Chapitre 43 — Les prémices de la tempête

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Sous le clair matin où la brume flottait encore entre les toits, Jiayi observait son jardin, le vent doux jouant entre les branches fleuries.

À ses côtés, Xiaolan attendait sagement, un panier entre les mains.

— « Xiaolan, » dit Jiayi d'une voix posée, « il est temps de préparer un présent pour l'anniversaire de Sa Majesté. »

La jeune servante releva la tête, légèrement surprise.

— « Un cadeau, Mademoiselle ? »

Jiayi esquissa un sourire délicat.

— « Oui. Il serait discourtois d'assister au banquet sans offrande… Et puis… »

Elle laissa flotter ses paroles, son regard brillant d'une lueur indéchiffrable.

— « …un cadeau bien choisi peut semer plus de graines qu'une armée. »

Xiaolan hocha vivement la tête, prenant note avec sérieux.

— « Que devons-nous préparer ? »

Jiayi réfléchit quelques secondes avant de répondre.

— « Prend le coffre au bois taillé dans la salle de Trésor. »

Xiaolan s'inclina avant de s'élancer pour tout préparer, le cœur serré d'excitation et d'appréhension.

***

Pendant ce temps, dans les appartements somptueux de l'Impératrice Mingzhu, l'atmosphère était bien différente.

Assise à sa coiffeuse, parée d'une robe de soie bleu nuit brodée d'argent, Mingzhu fixait son reflet, peignant lentement ses cheveux noirs d'encre.

Derrière elle, debout dans l'ombre, le Ministre Jiang, son frère de sang, échangeait avec elle à voix basse.

— « Ce banquet, » murmura Jiang, « sera encore une fois marqué par la présence de Jiayi. Les regards convergeront vers elle, je n'en doute pas. »

Mingzhu sourit légèrement, son expression aussi coupante qu'une lame de jade.

— « Laisse-les la regarder, » répondit-elle d'une voix douce, « plus l'on porte attention à une fleur, plus la chute de ses pétales est dramatique. »

Elle reposa son peigne avec délicatesse.

— « Patience, frère. Lors du banquet… »

— « Je ferai en sorte que sa beauté se flétrisse devant toute la cour. »

Jiang hocha la tête, mais l'inquiétude traversa son regard un instant. Il savait que Jiayi n'était pas une proie facile.

Cependant, Mingzhu semblait si sûre d'elle que son doute s'évanouit dans un souffle.

***

Dans une aile plus tranquille du palais, sous une véranda baignée de lumière, le petit prince héritier s'appliquait à recopier des caractères, sa petite langue tirée sous l'effort.

Non loin, assis à une table basse, le précepteur Xu, sage et moqueur à ses heures, surveillait son travail d'un œil malicieux.

Au bout d'un moment, le prince posa brusquement son pinceau et regarda Xu avec impatience.

— « Maître Xu ! » s'exclama-t-il, « Est-ce que Grande sœur Jiayi sera présente au banquet ? »

Xu haussa un sourcil, un sourire narquois étirant ses lèvres fines.

Sans répondre immédiatement, il tendit la main et tap — donna une légère pichenette sur le front du prince.

— « Si tu termines correctement tes révisions, » dit-il en riant, « peut-être que les dieux t'accorderont cette faveur. »

Le petit prince, frottant son front en riant, se remit au travail avec une énergie redoublée.

Dans son regard brillant, une lueur enfantine et admirative dansait au nom de Jiayi.

***

De son côté, l'Empereur Nangong Liwei se tenait seul sur la haute terrasse de son pavillon personnel.

Les mains croisées derrière son dos, il contemplait le ciel immense où les nuages couraient, poussés par les vents d'été.

Un sourire, discret mais empreint d'une certaine anticipation, joua sur ses lèvres.

— « Ce banquet… » pensa-t-il, « sera peut-être plus divertissant que prévu. »

Ses yeux brillèrent d'une lumière malicieuse.

Car il savait que sous les parures dorées et les sourires polis, des lames seraient dégainées… en silence.

***

Dans les rues étroites de la capitale, l'agitation montait.

Les commerçants parlaient à voix basse, les nobles restaient cloîtrés, et les soldats redoublaient de vigilance.

La rumeur enflait comme un incendie : Mu Heng, le roi barbare, sera au banquet.

Certains disaient qu'il était venu négocier une alliance.

D'autres, plus pessimistes, murmuraient que c'était un prélude à une attaque, que ses guerriers attendaient, tapis aux frontières.

Dans les tavernes, dans les marchés, dans les maisons, la peur suintait à travers chaque mur.

— « Ce démon du Nord n'apporte que mort et désolation ! »

— « Comment l'Empereur ose-t-il l'inviter ici, au cœur de notre empire ?! »

Même les enfants, habituellement insouciants, jouaient à des jeux de guerre où l'un d'eux, désigné Mu Heng, était toujours vaincu à la fin.

Mais sous ces jeux, sous ces rumeurs, une tension sourde s'étirait… Comme la corde d'un arc sur le point de se rompre.

***

Dans son manoir tranquille, Jiayi traçait d'un geste léger les premiers caractères du poème qu'elle offrirait.

À la lueur d'une lanterne de soie, ses traits semblaient sculptés dans la lumière.

Chaque mot, chaque mouvement, était une prière silencieuse tissée dans le calme avant la tempête.

Elle savait.

Elle savait que ce banquet ne serait pas un simple festin.

C'était une arène.

Et elle, quoi qu'en pensent ses ennemis, n'était pas une fleur fragile vouée à se faner.

Elle était la mer endormie, et lorsque l'heure sonnerait… elle soulèverait des vagues capables d'engloutir même les montagnes.