela, Jiayi se tourna vers la marquise Zhao, le sourire aux lèvres, mais son regard dardait de venin.

— « Quant à vous, Marquise Zhao, si tant est que ce titre vous convienne encore... » dit-elle, douce comme du miel mais chaque mot portait un poison mortel,

— « si vous aimez tant donner des ordres, vous pouvez bien reprendre ma place d'autrefois : vous agenouiller chaque jour pour servir votre fils, votre belle-fille et votre mari. »

La marquise Zhao blêmit, ses lèvres tremblèrent sous l'affront.

Jiayi fit un dernier pas, réduisant la distance entre eux.

— « Et si votre langue continue à remuer plus que de raison, il se pourrait qu'elle vous attire plus de malheur que vous ne sauriez le supporter. »

Les deux Zhao tremblaient de rage mais n'osaient pas répliquer.

L'aura imposante de Jiayi était trop forte, trop éclatante.

Ils reculèrent finalement, battus sans avoir pu élever une véritable résistance.

Sous les regards ahuris des serviteurs du manoir Shen, les Zhao repartirent, la tête basse, le visage tordu de honte.

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De retour dans la cour,

Jiayi laissa échapper un léger soupir et s'assit enfin pour déguster son petit-déjeuner.

Xiaolan, qui avait tout vu depuis une fenêtre, accourut avec des yeux brillants d'admiration.

— « Dame Jiayi… vous étiez si impressionnante ! »

Jiayi sourit doucement.

— « Ce n'était rien. Quand on a la vérité de son côté, il suffit de ne pas baisser la tête. »

Mais au fond d'elle, Jiayi savait que cet affront public n'était qu'un prélude.

Yan Zhao…

Le vieux marquis…

Même Su Meilin...

Tous devenaient des pions dans un échiquier beaucoup plus grand.

Et Jiayi, elle, comptait bien tirer les ficelles du jeu.

Sous la lumière éclatante du matin, elle leva les yeux vers le ciel.

L'heure de reprendre l'honneur des Shen était venue.