Kael descendit lentement la montagne du Vide, ses pensées plus lourdes que jamais. La brise glaciale mordait sa peau, mais il ne la remarquait presque plus. Il était tout à la fois libéré et prisonnier de sa décision. Il n'avait pas choisi le Vide, mais la route qu'il venait de prendre n'était pas pour autant plus facile. L'équilibre qu'il recherchait semblait aussi insaisissable que le vent.
Ses pas résonnaient dans la forêt silencieuse alors qu'il avançait, chaque bruit éclatant dans la nuit comme un écho de son propre esprit tourmenté. Il avait refusé la tentation du pouvoir absolu, mais un autre fardeau s'était imposé à lui : celui de se prouver qu'il était capable de maîtriser son destin, au lieu de simplement céder à la force brute du Vide.
« Tu penses que tu as choisi la bonne voie, Kael ? » La voix de l'épée résonnait à nouveau dans son esprit, forte, implacable. « Tu crois que la lumière que tu cherches te guidera, mais c'est le Vide qui a la vérité. Tout est temporaire. Tout doit être détruit. »
Les mots de l'épée n'étaient jamais aussi nets qu'à cet instant. Ils frappaient son esprit avec une clarté glaçante, aussi séduisants que dangereux. Mais Kael secoua la tête, repoussant l'influence de l'ombre. Il savait que la véritable force résidait non pas dans la soumission au pouvoir, mais dans sa capacité à résister à ses propres désirs. Il devait être plus que la somme de ses pulsions.
Soudain, un cri perça la nuit. Un cri de terreur. Kael se figea, son cœur battant plus vite. La voix était familière, mais il ne savait pas d'où elle venait. Il se précipita en direction du bruit, ses sens aiguisés, en quête de l'origine du cri.
Il arriva bientôt dans une clairière, où il aperçut une silhouette courbée, presque invisible dans l'ombre des arbres. Un homme, entouré de créatures de l'obscurité, des spectres aux yeux rouges, qui semblaient flotter dans l'air comme des âmes perdues.
« Aidez-moi ! » cria l'homme, une épaisse panique dans sa voix. « Elles vont me tuer ! »
Kael hésita. Les créatures étaient des êtres d'ombre, des entités que les anciens craignaient. Elles se nourrissaient de la peur, et leur seule présence suffisait à plonger quiconque dans une terreur absolue. Mais Kael ne pouvait pas ignorer la détresse de l'homme.
« Ne te laisse pas manipuler par ta peur. » La voix du Vide, froide et inflexible, chuchota à son oreille. « Ces âmes sont faibles. Elles méritent de disparaître. »
Kael ferma les yeux un instant, se concentrant sur sa respiration. Il sentait l'appel de l'ombre, mais il savait que ce n'était pas la solution. La peur n'était pas une réponse, elle était un piège.
Il inspira profondément et leva les mains. Une énergie nouvelle, celle qu'il avait presque oubliée, jaillit de son intérieur. Pas le Vide. Pas cette énergie noire, dévorante, mais une lumière pure, douce mais puissante. Les créatures d'ombre se figèrent, leurs corps se déformant sous la pression de la lumière. Kael concentra son énergie dans ses mains et une vague lumineuse se propagea, forçant les spectres à se dissiper, les envoyant disparaître dans les ténèbres d'où ils étaient venus.
L'homme, tremblant de peur, se redressa lentement. Ses yeux fixaient Kael avec un mélange de gratitude et de terreur.
« Merci, merci ! » s'écria l'homme, les yeux écarquillés. « Qui êtes-vous ? »
Kael hésita un instant avant de répondre. Qui était-il réellement ? Un homme cherchant l'équilibre, ou un simple outil du destin, manipulé par des forces qu'il ne comprenait pas pleinement ?
« Je suis juste un homme… » Kael répondit d'une voix faible. « Mais je vais apprendre à ne pas être défini par ce qui me tourmente. » Il tourna les talons et commença à marcher, sans se retourner.
Alors qu'il s'éloignait de la clairière, une partie de lui savait que ce n'était pas la dernière fois qu'il ferait face à une telle tentation. Les créatures de l'obscurité étaient une partie de ce monde, et le Vide n'était jamais loin. Mais il se sentait différent, plus fort de cette expérience. Il avait appris que même dans l'obscurité, il y avait un chemin vers la lumière.