Je restai allongée un moment, les yeux rivés au plafond.
Le silence avait repris sa place, juste entre moi et Lyra.
Un silence pas tout à fait vide…
Plutôt comme un fil tendu, prêt à casser.
— Tu vas te lever ou tu comptes mariner là encore une heure ?
Elle tentait de garder son ton sec, mais sa voix avait craqué à la fin.
— Tu m'as vue ? Je suis un tas de fatigue.
— T'es surtout un tas de mauvaise foi.
Elle tendit la main vers moi. J'hésitai.
Un battement de cœur. Deux.
Puis je la pris.
Elle m'aida à me redresser doucement. Mon corps protestait à chaque mouvement.
Mais je n'ai pas lâché sa main.
On resta un instant comme ça. Elle me regardait. Je le sentais.
Et pour la première fois… je crois que je l'ai regardée aussi.
Pas juste comme un soldat.
Pas comme quelqu'un que j'ai trouvé dans un train.
Mais comme quelqu'un qui me fait rester debout, même quand j'ai envie de tout laisser tomber.
— Tu fais quoi si je meurs demain ?
— T'as décidé de devenir poète, ou c'est juste la fièvre qui parle ?
— Sérieux, Lyra.
Elle serra un peu plus ma main. Juste un peu.
— Si tu meurs…
J'te botte les fesses dans l'au-delà. Alors, évite.
Je ris, doucement. Une douleur me traversa les côtes, mais j'm'en foutais. Pourquoi tu t'attire des ennuis pour moi on ne ce connait pas...pas depuis longtemps
Elle ne répondit rien juste de me faire un petit sourire. Mais pas longtemps. J'ai eu l'impression d'avoir vu une nuance de douleur dans ces yeux
— Debout les larves !
La voix d'Eden résonna dans le couloir.
— Faut plier bagages. On bouge dans vingt minutes.
Je soupirai.
La guerre nous attendait, encore.
Mais j'étais un peu moins seule.
On avançait en silence, les pas lourds dans la terre humide. Le ciel était gris, et le vent transportait l'odeur métallique des ruines.
Je tenais à peine debout. Chaque pas m'arrachait une plainte intérieure. Mais je devais rester droite. Pour moi. Lyra marchait juste devant moi, arme à l'épaule, le regard aux aguets. Rien ne semblait pouvoir l'arrêter.
Puis, soudain, Eden leva le poing.
Tout le monde s'immobilisa.
Un bruit.
Non, deux. Des pas… pas les nôtres.
Trop rapides. Trop nombreux.
Un murmure de voix étouffées… à droite… non, à gauche aussi.
— Planquez-vous ! cria Eden.
Trop tard.
Une détonation éclata à l'arrière. Une grenade.
La terre trembla, des cris s'élevèrent.
Je tombai à genoux, mes oreilles sifflaient.
Quelqu'un hurla mon nom. Lyra ?
Je levai les yeux, et je la vis. Elle courait vers moi, alors qu'une pluie de balles nous cernait.
— Ash ! Bouge pas, j'arrive !
— Non… pars… t'es conne ou quoi…
J'essayais de me relever, mes jambes refusaient.
Mais elle, elle se jeta à terre, roula jusqu'à moi et me couvrit de son corps.
— T'es qu'une idiote, murmurai-je.
— Ouais, mais je suis ton idiote, alors ferme-la.
--- Tu ne peux pas d'arrêter de faire ça . T'es stupide
Elle sortit son arme, tira deux fois. Un cri. Quelqu'un s'effondra pas loin.
On se mit à ramper derrière une carcasse de voiture.
— Tu vas bien ? demanda-t-elle, haletante.
— J'ai mal partout.
Elle posa sa main sur ma joue.
— T'as intérêt à survivre, Ash. Parce que sinon… je t'en veux à mort.
Je n'eus pas le temps de répondre.
Elle se remit debout, le regard dur.