Elle n’a pas besoin d’éclairs pour sauver une vie la radio crachote un signal, sec, déformé par l’urgence "Unité 14 à cendres blanches, on vous envoie un pompier, inhalation massive de fumée, casque fissuré, respiration irrégulière, on arrive dans deux minutes" le silence de la salle d’urgence est balayé d’un coup les stylos s’arrêtent, les yeux se lèvent, et dana noctielle, penchée sur un dossier de routine, reconnaît la voix samuel chef d’unité, trente-quatre ans, père de deux enfants, celui qui passait à l’hôpital en civil, avec des croissants chauds, et qui s’excusait quand il faisait trop de bruit en riant avec les infirmiers dana se fige une demi-seconde puis elle se lève pas comme un éclair, pas comme une déesse comme une médecin elle attrape ses gants, son stéthoscope, et court vers la salle de décontamination, ses pas lourds, précis elle ne pense plus, elle agit la civière entre comme un ouragan contenu des voix crient, les roues claquent sur le sol, les portes battent contre les murs samuel est allongé, inconscient son torse se soulève trop vite, trop faiblement, des marques rouges lacèrent sa gorge, ses paupières tremblent, ses yeux ruissellent de larmes des pompiers en uniforme crient par-dessus les machines "il était à l’intérieur, il a sorti deux enfants, mais une poutre est tombée il a pris une bouffée directe la visière a fondu, il a continué quand même" les mains s’agitent, des tubes, des masques, des moniteurs mais dana ne parle pas encore elle s’avance et ses mains sont calmes masque à haute pression, "Préparez du salbutamol Intubez si la saturation tombe sous 80, on va le stabiliser" une infirmière hésite, un médecin stagiaire tremble mais dana, elle, avance elle pose sa main, lentement, sur la poitrine brûlante de samuel elle ferme les yeux elle écoute et elle choisit dans sa tête, un frisson un instinct ancien, un souffle venu d’un autre monde elle pourrait tout réparer maintenant un seul battement, une onde de vitesse, un éclair rouge, et son corps serait comme neuf, aucune cicatrice, aucune douleur, une bouffée d’éternité dans ses poumons mais elle ne le fait pas "Tu veux être humaine ? alors soigne le comme eux" elle inspire profondément rouvre les yeux regarde les chiffres baisser et elle reste pendant une heure et quinze minutes, dana reste à son chevet elle ajuste les doses, elle encourage l’équipe, elle essuie les larmes, elle soutient sans parler trop fort, elle ne bouge pas pas un tremblement, pas une faille juste une présence le feu dans les poumons de samuel se bat contre le calme dans les mains de dana et puis une toux une inspiration longue, douloureuse, mais pleine les machines s’ajustent le moniteur cesse de crier et samuel ouvre les yeux rouges, humides, mais vivants".…docteur… ?" elle sourit doucement "Re bienvenu" un silence, puis, sans ironie "Vous êtes un idiot… mais un héros" plus tard, dans les vestiaires, seule dana regarde ses mains elles tremblent, enfin le calme est passé, la vitesse revient, non pas dans ses gestes, mais dans son sang elle sort un petit miroir de poche ses yeux rouges brillent d’un éclat qu’elle retient "J’aurais pu le sauver en une seconde" elle ne finit pas sa phrase elle regarde son reflet, il lui rend un visage calme, un peu fatigué, mais debout elle sourit un sourire triste, mais fier "Mais j’ai choisi de le sauver comme une humaine… et je l’ai fait" ce n’est pas la vitesse qui fait la héroïne c’est le choix de rester, de tenir, de soigner même quand courir serait plus facile.
Fin du chapitre 3 — Je peux le faire.