À l’époque où l’Empereur de l’Épée était encore appelé l’« Épée du Vent ».
Alors que le Seigneur du Clan Tang s’était absenté pour affronter une Véritable Porte des Démons apparue près du Sichuan, le Dragon Noir, accompagné de son armée, lança une attaque surprise contre le Clan Tang.
Le Dragon Noir était un artiste martial ayant dépassé le royaume du sommet, et son armée, l’Armée du Dragon Noir, se composait de plusieurs centaines de combattants de premier ordre.
Ils avaient prévu de dévorer le Clan Tang et de conquérir tout le Sichuan durant l’absence de leur Seigneur. Et il ne faisait aucun doute qu’ils avaient amplement le temps avant que ce dernier n’apprenne l’invasion et revienne.
Si la chance ne leur avait pas souri, le Clan Tang aurait pu cesser d’exister ce jour-là.
Mais, comme le destin l’avait voulu, le Dragon Noir n’avait pas pris en compte la présence de l’Épée du Vent dans le clan à ce moment-là.
Ce qui s’ensuivit fut une scène que peu croiraient s’ils ne l’avaient pas vue de leurs propres yeux.
Les centaines de soldats composant l’Armée du Dragon Noir, ainsi que le Dragon Noir lui-même, furent tous massacrés par l’Épée du Vent.
Les gens, observant de loin l’Épée du Vent affronter à lui seul toute une armée, disaient que bien que sa lame dansante fût aussi belle que le croissant de lune, elle ne laissait derrière elle que mort et carnage.
Quand ce désastre s’acheva enfin et que le Dragon Noir et son armée furent vaincus, seule l’Épée du Vent restait debout.
En signe de reconnaissance, le Clan Tang forgea une épée pour l’Épée du Vent.
Wi Hyogun porta cette épée même après être devenu l’Empereur de l’Épée.
L’Épée de Clair de Lune.
C’était une lame façonnée par les plus grands forgerons du monde.
Mais au lieu de manier cette beauté…
« C’est juste un balai. »
Entre les mains de Wi Hyogun, elle servait de balai.
… Est-ce que c’est vraiment normal ?
__________
Il était un peu plus de 15 heures.
Assis au sol, j’appréciais la chaleur apaisante du soleil.
Je devais sûrement ressembler à quelqu’un en pleine méditation,
Mais en réalité, j’observais le dos d’un homme qui balayait vigoureusement la cour.
Un vieil homme aux cheveux gris et au dos voûté balayait lentement, mais avec vigueur.
C’était difficile à croire, mais cet homme, c’était l’Empereur de l’Épée.
« …Je n’arrive toujours pas à croire que l’Empereur de l’Épée nettoie ma cour avec un balai… »
Est-ce que c’était vraiment acceptable ?
Deux jours s’étaient écoulés depuis que l’Empereur de l’Épée et Wi Seol-Ah étaient devenus mes domestiques.
J’avais l’impression d’avoir perdu la tête durant ces deux jours.
J’avais demandé à l’intendant pourquoi ils étaient soudainement venus travailler comme mes serviteurs, et…
C’était un ordre du Seigneur.
C’est tout ce qu’il avait dit. Honnêtement, je m’y attendais un peu.
Et bon, ce n’est pas comme si je pouvais faire irruption dans la chambre du Seigneur pour m’en plaindre.
Attends… Peut-être que j’aurais dû quand même me plaindre ?
J’avais plein d’idées, mais aucune décision claire. Pendant ce temps, le temps passait, indifférent à mes états d’âme.
Est-ce que je pouvais vraiment laisser les choses ainsi ?
Peut-être qu’une petite crise pour les faire partir aurait été préférable pour mon avenir…
Mais je ne pensais pas avoir assez de vies en stock pour m’attirer les foudres de l’Empereur de l’Épée, alors j’ai abandonné cette idée.
Je remarquai un autre problème en détournant le regard de l’Empereur de l’Épée.
« Seol-Ah, c’est dangereux de porter tout ça seule ! Tu veux que je t’aide ? »
« Non ! Seol-Ah peut le faire toute seule ! »
« Hé, Seol-Ah ! Devant toi… ! »
« Hein ? Kyaa ! »
« … »
Je détournai les yeux.
Wi Seol-Ah semblait aimée et traitée comme une petite sœur parmi les serviteurs,
Mais honnêtement ?
Elle était exécrable pour les corvées.
