Lysaria fixait ses mains, encore parcourues de veines rouges palpitantes. L’histoire que Seira venait de raconter avait laissé un écho étrange dans sa poitrine. Un frisson la parcourut.
— "Dites..." commença-t-elle doucement, brisant le silence.
— "J’ai entendu un jour… que dans le passé, y’avait pas que les humains, les elfes et les démons… Il y avait aussi les Ghouls, non ? Les... poules ? Non, les Ghouls."
Seira haussa un sourcil en expirant la dernière bouffée de sa cigarette, un petit sourire nostalgique au coin des lèvres.
— "Bien vu, la princesse. Les Ghouls... c’est un nom qu’on n'entend plus que dans les vieux grimoires."
Luca, de son côté, détourna légèrement le regard, baissant les yeux. Un voile passa sur ses traits. Même sa respiration sembla se faire plus discrète.
Ni Seira, ni Lysaria ne savaient. Pour elles, il était juste... un humain talentueux, doué et curieux.
Mais lui, il le savait. Il savait que sous sa peau, sous ce "sang rouge", autre chose pulsait. Quelque chose de plus ancien.
Seira reprit, s’adossant contre le mur, bras croisés :
— "Les Ghouls étaient différents. Ni totalement humains, ni totalement bêtes. Une race autonome, imprévisible, puissante. Trop puissante. Ils se nourrissaient de mana pur, vivaient dans les zones mortes, là où même les démons n’allaient pas."
Lysaria buvait ses mots, fascinée.
— "Et puis un jour, les humains ont eu peur. Pas peur d’une attaque, non. Peur de leur indépendance. Les Ghouls ne pactisaient pas, ne prenaient pas d’ordres. Ils ne voulaient pas dominer... mais ils vivaient libres. Et c’était ça, leur crime."
Elle fit tomber sa cigarette, l’écrasa sans y penser.
— "Alors les royaumes humains se sont unis. Ils les ont pourchassés, les ont brûlés, décimés. Jusqu’au dernier. Certains disent qu’ils n’ont jamais vraiment disparu. Mais bon, ça... c’est le genre de légende qu’on raconte pour se faire peur."
Luca ferma un instant les yeux.
Ses doigts serrèrent légèrement le tissu de son pantalon.
Il se souvenait des mots d’un vieux prêtre, il y a longtemps, bien avant Kael’Zar :
« Tu es l’un des derniers, Luca. Alors garde le silence. Et souris. »
Et c’est ce qu’il avait fait.
Un sourire léger étira ses lèvres, calme, comme toujours. Il n’ajouta rien.
Skylander, toujours invisible, observait depuis le haut d’une étagère, ses yeux rouges brillant d’un éclat amusé.
— "Tu te caches bien, mon petit roi des cendres."