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Chapitre 2 | SERO

C’est à ce moment-là que…

La calamité qui leur barrait la route s’arrêta sous un ciel noirci. Mais les flocons blancs qui tombaient n’étaient pas de la neige.

La créature — ses yeux écarquillés, sa bouche dégoulinante de salive — se dressait là, massive, semblable à un porc difforme.

Dans ses mains, elle tenait un énorme couteau de boucher. Un ricanement malsain échappa de ses lèvres, tandis qu’elle savourait l’instant.

« … Je vais vous avouer un secret avant de vous dévorer. »

Elle détourna légèrement le regard, comme si elle éprouvait une pointe de gêne.

« Mes actes… sont pour la bonne cause… même si c’est… un peu personnel. »

— gogogogo…

Son ton s’adoucit, comme prise dans un souvenir.

« Nous, les calamités de rang platine et bronze… sommes considérées comme les plus faibles par nos semblables… »

« Mais… vous ne savez pas à quel point j’ai dû en baver pour arriver jusqu’à platine. »

« Et même maintenant… je ne fais pas le poids contre les rangs argent… or… ou, pire encore… arc-en-ciel. »

— ku ku ku…

Un rire sombre résonna dans l’air glacé.

« Mais aujourd’hui, tout va changer. J’ai réussi à vaincre… sans efforts… l’un de ces stupides généraux de l’Ordre. »

« Même si tu n’étais pas une proie de qualité… »

Elle baissa les yeux vers EDEN, gisant au sol.

« … Tu es vraiment sûr d’être l’un des six généraux de l’Ordre ? »

« Hah ! On ne dirait pas, vu la raclée que tu viens de prendre. »

« Si c’est aussi facile… je vais me faire un plaisir de buter encore plus de généraux. »

Sa langue fourchue vint lécher ses crocs, avec un slurp inquiétant.

« Une victoire reste une victoire… même contre le plus faible des adversaires. »

Elle se gratta la tête en fermant les yeux, un sourire aux lèvres.

« … Ce qui veut dire qu’après vous avoir dévorés, je serai enfin… rang argent… ou peut-être or… ou mieux encore… arc-en-ciel. Hah… j’en salive d’avance. »

Ses yeux brillèrent d’une lueur sanglante tandis qu’elle posait son regard sur EDEN.

« … Je ferais mieux de me bouger avant que ça dégénère. »

— ZAZAZA…!

À ce moment-là, EDEN, debout malgré tout, un œil fermé par la douleur, la main serrée sur son torse couvert d’un tissu imbibé de sang, leva le bras et lança une fiole écarlate en direction d’Alaya.

« … Maintenant ! »

— kacha… kacha…

Revenons en arrière, au moment où la calamité commençait à parler.

EDEN gisait sur le sol, la tête contre un rocher, tenant sa blessure. Son regard se tourna vers Alaya.

Dans sa tête, ses pensées tourbillonnaient.

Je retrouve mes esprits… avant qu’ils ne m’échappent complètement.

J’avais repéré son noyau, grâce aux blessures qu’Alaya lui avait infligées…

Mais j’ai mal réagi. Il m’a tranché. Je suis tombé. Et j’ai dû utiliser la balle… celle qui efface un souvenir.

Sous le choc et sous l’effet de son pouvoir… je me suis évanoui…

Il ferma les yeux.

Promis… si on s’en sort… je m’entraînerai pour le combat rapproché.

Mais… j’ai l’impression qu’un homme masqué m’a murmuré quelque chose… et je n’arrive plus à remettre les mots en ordre…

Il inspira.

… Ce n’est pas le moment de penser à ça.

Alaya souffre. Il faut… que je l’aide…

D’abord… faisons le point sur ce qu’il me reste…

Le dos contre la pierre, il croisa le regard d’Alaya, qui le fixait également.

Ils hochèrent la tête.

EDEN serra la dague.

Un trait de sang jaillit.

Il recueillit le liquide dans une fiole, banda son bras, but un flacon de force, se remit debout malgré la douleur, puis lança la fiole écarlate en direction d’Alaya.

« … Maintenant ! »

De retour au présent —

La fiole fendit l’air, la créature la tranchait le sang se répandit sur Alaya, qui se releva d’un bond. Elle fixa la calamité avec un grognement rageur.

— Grrrr…!

La calamité grimaça.

« … Donc… c’était pour la remettre sur pied ? Elle ne fait pas le poids contre moi, pourtant… »

Elle bondit, lame levée, tel un éclair s’abattant sur la terre.

EDEN murmura alors, presque imperceptiblement :

« … Maintenant. »

Alaya hurla, saisit un rocher et le lança de toutes ses forces.

La créature le fendit net, son sourire cruel aux lèvres.et dit 

« … Tu crois que ça va m’arrêter ? »

Mais ce n’était qu’une diversion.

