Chapitre 3 – Lettres sans nom

Au levé du jour 

Syntiche n’avait presque pas dormi. Les phrases du carnet résonnaient encore dans son esprit comme une chanson douce et obsédante. Chaque mot lu la veille s’était imprimé en elle, comme si une part enfouie de sa mémoire cherchait désespérément à refaire surface.

Ce matin-là, la pluie tambourinait doucement contre les vitres. L’atmosphère grise de Bordeaux semblait se synchroniser avec le trouble qu’elle ressentait.

Elle se leva, attrapa le carnet et le posa sur sa table.

La veille, elle s’était arrêtée sur une phrase étrange. Aujourd’hui, elle voulait en savoir plus. Elle se pressa pour faire ses travaux matinal, profita ainsi pour prendre sa douche. 

Du retour au salon...........

Elle s’installa, respira profondément, et ouvrit le carnet à nouveau.

Page après page, elle découvrit des lettres, parfois longues, parfois à peine quelques lignes. Mais aucune n’était signée. Aucune ne portait de nom. Pas même celui de l’auteur.

 Mais soudain, elle tomba sur ses écrits 

“J’ai longtemps cru que t’écrire suffirait à faire taire ton absence.”

“Je repense souvent à ce jour où tu m’as souri sans rien dire. C’est ce silence-là qui m’a accompagné le plus longtemps.”

Là elle venait d'avoir la confirmation qu'il ne s’agissait pas de simples pensées, mais bien de confessions. Un amour perdu ? Une rupture non digérée ? Ou… un secret plus lourd encore ?

Syntiche sentit son cœur battre plus fort.

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Elle tourna les pages, encore, puis encore. Chaque lettre semblait reliée à une époque différente. Certaines parlaient d’un lycée, d’un couloir vide, d’une promesse brisée. D’autres évoquaient un banc sous les arbres, des confidences partagées au bord d’un lac, ou encore un vieux cahier de poèmes que l’auteur n’osait offrir.

Elle se surprit à chercher des indices. Une initiale. Une date. Un détail qui pourrait trahir l’identité de la destinataire.

Mais il n’y avait rien. Rien, sauf une phrase étrange, presque glissée au milieu d’un texte :

“Même si elle a tout oublié, moi je me souviens. Elle ne le sait pas, mais je l’ai retrouvée.”

Syntiche recula lentement, les yeux fixés sur les mots.

Elle sentit une sueur froide dans son dos.

Qui était cette femme qui aurait tout oublié ?

Et pourquoi cette phrase donnait-elle l’impression de parler d’elle ?

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Elle tenta de reprendre ses esprits. Peut-être que Narek écrivait à quelqu’un d’autre. Peut-être que tout cela n’était qu’une coïncidence… Une suite de phrases qui la touchaient sans raison précise.

Mais plus elle lisait, plus elle se sentait… concernée.

Une autre lettre parlait d’un bracelet rouge, offert par une grand-mère. Syntiche regarda son poignet. Le bracelet y était. Le même depuis son enfance.

Un frisson la traversa.

 “Elle tordait toujours ce petit bracelet quand elle était nerveuse. C’était un tic doux. Inconscient. Irrésistible.”

Son souffle s’arrêta un instant.

Elle avait fait ce geste… hier. Et avant-hier. Et tous les jours.

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Elle referma brusquement le carnet.

« Non, non, ce n’est pas possible… », murmura-t-elle.

Elle se leva, tourna en rond dans la pièce. Elle devait comprendre. Elle devait savoir.

Elle ressortit une vieille boîte qu’elle gardait sous son lit, pleine de souvenirs d’enfance. Des photos, des lettres, des billets d’école.

Elle fouilla. Rien ne parlait d’un Narek.

Mais sur une vieille photo en noir et blanc, elle vit deux silhouettes dans une cour d’école. Une fille, elle, visiblement. Et un garçon flou, un peu en retrait. Elle ne parvenait pas à distinguer son visage.

Au dos, il y avait écrit simplement :

"Étés 2010 – Le dernier jour."

Son cœur se serra. Elle ne se souvenait de rien.

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Elle reprit le carnet et tourna les dernières pages.

Sur l’une d’elles, il y avait une mention à peine visible, griffonnée dans un coin :

“Le 12 octobre. Le jour où tout s’est arrêté.”

Syntiche se figea.

Elle ouvrit le calendrier de son téléphone.

Le 12 octobre… c’était dans deux jours.

Elle sentit une pression étrange dans la poitrine. Ce n’était plus une simple curiosité. Ce carnet semblait lui parler directement, comme une énigme dont elle serait la clé.

Mais elle n’avait aucune idée de ce qui l’attendait.

Et pourtant… elle voulait savoir.

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Ce soir-là, elle dormit avec le carnet sur la table de chevet, la lumière allumée, comme si le noir risquait d’avaler ce lien étrange entre elle et cet inconnu.

Elle se le promit : demain, elle retournera

it au café. Peut-être que Narek reviendrait.

Ou peut-être… que c’est elle qui devait le retrouver.