Est-ce vraiment possible d’être aussi nulle en tâches ménagères quand on a autant de talent physique en tant qu’artiste martiale ?
Même là, elle venait de faire tomber toute la lessive en essayant de la porter.
Les autres domestiques durent la réconforter pendant qu’elle pleurait.
Mais bon, ça ne rendait pas la lessive toute propre, maintenant pleine de poussière…
La seule consolation, c’est que ça s’était produit avant qu’on ne la lave.
Alors que je soupirais et m’apprêtais à me lever…
Wi Seol-Ah courut vers moi dès qu’elle me vit debout.
« Pourquoi tu ne continues pas ton travail ? »
« On m’a dit de toujours suivre le jeune maître ! »
« …Qui t’a dit ça ? »
« Mon grand-père ! »
« …Je vois. »
Pourquoi il lui a dit ça…
Je pense qu’ils voulaient me donner une servante personnelle.
Mais honnêtement, pour moi, c’était juste une excuse.
Les autres domestiques la traitaient bien parce qu’elle faisait les corvées qu’ils détestaient.
Bon, c’est vrai aussi que Wi Seol-Ah avait détendu l’ambiance pesante en arrivant comme servante.
Mais même ainsi, je suis l’enfant d’une famille plutôt aisée, alors est-ce vraiment approprié de choisir une servante personnelle aussi à la légère ?
L’intendant devait être impliqué.
Mon père et l’intendant sont-ils au courant de la véritable identité de Wi Moon, alias l’Empereur de l’Épée ? Ou bien ont-ils juste choisi des serviteurs au hasard à cause du nombre de démissions ?
Il n’y avait aucune chance que l’intendant ignore ce qui se passe dans le clan, donc il devait y avoir une raison,
…Mais c’est probablement la deuxième option.
Wi Seol-Ah tenta de réajuster mes vêtements, mais je lui dis que j’allais le faire moi-même. Elle était bien trop maladroite.
Je vis ses yeux s’humidifier, déçue d’avoir été repoussée.
Mais je ne pouvais vraiment pas lui faire confiance là-dessus pour l’instant.
Non, est-ce que c’est même correct de lui donner ce genre d’ordre ?
J’avais peut-être beaucoup de temps libre, mais je devais encore me dépêcher.
Une des raisons pour lesquelles je sortais de la maison, c’était ça.
J’envoyai Wi Seol-Ah auprès des autres domestiques lorsqu’elle voulut me suivre dehors.
C’était facile de la convaincre : elle était encore trop maladroite dans son travail.
Wi Seol-Ah afficha un air abattu, triste de ne pas pouvoir m’accompagner.
Je ne savais pas quoi faire d’elle.
Je ne pouvais pas la traiter comme n’importe quel serviteur, mais la traiter différemment était tout aussi compliqué.
Je croisai le regard de l’Empereur de l’Épée au moment où je quittais la maison.
Il s’inclina respectueusement devant moi.
Je pressai le pas, mal à l’aise.
Dehors, mon garde du corps Muyeon m’attendait.
« J’ai entendu dire par l’intendant que vous alliez sortir. »
« Ça ne prendra pas longtemps, je rentrerai probablement avant le coucher du soleil. »
« Compris, jeune maître. »
Il ne posa pas d’autres questions. Un vrai professionnel, clairement bien formé.
C’est juste triste qu’il soit devenu mon garde du corps…
Après un court trajet, j’atteignis l’endroit où j’avais rencontré Wi Seol-Ah pour la première fois.
Je l’avais ressenti la dernière fois aussi, mais à quel point suis-je mal entraîné pour être aussi essoufflé après si peu ?
Je voulais faire une pause, mais je devais me presser pour rentrer avant le coucher du soleil.
Je traversa la rue bondée et m’enfonça dans de petites ruelles.
Muyeon me dit que l’endroit était dangereux, mais ça ne m’arrêta pas.
« Trouvé. »
Après un moment de recherche, j'ai enfin trouvé le bâtiment que je cherchais.
Il semblait vieux et délabré, mais c’était bien celui-là.
« J’avais peur qu’il n’existe pas encore à cette époque, mais je me suis inquiété pour rien. »
« Jeune maître… Pourquoi être venu ici ? »
« Pourquoi ? Cet endroit te paraît bizarre ? »
« Honnêtement, oui… L’atmosphère est étrange, et le bâtiment aussi. »
« Tu as un bon instinct. C’est exactement ça. »
– Creeeak.
En ouvrant la vieille porte, tous les regards se tournèrent vers moi.