— hyun!

Alaya bondit de nouveau, son épée étincelante, et trancha la créature de part en part.

Le noyau apparut.

EDEN le vit.

La créature recula, leva son arme pour l’abattre sur elle — mais ses bras furent soudain bloqués, enchevêtrés de fils d’acier sanglants.

Pendant ce temps, EDEN avait tiré une balle reliée à ces fils.

« … Je visais son noyau. Mais à cause de ma blessure à l’œil… je manquais de précision. Alors… plan B… »

Alaya comprit d’un seul coup.

Elle brisa la balle, enroula les fils autour de son arme et des bras de la créature.

Le monstre hurla, sectionna ses propres bras dans un geste désespéré.

— GAAAAH !

EDEN sourit, serrant entre ses mains un poing américain autour du fil.

« … C’est entre toi et moi maintenant. »

Le fil se tendit entre l’épée d’Alaya, plantée dans la stèle, et les bras d’EDEN.

Il serra les dents, tira de toutes ses forces.

— gigigi…!

La créature, le cou pris dans les fils, hurla dans un dernier souffle :

« … Tu… n’es qu’un vulgaire humain… tu ne peux… pas me… vaincre…! »

Les bras d’EDEN furent lacérés déchiqueter par la tension du fil.

Mais il ne lâcha pas.

Il attrapa l'objet avec ses dents et lui et la créature hurla :

« HAAAAAAA ! »

— KRAK…!

Le noyau céda. Le cou décapitée 

La créature s’effondra.

EDEN vacilla, murmura dans un souffle :

« … J’ai… gagné… »

Puis il s’évanouit — la tête la première dans la poitrine voluptueuse d’une femme, vêtue comme une dominatrice, entourée de ses subordonnés.

« … Elsa… » murmura-t-il.

PAM !

Une gifle le réveilla.

Elsa détourna le regard, un léger rouge aux joues.

« … Sale porc… ce n’est ni le moment ni l’endroit pour ça… »

Ses subordonnés hurlèrent en chœur :

« Eeeeeeh ?!?! »

EDEN protesta.

« Sale folle ! Tu vois bien que c’était pas ma faute ! »

Elsa haussa les épaules.

« … C’est ce qu’ils disent tous. »

Les subordonnés murmurèrent entre eux.

« Elle fait la fière… mais elle a aimé, c’est sûr… »

Elle les foudroya du regard.

« … Que ceux qui tiennent encore debout s’occupent de la carcasse de la calamité. Les autres, on rentre. »

Les subordonnés soupirèrent.

« … Et revoilà l’autorité de la Dominatrice… On aurait mieux fait de rejoindre un autre docteur… elle fait trop peur… »

« EXÉCUTION ! Et donnez les premiers soins au docteur EDEN ! »

« À vos ordres !!! »

On transporta EDEN et Alaya dans le véhicule.

À l’intérieur, Elsa s’assit en face de lui.

Alaya, sur le côté, boudait ostensiblement.

EDEN lui demanda :

« … Alaya, tu as mal quelque part ? »

Elle secoua la tête pour dire non, mais détourna le regard, tirant la langue en direction d’Elsa comme pour dire “EDEN est à moi”.

Elsa sentit son sang bouillonner.

« … Je dois régénérer tes bras. Viens. Mon pouvoir ne marche pas bien ici. »

Elle le tira dans une autre pièce du véhicule, posa ses mains sur ses blessures et utilisa son pouvoir.

Elle se pencha, ses yeux mi-clos, son souffle contre sa peau.

Dans sa tête, Elsa pensait :

… Enfin… il succombe à mon charme… comme tous les autres…

EDEN la fixa longuement, puis murmura :

« … Elsa. J’ai… quelque chose à t’avouer. »

Elle sentit son cœur bondir.

« … Dis-le… »

« J’ai… besoin d’une fiole de souvenirs. Tu en aurais une ? Promis, je te rembourse… »

— GAAAH !

Elsa soupira.

« … Tu sais qu’une fiole coûte très cher, même pour moi ? Et qu’elle ne peut contenir qu’un seul souvenir ? »

« Oui, je sais. Abrège. Tu en as une ou pas ? »

« … En plus d’être pauvre, tu es malpoli… »

Elle sortit une fiole et la lui tendit.

« Tiens. Garde tes miettes. J’en ai pas besoin. »

EDEN la but sans attendre.

Elsa, profitant de l’instant, tenta d’approcher son visage.

Il rouvrit les yeux.

« … Tu fais quoi là ? »

Elle détourna les yeux.

« … Je vérifiais juste… que ton œil allait bien. Tu peux commencer ton souvenir. »

EDEN ferma les yeux, avala le contenu de la fiole et hurla dans un souffle.

— SERO !