Chapitre 3 : L’Éveil du Lotus Silencieux

Le soleil n'était pas encore levé quand Yi Haoyu ouvrit les yeux.

Pas parce qu'il avait mal dormi.

Mais parce que le silence de l'aube était propice à l'entraînement.

Il se redressa dans son lit de paille, observa ses mains un instant — des mains encore frêles, mais dans lesquelles coulaient les souvenirs et l'énergie d'un Empereur de jadis.

> Je dois fortifier ce corps… sinon il ne tiendra pas la pression du Qi céleste.

Il sortit sans faire de bruit, enjambant le plancher usé de la vieille maison de bois. Dans la cour, l'air était frais, et le ciel étoilé n'avait pas encore cédé au jour. Il prit une profonde inspiration.

Puis il commença.

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La Danse des Ombres du Matin

Haoyu ferma les yeux et forma un mudra ancien de la Voie Interne.

L'air autour de lui sembla se figer, l'herbe se mit à frémir, et le sol émit un très léger tremblement.

> Posture du Lotus Flottant.

Son corps glissa en souplesse d'un mouvement à l'autre. Des formes circulaires, lentes mais précises. Ses pieds frôlaient à peine le sol, tandis que ses bras traçaient des arcs invisibles dans l'air.

Chaque respiration était profonde, chaque geste calculé, nourri d'un savoir qui transcendait les âges.

Mais ce corps… ce corps résistait encore.

Il transpirait. Son cœur battait plus vite que prévu. Ses muscles tremblaient.

> Trop faible encore. Mais demain, ce sera mieux.

Il se laissa tomber assis, croisa les jambes, et entra en méditation profonde.

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La Vie Familiale d'un Immortel Réincarné

Quand il rouvrit les yeux, le ciel était devenu d'un bleu pâle. Des senteurs de pain chaud s'échappaient de la cuisine.

— Haoyu ! cria une voix douce. Tu t'entraînes déjà ?

Yi Lian se tenait dans l'encadrement de la porte, une serviette posée sur l'épaule. Sa longue chevelure noire était nouée en une tresse simple, et ses yeux brillaient d'une chaleur familière.

— Viens manger, papa a fait chauffer la marmite tôt ce matin !

Haoyu hocha la tête et la rejoignit.

À l'intérieur, son père, Yi Rong, un homme robuste aux épaules larges et aux mains calleuses, s'affairait près du feu. Il tourna la tête et lança un sourire fier.

— On dirait que mon fils prend enfin ses responsabilités au sérieux ! Tu nous prépares quelque chose, hein ?

— Peut-être bien, répondit Haoyu, énigmatique.

Autour de la table, l'ambiance était chaleureuse. Le brouet fumant, les rires de Yi Lian, les paroles du père… tout cela était étrangement doux pour quelqu'un qui avait connu des siècles de solitude impériale.

Et pourtant, il y avait une chose qu'il n'avait pas ressentie depuis des centaines de vies : cette paix intime, cet attachement invisible à ceux qui vous aiment sans condition.

> Dans cette vie… je protégerai ces liens.

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Les Jours Passent — Le Corps Se Renforce

Durant la semaine qui précéda l'épreuve, Haoyu poursuivit discrètement son entraînement. Il sortait tôt, rentrait tard. Il méditait sous les cascades, courait dans les bois, forgeait son Qi lentement mais sûrement.

Il réapprenait les lois du monde comme un élève humble.

Yi Lian le surveillait, silencieusement inquiète.

— Tu as changé, petit frère, lui dit-elle un soir alors qu'ils observaient les étoiles.

— En mieux ?

— En… différent. Plus calme. Plus posé. Parfois, on dirait que tu regardes le monde avec les yeux d'un vieillard.

Haoyu sourit, mais ne répondit pas.

> Si seulement tu savais…

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Le Grand Jour

Le matin de l'épreuve arriva.

Le village s'éveilla bien avant l'aube, l'excitation dans l'air était palpable. Tous les enfants en âge de participer se réunirent sur la grande place, accompagnés de leurs familles.

Haoyu se tenait en retrait, bras croisés, regard posé sur le cristal. Autour de lui, les autres adolescents chuchotaient. Certains ricanaient.

— T'as vu Yi Haoyu ? Il a l'air ailleurs depuis des jours.

— C'est le fils du forgeron, non ? Je parie qu'il finira forgeron aussi.

— Il a même pas commencé à cultiver. Il n'a aucune chance.

Il n'y prêta pas attention. Ces paroles n'étaient que des échos lointains, insignifiants. Il avait entendu bien pire. Il avait vu des empereurs tomber, des étoiles mourir. Un commentaire d'un enfant… n'était qu'un souffle.

À ses côtés, Yi Lian lui ajusta doucement le col de sa tunique.

— Même si tu ne réussis pas, sache qu'on est fiers de toi.

Il tourna les yeux vers elle.

— Merci, grande sœur.

Elle cligna des yeux. Ce ton… ce regard… Ce n'était pas le petit garçon qu'elle avait vu tomber mille fois.

C'était un homme.

— Tu vas réussir, pas vrai ?

— Plus que ça, répondit-il. Je vais changer le cours du monde.

Elle éclata de rire.

— Tu rêves toujours trop grand.

Il sourit en silence.

> Ce n'est plus un rêve. C'est un destin.

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L'Arrivée des Maîtres

Les deux Maîtres de l'Académie firent leur apparition comme la veille : robes célestes, port droit, regards tranchants.

La foule se tut à leur approche.

Le Maître Yan s'éclaircit la gorge.

— Aujourd'hui, nous testerons à nouveau ceux qui sont prêts. Ceux qui oseront s'avancer devant le Cristal d'Éveil. Les cieux observeront. Et peut-être… vous choisiront.

Haoyu avança parmi les autres.

Calme. Stable.

Mais dans son cœur, une tempête grondait.

> Le moment est venu.