Chapitre 32 - Le Matin des Déesses

Elle ne cherche pas la lumière elle la prépare la sert chaude et regarde les dieux la boire comme du lait d'enfance.

Avant l'aube la tour encore endormie la Tour Bleue flottait entre les cieux comme un rêve qui refusait de se dissiper le jardin suspendu gardait les traces de la veille plumes encore en suspens, coussins affalés, nappes froissées par des déesses qui avaient oublié leurs titres pour mieux redevenir elles mêmes.

Morphée dormait encore, roulé dans une couverture étoilée, la bouche entrouverte, ronronnant presque et au centre de tout ce calme une lumière discrète persistante bleue.

dans la cuisine des nuages la pièce flottait au-dessus du monde, comme un souffle en lévitation les casseroles dansaient seules le beurre d’étoile fondait en cadence les crêpes se retournaient d’un coup d’aile cosmique.

Saphira, debout sur un petit tabouret, portait un tablier brodé de lunes, les cheveux noués d’un ruban argenté elle touillait avec soin, goûtait, ajustait les épices d’un geste précis.

Élya, en pyjama d’armure douce, les yeux encore mi-clos, tenait un fouet qui avait décidé de battre tout seul.

— « Tu veux nourrir tout un panthéon aujourd’hui ? » grogna-t-elle entre deux bâillements.

« Oui, » répondit Saphira sans détour, « parce qu’aujourd’hui, elles n’ont à porter que leur appétit. »

Le menu du matin

Crêpes d’azur au sirop d’étoile, légères comme des souvenirs heureux.

Soufflés solaires au pollen sucré, dorés et chantants à chaque bouchée.

Tartines de lune dorée, recouvertes de gelées de fruits oubliés.

Salade cosmique, composée des fruits rares du jardin d’Amaterasu, taillés comme des joyaux.

Lait de nuage à la lavande céleste, servi chaud, dans des tasses qui ronronnaient doucement.

Saphira monta sur la terrasse, une cloche de cristal suspendue entre ses doigts elle la fit sonner un chant s’éleva, composé la veille, tissé entre deux silences Réveille-toi, belle lumière,les ombres ont dormi sous ta pierre un nouveau jour, sans combat,où tu peux rire sans tracas les rayons touchèrent les paupières divines une à une, elles reviennent

Amaterasu fut la première à ouvrir les yeux elle s’étira, paresseuse, rayonnante, les cheveux en bataille.

« Je n’avais pas dormi comme ça depuis… la naissance du feu. »

Héra émergea d’un amas de coussins, confuse elle regarda autour, puis sa couverture.

— « Qui m’a bordée ? »

— « Moi, » répondit Saphira en posant une tasse près d’elle.

Chang’é descendit, pieds nus, les paupières encore mi-closes.

— « On devrait vivre ici toutes. »— « la lune aura besoin d’une successeure alors, » répondit La Mère de l’Ouest, en souriant.

Et La Comtesse Écarlate arriva la dernière elle marchait lentement, robe de chambre noire brodée de roses, un soupçon de sommeil encore sur les cils elle ne dit rien regarda la table s’assit goûta une crêpe rt soupira.

— « Tu m’as eue je reviendrai mais la prochaine fois tu me prépares un thé brûlant, avec une larme de mon âme.»

Saphira haussa les épaules.

— « J’ai mieux une larme de souvenir doux. »

Le calme après la fête pas de débats, pas de décisions à prendre, pas de monde à sauver elles parlaient de recettes, de fleurs, de la première fois où elles avaient dansé seules, sans public, de parfums d’enfance de la peur étrange de ne plus manquer de rien La Comtesse, la fourchette suspendue,murmura à un moment.

— « Je ne me souvenais pas qu’on pouvait rire sans attendre une morsure. »

et Saphira lui tendit simplement une serviette sans rien dire la dernière bouchée

lorsque la dernière tartine fut mangée,lorsque le dernier souffle de lavande monta au ciel,elles restèrent là, sans rien dire La Mère de l’Ouest leva les yeux vers le ciel en disant simplement.

— « Aujourd’hui je ne suis pas immortelle je suis juste vivante. »

Et c’était parfait.

Fin du Chapitre 32 — Le Matin des Déesses