"Les Flammes de la Volonté"

L'informateur de la reine fit irruption dans la cour d'entraînement de l'académie militaire, ses bottes frappant le sol avec assurance. Il s'approcha du professeur en charge des élèves sélectionnés, l'œil froid et l'attitude hautaine.

— Voilà donc le groupe que vous avez formé, lança-t-il avec un rictus moqueur. Ils ont l'air d'une belle bande de bracassés.

Le professeur ne broncha pas, les bras croisés.

— Ne sous-estime pas ces enfants. Dis-moi plutôt, qu’es-tu venu faire ici ?

— Je suis venu les chercher pour leur faire passer leur premier test.

— Comment ça ? C’est moi qui suis chargé d’eux. J’ai déjà préparé leur évaluation.

— Malheureusement pour toi, les ordres viennent directement de la reine. J’ai besoin d’eux pour une patrouille. Des individus suspects ont été aperçus dans la grande forêt du sud. Peut-être que ton petit groupe d’élite servira enfin à quelque chose.

Le professeur serra les dents.

— Cette mission pourrait être dangereuse. Tu devrais prendre des soldats expérimentés.

— Je croyais que c’étaient des prodiges ? Tu t’inquiètes tant pour eux... Tu n’as pas confiance en tes élèves ? Et puis, tu es bien placé pour savoir que la quasi-totalité de nos troupes est déployée aux frontières. Il ne nous reste que le strict minimum pour garder l’ordre en ville. Tu n’as pas le choix. Ce sont les ordres de la reine.

Le professeur soupira profondément.

— Très bien… Aki ! Diran ! Selene ! Kael ! Yuno ! Yura ! Préparez-vous. Vous partez pour votre première mission.

Quelques heures plus tard, le groupe, en tenue de patrouille légère, chevauchait en direction de la grande forêt du sud. L'informateur prit la tête de la colonne, les menant avec une assurance implacable.

— Nous allons entrer dans cette forêt. Formez des groupes de deux. Nous sommes six, cela fera trois groupes. Aki, tu viens avec moi.

Une fois les groupes répartis, l'informateur leur donna ses dernières consignes.

— Si vous tombez sur un ennemi, retenez sa position et venez me l’indiquer. N’engagez pas le combat sauf si c’est absolument nécessaire. Et si vous sentez que vous n’avez aucune chance, fuyez. La forêt est également le repaire de nombreuses bêtes sauvages. Des loups des montagnes ont été repérés récemment. Soyez prudents.

Le groupe se dispersa dans les profondeurs de la forêt.

Premier groupe : Selene (l’archère) et Kael (le noble calme)

À peine avaient-ils parcouru quelques centaines de mètres qu’un hurlement sinistre déchira le silence. Une meute de loups des montagnes – au moins vingt – les encercla dans une clairière. Leurs yeux jaunes brillaient dans l’ombre des arbres, leurs crocs luisants d’écume.

Kael dégaina son épée longue, posée et précise, tandis que Selene ajustait déjà une flèche à son arc.

— Reste derrière, j’ouvre la voie, dit Kael.

Le premier loup bondit. Kael l’évita d’un pas fluide et lui transperça le flanc. Selene décocha une flèche qui se planta dans l’œil du second loup. La meute se jeta sur eux.

Le combat était acharné. Les crocs claquaient, les griffes lacéraient. Kael tenait la ligne de front, son épée décrivant des arcs nets et puissants. Selene, en retrait, décochait flèche sur flèche, chaque tir gagnant en urgence.

Un loup bondit sur Selene, elle roula au sol, sortit une dague et planta la lame dans sa gorge. Kael hurla, frappant deux loups d’un large balayage de son épée. Son bras saignait abondamment, une morsure profonde y était incrustée.

Enfin, après de longues minutes haletantes, la clairière fut jonchée de cadavres. Selene s’adossa à un tronc, haletante. Kael s’agenouilla, le front en sueur.

— On… a survécu.

Deuxième groupe : Yuno et Yura

Plus loin, les deux compagnons marchaient prudemment. Ils tombèrent sur deux tentes installées à l’écart. Le camp semblait abandonné, mais des traces de pas récentes étaient visibles.

Yuno fouilla une tente et découvrit un insigne tribal en os sculpté – celui des barbares. Yura, de son côté, trouva des lanières en cuir et des armes grossières.

— Ce sont bien eux, murmura Yura. Ils sont passés par ici récemment.

Ils quittèrent la zone au pas de course pour prévenir l’informateur.

Troisième groupe : Aki et l’informateur

La confrontation d’Aki : Une nuit dans les flammes

Après que l’informateur ait quitté Aki, le silence de la forêt semblait pesant. L'air était humide, chargé de tension. Le jeune garçon, resté seul, s'efforçait de rester vigilant. C’est alors qu’il aperçut, entre les troncs serrés, deux silhouettes vêtues de capes sombres.

Il voulut aussitôt rebrousser chemin, comme l’informateur le leur avait ordonné. Mais à peine s’était-il tourné qu’un troisième homme apparut dans son dos, surgissant de l’ombre tel un spectre. L’individu masqué, vêtu lui aussi d’une longue cape noire, ne dit pas un mot. Son poing fendit l’air, rapide comme l’éclair.