« Hein, un gamin ? Quelqu’un l’a touché sans qu’on sache ? »
« Dis pas des trucs aussi crades. Il a sûrement pris le mauvais chemin. »
« Et le type derrière lui, avec une épée ? »
Muyeon posa la main sur son arme, sentant l’hostilité dans l’air sombre du bâtiment.
Mais les gens autour ne semblèrent pas s’en soucier.
L’un d’eux m’interpella :
« Hé, gamin, tu t’es perdu dans un quartier dangereux ? »
Cela faisait longtemps qu’on m’avait parlé de cette manière. Mais en vérité, j’étais plus habitué à ça qu’au traitement que je recevais à la maison.
Je répondis avec un léger sourire :
« Pourquoi ? Je suis venu en tant que client, évidemment. »
« Quel petit insolent… Peut-être qu’il apprendra si je lui coupe la langue ? »
Muyeon voulut dégainer, mais je l'arrêta.
« Jeune maître, il ose… »
« Attends une seconde. »
Je m’adressai ensuite à l’homme au sourire menaçant :
« Tu sais probablement qui je suis depuis que j’ai mis un pied ici. Alors calmons-nous. »
Je voulais apaiser les choses, mais je n’avais pas beaucoup de temps.
Son sourire disparut aussitôt.
« Je n’ai pas le temps de tourner autour du pot. Je sais tout sur cet endroit. Alors appelons directement le responsable. Sauf si tu veux que je le détruise. »
Ses pupilles frémirent en entendant ma menace.
Même si je n’avais aucun moyen réel de détruire ce lieu, c’était ma seule carte.
Muyeon demanda, confus :
« …Jeune maître, que se passe-t-il ? »
« Rien d’important. J’allais aller ailleurs à la base, mais il y avait un souci. »
Muyeon aurait-il compris de quel endroit je parlais ?
Il était peut-être plus perspicace que prévu.
J’aurais préféré venir seul, mais avec ce corps, ce n’était pas possible.
« Désolé de t’avoir emmené ici, mais je n’avais pas le choix. »
L’endroit que je visais à la base, c’était la « Secte des Mendiants », qui s’était imposée dans l’Alliance des Dix Sectes uniquement grâce à sa maîtrise de l’information.
Cela aurait été plus simple de passer par eux.
Mais ils n’agissaient jamais si cela leur causait des ennuis.
Sauf contre une grosse somme d’argent.
De toute façon, ce que je voulais faire aurait causé des problèmes à la Secte des Mendiants, donc j’avais dû venir ailleurs.
Si la Secte des Mendiants était la meilleure pour l’information dans la Faction Orthodoxe,
Alors ici, c’était la meilleure source d’infos dans la Faction Non-Orthodoxe :
Le Clan Hao.
J’étais arrivé au Clan Hao.
__________
Il ne fallut pas longtemps pour que je sois correctement pris en charge par le Clan Hao.
L’homme nous conduisit à la cave située derrière le bâtiment.
Muyeon déclara : « Je ne peux pas laisser le Jeune Maître aller dans un endroit aussi dangereux tout seul ! », mais je dus l’ignorer. Je n’avais pas le temps de le convaincre.
Lorsque nous descendîmes à la cave, un jeune homme au visage de serpent nous attendait.
« Je suis le responsable de la branche, Dowoon-Chu. »
Il était incroyablement beau, bien que ce fût probablement un déguisement, sachant que nous étions au sein du Clan Hao.
« Nous ne nous attendions pas à voir quelqu’un comme vous venir ici en tant que client… Nous nous excusons pour notre attitude agressive. »
« Pas besoin de vous excuser. Allez-vous accepter ma demande ? »
« Avant cela, puis-je vous demander pourquoi quelqu’un comme vous, issu du Clan Gu, a choisi de venir chez nous plutôt qu’ailleurs ? »
« Vous posez des questions étranges. Je vous ai dit que je suis venu demander un service. »
« Nous voulons comprendre pourquoi vous avez choisi de venir ici plutôt qu’au Clan des Mendiants. »
Pourquoi ai-je choisi de venir jusqu’à une faction non orthodoxe plutôt que de me rendre au Clan des Mendiants, qui fait partie des factions orthodoxes ?
« C’est une requête que seul le Clan Hao peut accomplir. Pourquoi continuer à poser des questions alors que vous connaissez déjà la réponse ? »
Je répondis d’un ton légèrement agacé. L’homme aux yeux de serpent me sourit.
