Chap 7 : Le coup de trop

Mike — 99… Qu’est-ce que je fais là… Qu’est-ce que c’était que ça ? Un mauvais rêve ? Un cauchemar ?

Il était là, figé devant la porte, la regardant dans un grand désarroi. La peur, le doute… la peur, le doute ! Ces deux sentiments prenaient le dessus sur lui. Son souffle devenait saccadé.

Voix ? — Res… sai… sit… Je sa...is ce que ça représ...ente pour … mais il faut que tu te… !

Il n'avait pas l'air de l'écouter, mais est-ce qu'il l'entendait vraiment ?

Sa tête résonnait de plus en plus fort, la seule chose qu'il percevait était un bruit strident amplifiant son état mental. Plus il l’entendait, plus sa tête lui faisait mal. Plus elle lui faisait mal, plus le bruit s’intensifiait. Une boucle infernale.

Il était maintenant à terre, se bouchant les oreilles.

On aurait pu croire qu’il en faisait trop pour pas grand-chose. Mais lui était bien touché au plus profond de son être.

Son être ?

Au fond… qui était-il ?

Un simple jeune perdu dans un endroit qu'il ne connaissait pas ?

Il ne savait même pas ce qu'il fichait là, ni comment il y était arrivé…

Mais ce qu'il venait de voir lui réveillait trop de souvenirs. Des souvenirs qu'il aurait préféré oublier.

Oublier ? Pourtant il avait tout oublié en arrivant dans ce monde ?

Voix ? — CALME-TOI !

Sous ce cri qui résonnait dans sa tête, tout redevint silencieux.

Le bruit strident disparut, ses maux de tête s'apaisaient… sans s’éteindre complètement. Il put enfin avoir la force de se relever.

Mike — Merci… Je vais me reposer un peu…

Il posa son sac et s'assit, le dos contre la porte.

✧ ✧ ✧ ✧ ✧ ✧ ✧ ✧ ✧ ✧

Il se releva au bout d'un long moment, après avoir contemplé le vide devant lui.

Il regarda ensuite la porte avec hésitation. Il aurait voulu rester là assis. Mais il n'avait pas vraiment le choix. Il se devait d'avancer.

Il poussa la porte. Rien n'avait changé. Comme d’habitude, la porte disparut de nouveau après son passage.

Il fit quelques pas vers l'appartement où il avait vu la silhouette, puis entra avec un peu de difficulté.

Sur la table, il vit une pile d'enveloppes.

Il les regarda avec étonnement, puis s'en approcha.

Mike — Qu’est-ce que ça fait là ?

Les noms sur les enveloppes étaient illisibles, mais il savait à qui elles étaient destinées. Et pourquoi…

Voix ? — Ce sont les anciennes factures de tes parents, n'est-ce pas ?

Mike — Oui… Ce sont elles. Les impayés… Les charges… Les dettes…

Au moment où il approcha ses mains, les enveloppes tombèrent et s'éparpillèrent sur le sol… sans même qu'il ne les ait touchées.

Mike — Qu'est-ce qu'il se passe… ?

Il se baissa pour pouvoir les ramasser. Mais ses mains les traversaient.

Voix ? — Ce n’est qu’un souvenir. Tu ne peux sans doute pas interagir avec.

En effet, il ne pouvait que les regarder, au sol, en silence.

Mais un bruit brisa ce silence.

Mike — Une sonnerie ? Ici ? Dans ce lieu ?

Il entendait une vieille sonnerie sourde résonner.

Elle se rapprochait. Il cherchait partout... mais rien. Aucun appareil, aucun objet.

Voix ? — Là, sur la table !

Un objet commençait à apparaître.

Voix ? — C’est un téléphone fixe.

Un téléphone fixe sonnait.

Mike voulut décrocher, mais sa main le traversa.

Mike — Encore quelque chose d’intouchable !

La sonnerie s’arrêta, remplacée par une voix d’homme, la trentaine ? La quarantaine ?

Homme au téléphone — Bonjour Mr et Mme “__”, comme d'habitude, vous ne répondez pas. C’en est vraiment fatigant ahah. Vous nous devez de l'argent. Vous aviez promis de payer, et vous continuez de nous fuir. Je vais finir par envoyer mes hommes. Vous habitez au “__” rue “__”, n’est-ce pas ? C'est facile à trouver. Je sais que vous ne tenez pas beaucoup à votre enfant, mais faites bien attention à lui. ahah bip bip

Sous les derniers bips, le message s'arrêta.

Mike recula lentement… et prit son couteau.

Mike — Qu’est-ce que c’était… ?!

Il eut à peine le temps de se poser la question…

La silhouette était de nouveau là, le fixant.

Mère ? — Tu as donc tout entendu… Tu n'aurais jamais dû le savoir !

Elle faisait de grands gestes en parlant.

Mère ? — Regarde le sol ! Je t'avais dit de ne pas toucher au courrier, il n’est pas pour toi ! À moins que tu puisses payer tout ça ? C’est la faute de ton père !

Chaque mot était brut, dur, froid, sans compassion.

Elle s'approchait en continuant son monologue.

Voix ? — Reste calme. Ne t’inquiète pas, elle ne peut rien te faire.

Mike — Oui… Merci, c'est compliqué… mais je vais essayer.

Il restait calme. Il refusait de se laisser emporter par ses émotions.

Mère ? — Tu parles encore tout seul ? Ai-je vraiment donné naissance à un fou ?

Comme l'armure auparavant… elle n'entendait pas la Voix ?

Mike était donc le seul à pouvoir l'entendre.

Mère ? — Un incapable ? Un fainéant ? Depuis ta naissance, je m'occupe de toi ! 14 années à m'occuper de toi pour rien ?

Ses mots résonnaient dans son esprit.

Mais une parole attira particulièrement son attention.

Mike — 14 années ? Pourtant j'ai 16 ans…

Il en était sûr. Alors comment se fait-il qu'elle lui donnait moins ?

Parce qu'au final ce n'était qu'une image du passé ? Un souvenir déformé ? Un écho enfoui ?

Il réfléchissait, troublé.

Puis, dans un instant d'inattention, elle le toucha.

Pourtant elle n'était pas censée pouvoir…

Mais il n'eut pas le temps de réagir.

??? — On l'a déjà fait une fois ! On peut très bien le refaire, non ?

À partir de ce moment-là, il ne contrôlait plus son corps.

Le couteau dans sa main se planta dans la poitrine de la silhouette.

Encore. Et encore. Plusieurs coups, violents, incontrôlés. Sa main lâcha l’arme. En face de lui, elle s'effondra dans un grand fracas.

Au moment où il reprit le contrôle de son corps, il ne put que tomber à genoux.

Incapable de comprendre. Incapable de parler, sinon pour répéter les mêmes mots…

Mike — Non… Ce n’est pas moi qui l’ai tuée ?! Ce n’est pas moi… Ce n’est pas moi… Ce… pas...

Des images de sa mère défilaient dans sa tête.

Le traumatisme resurgissait. Des larmes coulaient.

Une tristesse incommensurable l’écrasait.

Il cligna des yeux avec peine sous le poids des larmes.

Et de nouveau… il était devant une porte.