CHAPITRE 18 : LES FLEURS CACHÉES DE LA BRUME

Le monde autour de Kael semblait plus calme. Après la Forge de l'Âme, il avait été ramené dans la vallée de Brumeterre, un lieu isolé où la lumière du soleil ne perçait qu'à peine à travers la brume permanente. Il savait que le calme n'était qu'une illusion. Ses ennemis l'avaient peut-être oublié, mais lui n'avait rien oublié.

Sous ses airs de repli, Kael s'était mis à étudier en secret. Chaque nuit, il gravissait les falaises escarpées pour méditer au sommet, loin des regards. Il refusait de se montrer au monde tant qu'il n'avait pas maîtrisé ce qu'il avait obtenu. Il comprenait enfin : ce n'était pas le moment de briller. C'était le moment de cultiver l'imprévisible.

Au bord d'une rivière cristalline, une jeune femme cueillait des plantes médicinales. Ses gestes étaient précis, délicats. Elle s'appelait Elya, une alchimiste venue de la cité d'Aryliss. Son regard doux cachait pourtant un esprit affûté. Kael l'observait à distance depuis plusieurs jours, intrigué. Il ne savait pas pourquoi, mais il sentait une étrange connexion avec elle, comme si leurs chemins devaient se croiser.

Un matin, alors qu'elle trébucha dans un bosquet de ronces, il surgit en silence, la saisit doucement par la taille pour l'empêcher de tomber, puis disparut aussitôt sans un mot.

« Qui… qui était-ce ? » murmura Elya, confuse mais troublée.

Kael, lui, retourna dans l'ombre. Il ne voulait pas encore dévoiler son identité. Pas avant d'être prêt. Pas avant que ses ennemis soient à portée.

Durant les jours suivants, Elya chercha à découvrir l'identité de son sauveur. Mais personne ne savait qui il était. Kael veillait à masquer sa présence, ne laissant aucune trace, aucun indice. Il se cachait même des villageois, préférant adopter une routine discrète, quasi invisible.

Mais à mesure que les jours passaient, son regard croisait celui d'Elya plus souvent. Et dans ses silences, dans ses gestes discrets, une curiosité mutuelle commençait à fleurir.

Un soir, alors qu'elle chantait doucement près de la rivière, il s'approcha lentement, laissant volontairement ses pas briser une brindille.

Elle se retourna brusquement, croisant enfin son regard.

« C'était toi… »

Il baissa légèrement les yeux, puis répondit calmement :

« Ce n'était rien. Tu aurais fait pareil. »

Elle sourit doucement.

« Tu ne parles pas beaucoup… Mais je sens que tu as beaucoup à dire. »

Kael détourna le regard.

« Pas encore. Un jour peut-être. Quand le moment sera venu. »

Puis, comme un souffle dans le vent, il disparut à nouveau, la laissant seule avec une question persistante.

Pendant ce temps, les anciens clans reprenaient leurs jeux d'influence. Nul ne se doutait qu'au fond des montagnes, un jeune homme affinait ses pouvoirs, construisant brique par brique sa renaissance.

Il serait prêt.

Et lorsque son nom réapparaîtrait dans le monde... ce serait pour ébranler les fondations du pouvoir.