« Désolé si cela vous a contrarié. Je devais m’assurer, à cause des rumeurs qui courent à votre sujet… »
Il était compréhensible qu’il soit sceptique. J’étais un adolescent qui venait à peine d’atteindre l’âge de quinze ans, et en plus de cela, un adolescent du Clan Gu.
« La seule raison pour laquelle moi, le chef de cette branche, suis venu vous accueillir, c’est à cause de votre nom de famille. »
« Oui, je sais que mon nom porte un certain poids. Mais je vous demande si vous allez accepter ma requête. C’est la troisième fois que je le demande, vous savez ? »
« Le Clan Hao n’a jamais refusé une requête, tant que le prix est approprié. »
Dowoon-Chu me fit signe de parler. Je pouvais enfin exposer ma demande.
« Je cherche une personne. Un garçon âgé d’un peu plus de dix ans. »
Je tendis un morceau de papier à Dowoon-Chu, avec une description de son apparence et la région où il se trouvait.
Dowoon-Chu fronça les sourcils, visiblement perplexe.
« Je ne comprends pas, Jeune Maître. Si vous ne faites que chercher quelqu’un, il n’y avait aucune raison de venir chez le Clan Hao. »
« La région est éloignée, et je connais mal l’endroit. En plus, le Clan des Mendiants est cher. »
Le Clan des Mendiants, aussi réputé soit-il, était connu pour sa grande fiabilité.
Et comme cette fiabilité était élevée, les prix l’étaient aussi.
Si j’avais fait cette même demande au Clan des Mendiants, ils m’auraient probablement facturé deux fois plus, voire davantage.
Cependant, il y avait un problème :
« Jeune Maître, nous n’opérons pas non plus pour des sommes dérisoires. »
Cela ne voulait pas dire que c’était bon marché.
« Je sais. Mais je suis venu ici en sachant que je peux payer. »
Dowoon-Chu regardait toujours le papier que je lui avais donné.
« Ce sera peut-être facile de le retrouver, étant donné que sa description est assez particulière, mais ce n’est pas une tâche aisée : l’endroit est très éloigné de Shanxi, et la zone concernée est immense. »
« Donc, vous êtes en train de me dire que cela va être cher, n’est-ce pas ? »
Dowoon-Chu m’annonça le prix.
Muyeon, qui se tenait derrière moi, eut un haut-le-cœur en entendant le montant.
Combien d’argent de poche faudrait-il que j’économise pour arriver à cette somme ? Rien que d’y penser me fait froid dans le dos.
Mais, cela n’avait pas d’importance.
« Plus nous aurons de mal à le trouver, plus le prix baissera. Mais pour l’instant, le tarif est— »
« Désolé, mais nous ne paierons pas en espèces. »
« …Pardon ? »
Il était déjà dangereux, en soi, pour un homme issu d’une faction orthodoxe de venir jusqu’au Clan Hao pour y faire une requête.
C’était prendre le risque d’être associé à une faction non orthodoxe, tout en portant le nom des Gu.
Mais malgré cela, je m’étais déplacé ici parce que j’étais convaincu qu’ils garderaient cela secret, et qu’ils accepteraient ma demande, quoi qu’il arrive.
« J’ai une information très juteuse. Peut-être que je pourrais payer avec cela. »
« …Jeune Maître, auriez-vous oublié où vous vous trouvez ? »
Évidemment, je n’avais pas oublié. Cet endroit rivalise avec le Clan des Mendiants en termes d’information.
« J’ose même dire, avec confiance, que la quantité d’informations que nous détenons est supérieure à celle du Clan des Mendiants. »
Le Clan des Mendiants était limité dans ce qu’il pouvait faire, contrairement au Clan Hao, qui ne se préoccupait ni de la manière ni des moyens.
Il avait probablement assez confiance en lui pour faire cette affirmation grâce à cette différence essentielle.
« De plus, l’information que vous détenez est probablement quelque chose que nous connaissons déjà. Si vous n’avez pas les moyens de payer, faisons comme si cela n’avait jam— »
« Le Seigneur du Clan Hao. »
Dowoon-Chu s’interrompit brutalement en entendant mes mots.
Son expression, auparavant impassible, se transforma en une peur visible.
« La localisation du Seigneur du Clan Hao, qui a disparu. Vous n’êtes pas curieux ? »
Des lames furent pointées sur moi, venant de plusieurs directions, juste au moment où je terminais ma phrase.