Avant de partir pour leur mission, Ryuko tendit à Ashen, Rook et Raiku une petite puce de communication, que Magi avait customisée en y ajoutant des coques rigolotes (Ashen avait une tête de dragon, Rook un mouton avec des lunettes de soleil, et Raiku une sorte de shuriken pixelisé). Elle leur dit en souriant :
— Vous n'êtes peut-être pas invincibles, mais au moins vous serez joignables. Et... faites attention à vous, ok ?
Raiku, sérieux comme un samouraï prêt au duel, hocha simplement la tête.
Ils emmenèrent le faux Ashen, toujours inconscient, à la base des Épurateurs. C’était Raiku qui le portait, jouant son rôle avec froideur. Pendant ce temps, Ashen et Rook, guidés par une carte que Ryuko leur avait donnée, filaient dans un autre couloir sombre menant vers le cœur de la base ennemie.
Ils arrivèrent dans une salle étrange. Un mini parc y avait été installé, avec des balançoires rouillées, une petite fontaine éteinte, des arbres artificiels en plastique fondus par les radiations.
— Qu’est-ce que c’est que ce... parc ? marmonna Rook.
Un homme s’approcha dans un silence pesant. Le chef. Toujours vêtu de son manteau blanc, l'air plus triste qu'autoritaire. Il regarda le parc, les mains dans les poches.
— Ce parc, dit-il, c’était pour mon fils. Il est mort d’un cancer foudroyant. Il voulait juste aller au parc une dernière fois… mais il est mort la veille.
Silence. Le genre de silence qui rend l’air plus lourd que le béton.
Ashen fronça les sourcils.
— Pourquoi tu nous racontes ça ?
Le chef tourna lentement la tête vers lui. Un éclat cruel brillait dans ses yeux.
— Parce que la bombe qui a détruit votre ville… c’est moi qui l’ai créée.
Ashen, sans un mot, bondit vers lui comme un animal blessé. Mais une ombre jaillit : Louga, encore. Plus rapide, plus violent. Il attrapa Ashen en plein vol et le projeta contre le mur comme une poupée de chiffon.
— Tu ne voulais pas écouter, souffla le chef en quittant la pièce. Louga, occupe-toi d’eux. Et… inutile de jouer les malins avec ton double. Votre ami est déjà en otage.
Louga attrapa Rook et Ashen, les cognant l’un contre l’autre avec une violence presque bestiale. Les deux tombèrent, sonnés. Leur transformation peinait à se déclencher. Ils n’étaient pas prêts. Louga dominait, un titan au regard perdu.
Ashen, la tête contre le sol froid, pensa aux mots de Ryuko. « On ne force pas le feu, on ne le supplie pas. On l’attend. »
Il inspira. Expira. Inspira encore. Lentement.
Puis ses yeux s’ouvrirent. Un éclat de flamme dans les pupilles.
— Quand tu te bats contre un monstre… bat-toi sauvagement !
Il lança une boule de feu dans le torse de Louga, le projetant vers Rook, qui enchaîna avec un coup de genou, suivi d’un uppercut chargé d’énergie. Ensemble, ils frappèrent Louga sans relâche.
Un flash apparut.
— Louga… lui aussi était un humain. Victime. Cobaye. Transformé en loup-garou. Il n’a jamais demandé ça. Juste un soldat, un survivant abîmé.
Louga tomba à genoux. Sa respiration se fit plus humaine. Dans ses yeux, une larme.
Qu’est-ce que j’ai fait… ?
Ashen et Rook, haletants, tombèrent à genoux. Leur transformation s'effaça, laissant place à leur humanité.
Louga, debout malgré ses blessures, marcha lentement vers un bureau. Il prit une carte, revint vers eux, et la tendit.
— Allez sauver votre ami… Pour moi, c’est fini.
Un sourire triste fendit ses lèvres. Il se tourna vers la fenêtre, regarda le soleil irradié une dernière fois… puis se transforma en poussière. Il ne resta que son squelette agenouillé.
Ashen leva son communicateur :
— Papi Ryuk, c’est bon. On a la carte. On va sauver Raiku.
Un silence. Puis la voix rassurante de Ryuko dans l’oreillette :
— Bien reçu, soldats. Vous avez fait du bon boulot.
Rook s’approcha du squelette de Louga. Il retira sa veste et la posa doucement sur ses épaules, dernier hommage à un ennemi brisé.
— Repose-toi, frérot-loup.
Ils foncèrent à travers les couloirs, guidés par la voix de Ryuko dans leurs oreillettes. Ashen regarda la carte en courant. C’était une carte d’accès de niveau suprême.
Il fronça les sourcils. Il y avait un nom inscrit dessus.
— Moncu Gin.
Il s’arrêta net. Les flammes dans ses yeux s’éteignirent un instant.
Rook se retourna.
— Qu’est-ce qui va pas ?
Ashen, les dents serrées, répondit d’une voix tremblante :
— Gin… c’est le nom de mon père adoptif.