Aki eut à peine le temps de pivoter, le coup effleura sa tempe. Il recula, titubant.

— « Tss, t’es vif pour un gamin. »

L’homme tira une large épée au métal noir et rugit :

— « Mais tu ne quitteras pas cette forêt vivant, sale fouineur ! »

Sans hésiter, Aki dégaina sa propre lame. Ses muscles tendus, il murmura pour lui-même :

— « T’as frappé le mauvais gars. »

Le choc des deux lames résonna dans la forêt comme un tonnerre. Aki recula d’un pas, surpris par la force brute de son adversaire. L’homme noir multipliait les assauts puissants, visant l’abdomen, les épaules, les jambes. Aki para chaque coup avec difficulté, sentant ses bras vibrer sous la pression.

Mais il ne cédait pas.

D’un bond en arrière, il évita un large balayage horizontal, roula au sol et contre-attaqua aussitôt. Son épée fendit l’air, visant la cuisse de l’ennemi. Le coup fut dévié, mais une entaille fine se dessina sur le tissu noir.

— « Pas mal, gamin… Mais voyons si tu tiens encore longtemps. »

Le mercenaire feinta une frappe descendante, puis pivota et tenta un coup latéral traître. Aki bloqua de justesse, mais la lame mordit légèrement son flanc. Une douleur aiguë le fit grimacer, mais son regard restait fixe, ardent. Il bougea avec plus de prudence maintenant, se servant de son endurance et de sa puissance physique pour garder le rythme.

L’homme noir accéléra, ses coups devenant plus furieux. Une pluie de frappes tomba sur Aki, qui recula à chaque impact, les dents serrées. Il vit une faille — juste un instant — alors que l’homme levait trop haut sa garde. Aki bondit, planta sa lame dans l’épaule de son ennemi, et la retira aussitôt dans une gerbe de sang.

L’homme rugit de douleur, brandit son épée… mais Aki, plus rapide, fit un pivot latéral et lui trancha le bras.

Le cri de l’homme déchira la nuit. Les deux silhouettes plus loin accoururent en direction de la scène.

— « Merde, on l’a trouvé ! »

Comprenant qu’il n’avait plus le temps, Aki asséna un coup rapide à la gorge de l’assaillant, l’empêchant de hurler davantage. Le corps tomba dans un bruit sourd.

Aki se redressa, haletant, couvert de sueur et de sang. Il n’eut que quelques secondes de répit.

Les deux autres ennemis foncèrent sur lui. L’un dégaina une épée fine et courbée, l’autre tendit ses mains — une lueur rougeoyante y naquit.

— « Un mage… » souffla Aki.

L’homme à l’épée chargea, tandis que l’autre lança une première salve de flammes. Aki se jeta de côté, roulant dans la terre humide alors que le feu léchait les arbres autour de lui.

Le duel recommença, encore plus inégal.

L’épéiste était agile, plus technique que le précédent. Aki parait, esquivait, contre-attaquait avec férocité. Mais il devait aussi surveiller les sorts. Une boule de feu passa à un souffle de sa tête, l’éblouissant brièvement.

Un coup le frappa à la jambe. Il grimaça, recula et contre-attaqua dans un cri rageur, plantant sa lame dans le flanc de son adversaire. Mais ce dernier encaissa le coup, dévia l’arme et frappa à son tour au torse. Aki se retrouva projeté en arrière, heurtant un tronc d’arbre.

Son souffle était court, ses bras tremblaient. Du sang coulait de plusieurs entailles. Le mage concentra une énorme quantité de mana, une flamme brûlante jaillissant dans ses paumes.

— « Finissons-en. »

L’épéiste s’approcha, confiant. Aki, à bout, jeta son épée au sol… mais c’était un leurre. Il bondit en avant, attrapa son ennemi à la gorge et le tira violemment contre lui.

— « Lance ton sort, idiot ! » cria-t-il au mage.

— « Quoi ?! »

Trop tard. Le sort partit.

Les flammes dévorèrent les deux silhouettes. Le cri de l’épéiste résonna longtemps, tandis qu’Aki, lui aussi frappé, retomba lourdement au sol, le corps noirci, brûlé, les vêtements en lambeaux.

Il respirait encore, difficilement.

Le mage, terrifié, s’approcha, vit son compagnon calciné, et vit Aki, toujours vivant. Il hurla de rage, invoquant une dernière tornade de feu.

Mais au moment où elle allait frapper… une lame fendit l’air.

Shlaaak !

Le sort fut dispersé d’un coup sec. L’homme en noir chancela, surpris, avant de s’effondrer, la gorge tranchée.

— « Je t’avais dit de ne pas engager le combat, crétin. »

L’informateur essuya sa lame, le regard froid.

Aki, à moitié conscient, murmura :

— « J’ai… survécu… hein ? »

L’informateur s’accroupit, le souleva lentement.

— « T’es peut-être un crétin… mais t’as du feu dans le cœur. »

La forêt était silencieuse à nouveau. Mais elle portait désormais l’odeur âcre du sang et des cendres. Les flammes d’Aki avaient parlé.