CHAPITRE 11 : L'APPEL DE L'ABÎME

Kael se tenait sur le sommet de la montagne du Vide, seul, entouré par l'immensité de l'horizon. Le vent hurlait autour de lui, soufflant des éclats de neige sur sa peau. Il ferma les yeux et sentit le froid pénétrer jusqu'à ses os. Mais ce n'était pas la morsure du vent qui le frappait, c'était la présence du Vide. Cette énergie obscure, qui bouillonnait dans ses veines, prête à le consommer tout entier.

« Kael, pourquoi hésiter encore ? » La voix de l'épée résonnait dans son esprit, chaque mot un appel de plus vers l'abîme. « Regarde autour de toi, tout est éphémère. Lève-toi, embrasse le Vide, et tout sera à toi. »

Les mots résonnaient comme un chant funèbre, chaque syllabe frappant son cœur comme un marteau. Il savait que chaque moment qu'il passait à hésiter, l'appel du Néant devenait plus fort. L'ombre n'était pas qu'une énergie, elle était une entité vivante, un tourment silencieux qui cherchait à engloutir son âme.

Kael inspira profondément, ses poumons se remplissant de l'air glacial. Il savait qu'il ne pouvait plus fuir. À chaque jour passé dans l'incertitude, la tentation devenait plus grande. Il se souvenait des paroles de Mo Bei, de la promesse d'un équilibre fragile. Mais le pouvoir qu'il ressentait, ce pouvoir qu'il maîtrisait, semblait plus doux que la sagesse des anciens.

Ses doigts frémirent, et une silhouette sombre se matérialisa dans l'air devant lui. C'était l'ombre de l'épée, comme une projection de son pouvoir. Elle s'épanouit en un tourbillon d'énergie noire, se balançant et ondulant autour de lui comme une tempête prête à engloutir tout sur son passage.

« Tu as le pouvoir de détruire, Kael. Pourquoi attendre ? » L'épée chuchota, son ton toujours aussi insistant. « Le monde te craint, mais toi, tu es plus fort que tout cela. »

Kael leva la main, et immédiatement l'énergie noire répondit à son appel. Une griffe du Néant apparut dans l'air, déchirant l'atmosphère. Le vent se calma, et l'espace autour de lui se distordit. Mais alors qu'il ressentait cette puissance, un éclat de lucidité traversa son esprit. Il avait vu les conséquences de l'usage de ce pouvoir chez d'autres. Les disciples qui avaient succombé à des forces semblables étaient devenus des ombres, des fantômes de ce qu'ils étaient autrefois. Leur âme avait été engloutie, et ce pouvoir ne laissait que des coquilles vides.

« Et moi, Kael ? » La voix de l'épée murmura. « Que deviendras-tu une fois que tu auras embrassé le Vide ? »

La question, posée sans fioritures, frappa Kael avec une clarté glaciale. S'il prenait cette voie, qui serait-il après ? Un tyran ? Un démon ? Ou simplement une âme perdue ?

Il ferma les yeux, se concentrant sur sa respiration, cherchant à se recentrer. Les dernières paroles de Mo Bei résonnèrent en lui : "L'équilibre est fragile." "Choisis ce que tu veux devenir."

Pour la première fois, il comprit le véritable poids de ce qu'il portait. Le Vide n'était pas simplement un pouvoir, il était une tentation constante, un test de la nature même de l'être humain. Kael savait qu'il ne pourrait pas revenir en arrière une fois ce choix fait.

Il ouvrit les yeux, fixant l'horizon avec une détermination nouvelle. Les étoiles brillaient au-dessus de lui, semblant lui offrir une lueur d'espoir. Mais la voie qu'il allait choisir dépendait de lui seul.